Kodiè est un village soninké situé dans la commune rurale de Guidimé, cercle de Yélimané dans la région de Kayes au Mali. Cette zone est sahélienne et n’a aucun forage lui permettant de s’approvisionner en eau potable. Or, ces dernières années, le Gouvernement malien mobilise des moyens financiers, matériels et moraux importants pour la fourniture et la bonne gestion de l’eau potable à travers tout le territoire. Outre l’Etat, l’apport des expatriés maliens occupe une grande place dans le développement local.
La première région (Kayes) enregistre plus d’émigrants que les autres régions. Ces expatriés qui songent plus au développement de leur pays, particulièrement de leurs villages natals, ont l’habitude d’y financer la réalisation de grands projets telle que la construction d’infrastructures routières, des châteaux d’eau, de lieux de culte (Mosquées), etc.
L’eau, source de vie, est de plus en plus précieuse surtout dans la zone sahélienne. C’est pourquoi, sur la Route Nationale N°1, dès qu’on rentre dans le territoire régional de Kayes, les mihrabs des Mosquées, les rôniers et les multiples châteaux d’eau donnent une parfaite beauté à la vue du paysage. Dans cette zone, l’eau est presque tout : elle est indispensable dans l’utilisation domestique, le jardinage et l’élevage.
C’est pourquoi depuis 2008, Bassourou Koïta, un natif de la localité, a pris l’initiative de construire un château d’eau sur un financement qui sera mobilisé par les ressortissants expatriés du village de Kodiè en France. Les premières tentatives de la réalisation du nouveau joyau datent du 25 mai 2009. Dès lors, des rivalités se sont enclenchées entre les habitants de Kodiè. Le clan proche du chef de village s’opposa d’une manière acharnée.
Pourquoi s’opposeraient-ils à la construction d’une infrastructure destinée à fournir de l’eau potable à tout un village 24H/24 ?
Selon une source du village, tout s’explique par le seul fait que le chef n’a pas été impliqué dès le début de la réalisation du projet. Après plusieurs ruptures des travaux imposés par le chef de village et ses acolytes, de multiples implications des chefs coutumiers et culturels, en passant par certaines autorités notamment le général Kafougouna Koné, la tension a un peu baissé. Ce qui a permis aujourd’hui d’avancer profondément dans les travaux.
«Tous les matériels nécessaires sont disponibles pour faire jaillir de l’eau potable à travers tout le village de Kodiè. Le forage est déjà creusé, le château est monté. Nous utilisons déjà l’eau du forage d’une manière indirecte. Mais, la meilleure solution, c’est de faire passer l’eau d’abord par un château avant de la faire évacuer dans le réseau de tuyauterie. La toute dernière phase qu’il nous reste, c’est d’achever le réseau de tuyauterie pour en finir à jamais. Moi-même, je suis pressé de rentrer chez moi», nous explique Bougouna Adama Sanogo, chef d’équipe de l’entreprise chargée du projet.
En plus de ce dernier, nous avons interviewé plusieurs autres personnes à savoir des femmes, des maîtres d’école, de medersa, etc. Le constat est simple : aucune agression verbale de la part d’aucun à l’endroit du clan opposé. Seulement, des explications de leur souffrance due au manque d’eau potable, des prières et des suggestions afin de trouver des solutions idoines à une telle situation étonnante et inexplicable.
Ainsi, la présidente des femmes du village de Kodiè, Sokona Soukouna, nous révèle : «Nous n’avons qu’un seul grand puits pour servir tout un village. Il faut que chaque ménage se déplace pour s’approvisionner en eau à partir de ce puits. Certaines femmes peuvent marcher sur plus de 2 kilomètres pour puiser une eau qui n’est ni potable, ni traitée. Moi-même, je suis sexagénaire et souvent je suis obligée de me déplacer pour satisfaire mes besoins en eau, soit en acheter. La barrique est à 500 francs CFA. Ce qui nous coûte très cher surtout en période de disette. En plus de la cherté, la rareté aussi s’impose car le seul puits ne peut pas assurer tous les besoins en eau de tout le village. Je suis l’actuelle présidente de toutes les femmes de Kodiè. Je dirige plus de 800 femmes aujourd’hui. Donc, je sais ce que les femmes subissent dans cette situation tragique.
Le cercle de Yélimané compte 42 villages. Chacun de ces villages a au moins un château d’eau fonctionnel, sauf ici à Kodiè. Nous avons aujourd’hui, Dieu merci, tous les matériels pour pouvoir utiliser à notre guise de l’eau potable quand nous voulons et comme nous voulons. Comment certaines personnes parviennent à nous priver d’une chance que nous trouvons divine ? Lors de l’hivernage passé, une fillette de six ans s’est noyée dans le puits dont on parle. Tout cela constitue des tragédies pour nous. C’est pourquoi, j’interpelle les autorités et toutes les personnes de bonne volonté à s’impliquer afin que nous puissions sortir d’une manière paisible de cette situation tragique».
Dans un pays où la devise nationale est «Un peuple, Un But, Une foi», où les autorités parlent de réconciliation nationale, où la rébellion fait déjà des victimes dans nos rangs, où la vie est si chère, les autorités doivent-elles échouer dans la résolution d’un tel problème, avant qu’il y ait mort d’homme ? Tout compte fait, la population de Kodiè qui attend avec impatience la mise en marche de leur nouveau château, sollicite une implication parfaite des autorités afin de trouver une solution idoine à ce problème.
Touré M.D.K.
Accueil Société