L’avant-projet de la nouvelle Constitution a été remis le 11 octobre 2022 au Président de la Transition, Colonel Assimi Goïta. Le projet a fait l’objet d’une large consultation des forces vives affirme la commission chargée de son élaboration. Pour l’instant, des voix s’élèvent pour soit critiquer ou apprécier le document.
Ce nouveau texte de loi fondamentale est composé de 195 articles et consacre la création d’un parlement à deux chambres et la suppression de la haute cour de justice et du haut conseil national des collectivités, la création d’une Cour des Comptes ; l’impossibilité pour l’Assemblée de renverser le Gouvernement ; la création d’un nouveau parlement ; l’interdiction à un élu de quitter son parti en cours de mandat, etc.
Ce texte a suscité des réactions contrastées au sein de la classe politique. Si certains se réjouissent des articles consacrants notamment la souveraineté sur les ressources naturelles ou encore les procédures de destitution introduites dans la nouvelle constitution pour le président de la République, celui de l’Assemblée nationale, le futur Senat.
Cheick Boucadry Traore du CAR, qui tout en reconnaissant que la Constitution de 1992 est « atteinte de péremption » et a besoin de révision – voir le changement dénonce l’esprit qui a guidé les auteurs de ce avant-projet : « les auteurs de l’avant-projet de Constitution du Mali nous présentent un projet de texte qui divise et délibérément discrimine certains segments de notre population. Il semble que les auteurs se sont sentis si puissants qu’ils ont élaboré un projet de lois pour leur propre profit et la satisfaction de leur vanité. Ils ont échappé parce qu’ils ont misé sur nous tous pour faire confiance au système de gouvernance et notre soutien aux institutions de transition. C’était notre vulnérabilité et ils en ont profité. Mais ils ont aussi oublié que notre vie est soit définie par le système, soit par la façon dont nous le défions».
Pour sa part Me Bathily du M5 RFP Mali Koura estime qu’« aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire » en citant l’article118 de la Constitution du 25 février 1992.
Aux dires du président du Mouvement pour la Refondation du Mali Morema, Me Kassoum Tapo : « Les vrais problèmes ne sont pas pris en compte dans cet avant-projet : « parce que, certainement les auteurs ont voulu prendre en charge tous les problèmes institutionnel, politique, économique et social du pays. Ce qui fait que l’avant-projet a plus l’allure d’une loi organique que d’une Constitution qui prend en charge un peu les problèmes relevant du domaine du Code civil, des Codes de déontologie, de l’administration, etc… donc du domaine de la Loi. Toutes choses qui n’ont forcément pas leur place dans une Constitution qui doit se limiter aux principes d’organisation des pouvoirs publics. Je pense que ce n’est qu’un avant-projet comme son nom l’indique et qui est susceptible d’être amélioré pour aboutir à un projet définitif à soumettre par référendum au peuple ».
Face à ces voix, d’autres politiques soulignent le caractère provisoire de l’avant-projet ; Me Mountaga Tall, président du CNID estime qu’ « il convient de s’entendre sur la nature du document produit par la Commission de Rédaction de la Nouvelle Constitution du Mali qui s’intitule textuellement « Avant-Projet de Constitution de la République du Mali ». Un avant-projet n’est autre chose que la rédaction provisoire ou l’étude préparatoire d’un projet. Les ingénieurs ou autres concepteurs ou bâtisseurs d’ouvrages diront une maquette ou une esquisse. Cette première précision me parait utile pour cerner les contours des débats en cours. Pour l’instant, rien n’est gravé dans le marbre et les discussions et analyses sont certainement utiles et doivent être bienvenues ».
Baba Dokono, secrétaire exécutif de l’Observatoire Citoyen sur la Gouvernance et la Sécurité (OCGS) plaide lui pour plus d’écoute. Il propose qu’un débat national de validation soit organisé avant le referendum et que des délégués viennent de partout sur le territoire national afin de se prononcer. « Il y a encore la possibilité d’apporter des innovations afin qu’il réponde aux attentes des Maliens. Le délai de deux mois pour un tel exercice est insuffisant », précise-t-il.
Mémé Sanogo