Le hasard de l’histoire a fait croiser deux hommes au parcours presque antinomiques. Le premier, à savoir Assimi Goita, est officier Colonel de l’armée et le second, Choguel Kokalla Maiga est un vétéran de la scène politique. Ils ont en commun aujourd’hui d’avoir contribué à débarrasser le Mali d’un des régimes les plus corrompus, celui d’IBK. Si tant est qu’ils ont les mêmes ambitions, celles de servir avec engagement et patriotisme le Mali, alors ils ont un destin commun. Pour que leur passage à la tête de l’État ne soit pas celui de trop, ils sont condamnés à accomplir ces cinq missions à la fois exaltantes et glorieuses, s’ils veulent se rendre immortels comme Thomas Sankara ou Johnny Jerry Rawlings pour Assimi Goita et Patrice Lumumba pour Choguel Kokalla Maiga.
Ceux qui ont marqué l’histoire de l’humanité ne l’ont pas fait souvent au bout des armes, mais par des actes. Le Mali, après plus de 60 ans d’indépendance est à la recherche d’un leader éclairé pour lui indiquer la bonne voie à suivre. Après cinq coups d’État, l’occasion est-elle bonne cette fois ci pour sortir de ce cycle infernal et annihilant ? Pour y parvenir, voici cinq grandes missions susceptibles de mettre le pays sur les rails de la démocratie, de l’état de droit, et du développement.
La première mission est de redonner confiance au peuple dans un pays où la classe politique est en faillite, caractérisée par la corruption, le népotisme, la médiocrité. L’armée décriée et incapable d’accomplir sa mission régalienne de préservation de l’intégrité territoriale et de la sécurisation des personnes et de leurs biens, le peuple ne sera que déboussolé et abandonné à son triste sort, car ne sachant plus à quel saint se vouer. Aujourd’hui, la première mission de la Transition doit consister à redonner espoir au peuple en posant des actes concrets, et cela passe d’abord et avant tout par le choix des hommes et des femmes. Le Mali a besoin de véritables guerriers, patriotes, compétents et moralement aptes dans tous les domaines. Ces hommes et femmes auront pour mission de poser les jalons du Mali Koura, tant dans le domaine des réformes que dans celui de la relance de l’économie.
La deuxième mission est celle des réformes institutionnelles. A-t-on besoin de rappeler cette célèbre phrase de l’ancien président américain Barack Obama, « l’Afrique a besoin d’institutions fortes et non d’hommes forts » ? Les Ghanéens semblent avoir compris cette assertion en dotant leur pays d’institutions indéboulonnables. Les Maliens doivent s’inspirer de ce bel exemple ghanéen pour doter leur pays des pareilles institutions afin de mettre non seulement fin aux coups d’État à répétition, mais aussi à la corruption. Donc, les réformes sont indispensables et la transition semble être la période indiquée pour le faire.
La troisième mission consisterait à réformer la Justice. L’une des tares de notre démocratie voire même de notre société est la Justice. Au lieu d’être le socle sur lequel les citoyens se reposent, elle devient sa hantise, son épouvantail. Il faut une véritable catharsis pour qu’elle soit une Justice juste, non corrompue et au service exclusif du peuple. Pour ce faire, il faut des décisions fortes et un remue-ménage en mettant à l’écart tous les médiocres. La Justice doit être extirpée du giron du politique en lui donnant son entière indépendance. Des élections à l’interne, avec des juges élus à des postes clés de la Justice. Le Président de la Transition Assimi Goita et le Premier ministre Choguel Kokalla Maiga pourraient déjà envisager cette réforme indépendamment de celles des autres institutions pour commencer à mener une lutte implacable contre la corruption.
La quatrième mission est celle de la lutte contre la corruption. La corruption est devenue endémique au Mali. D’aucuns la comparent à un cancer qui s’est véritablement métastasé dans tous les secteurs. Lutter implacablement contre un tel fléau c’est faire œuvre utile. La matière ne manque pas, car les dossiers de contrôle et d’enquête s’entassent dans les bureaux des juges, il suffit qu’il y ait une petite dose de volonté politique et une audace pour déclencher une véritable opération de lutte contre la corruption. Pas de fanfaronnade, ni de chasse aux sorcières. Cette mission aura un double avantage, d’abord récupérer nos sous volés, et mettre hors d’état de nuire tous les délinquants financiers, dont certains s’apprêtent déjà à reconquérir le pouvoir d’État pour continuer leurs sales besognes. Le second avantage est qu’elle donne espoir aux investisseurs qui fuient le Mali, car le pays n’est pas une bonne destination et ne donne pas de garanties de sécurité. Donc, la lutte contre la corruption et l’impunité doit occuper une place de choix dans le programme de la Transition.
La cinquième mission consisterait à pacifier le pays et à organiser des élections transparentes, crédibles et incontestables. Si nombreux sont les Maliens qui ont applaudi le tandem Assimi Goita et Choguel Kokalla Maiga, c’est moins pour leurs beaux yeux que pour l’expérience que chacun a dans son domaine de prédilection. Il est fortement attendu d’eux la pacification du pays et une bonne organisation des élections. Ces deux défis sont majeurs car ils sont à la base de tous les malheurs de notre pays. L’insécurité est devenue endémique et les élections mal organisées sont à la base de l’instabilité politico-institutionnelle. Donc, le couple militaro-politico-civil à la tête du pays est fortement attendu sur son terrain de prédilection. Il doit pouvoir réussir ces deux challenges pour entrer dans l’histoire du pays.
En Somme, Assimi Goita et Choguel Kokalla Maiga ont une occasion idoine d’écrire l’une des pages les plus glorieuses de l’histoire contemporaine du Mali. Ils doivent, sans malice, ni calculs politiciens, collaborer, sinon même être des complices pour redorer le blason du Mali et le mettre au diapason des Nations respectées.
Youssouf Sissoko.