Située à 90 Km de Tombouctou, la ville de Goundam abrite trois grands systèmes lacustres : le système du lac Horo, le système du lac Fati et le système du lac Faguibine. Qui regroupe, à lui seul, plusieurs lacs interconnectés. Leur remise en eau permettra, d’une part, d’atteindre l’autosuffisance alimentaire dans le septentrion malien. Et, d’autre part, de faire du Mali le grenier de l’Afrique de l’Ouest.
D’une superficie de 86.000 ha, le système Faguibine est constitué de cinq lacs interconnectés, alimentés à partir de deux marigots, qui prennent leur source sur le Farabango, un défluent du fleuve Niger. Avant de se rencontrer à hauteur du village de Kanéye, pour former le marigot de Goundam.
Les lacs Télé et Takara couvrent une superficie de 13.000 ha ; ceux de Gouber et Kamango, 20.000 ha ; le lac Faguibine, le plus grand, totalise à lui seul 53.000 ha.
De Soni Ali Ber à Vitallis
Fascinés, par les potentialités de cette zone, des ingénieurs, des chercheurs… ont tenté, non sans succès, de mettre la zone lacustre en valeur. Le premier fût Soni Ali Ber, roi des Songhoï. C’est lui qui creusa, en 1483, le canal qui reliait, par voie d’eau, Raz- Elma à Oualata. Puis, l’ingénieur français, Vitallis, creusa un autre canal, dénommé « Canal Vitallis », qui relie le lac Fati au lac Télé. C’était en 1919. A l’époque la zone lacustre du Mali était le grenier de la sous–région ouest –africaine. Elle approvisionnait les pays d’Afrique de l’ouest en riz, en niébé, en blé… Mais aussi, en poissons sec et fumé. Mais à la fin des années 60, les marigots ont tari. Conséquence : les lacs n’étaient plus approvisionnés en eau. Le sable réoccupa près du 1/3 des surfaces cultivables. Le désert s’y installa. Il a fallu attendre 1986, pour que le gouvernement s’intéresse au système Faguibine. Toutes les études ont montré que la mise en eau des lacs ne pose aucun problème. Surtout, après le désensablement du lit du lacs. Mieux, la zone lacustre du Mali est l’une des rares zones de culture, qui ne nécessitent pas d’engrais pour produire des céréales de qualité. C’est pourquoi le gouvernement a mis en place le « Projet de Mise en Valeur du Système Faguine ». Projet financé par le Bureau des Nations Unies pour le Sahel (UNSO) et le gouvernement norvégien. Mais c’est à partir de 2004, que ce projet a, véritablement, démarré.
OMVF : l’espoir des populations du nord
Le ministère de l’Agriculture a élaboré, en juin 2005, un projet d’aménagement et de mise en valeur du système Faguibine. Coût global de ce projet : 13 milliards CFA.
Mieux, en janvier 2006, l’Assemblée Nationale adopte le projet de loi, portant création de « l’Office pour la Mise en Valeur du Système Faguibine (OMVF) ».
Etablissement public à caractère administratif, l’OMVF a son siège à Goundam. Sa Mission : réaliser, d’une part, toutes les actions permettant d’accroître la production et la productivité agricole dans cette zone. Et, d’autre part, développer les productions animales. La zone d’intervention de l’OMVF couvre trois cercles : Goundam, Diré, Tombouctou. Il s’agit, en gros, d’une vingtaine de communes, regroupant 216 villages et fractions. Premier chef de gouvernement à se rendre dans la zone lacustre, Modibo Sidibé a eu droit à un accueil digne des grands jours. « A ma connaissance, c’est la première fois qu’un Premier ministre se rend dans notre zone, afin d’explorer, avec nous, les voies et moyens, de rendre au système Faguibine ses lettres de noblesse », nous confie un notable de Goundam, que nous avons joint au bigophone. Avant de conclure : « Si le gouvernement consent un effort supplémentaire, le Faguibine pourra produire deux fois, voire trois fois, plus de riz que l’office du Niger ».
Les acquis de l’OMVF
A l’issue de neuf mois de travaux, l’OMVF a réalisé le curage de 16.365 m de chenaux, pour un volume de 76.355 m3 de déblais ; la plantation de 71.359 pieds d’eucalyptus sur 93,08 hectares ; la distribution de 164 tonnes de céréales et de 187 kg de semences maraîchères à 13 associations et groupements de paysans…
Ces réalisations ont favorisé l’arrivée précoce de la crue dans le Farabango. Qui a facilité la mise en terre, et à bonne date, des pépinières ; le démarrage normal des campagnes dans les périmètres irrigués ; la disponibilité de l’eau pour les cultures et le bétail ; la mise en eau de 7.000 hectares supplémentaires, dont l’exploitation permettra de produire 10.000 tonnes de céréales et de légumineuses ; le retour de 3.000 familles au bercail et au travail de la terre ; la restauration de l’équilibre écologique et, enfin, le retour de l’espoir dans cette zone…
Autant de résultats obtenus, grâce à un financement sur le budget national. A sa création, l’OMVF a bénéficié d’un financement de 1,078 milliard CFA, prélevé sur le budget national. Aussi en 2007, le gouvernement a, en dépit des contraintes budgétaires, consenti 1,020 milliard CFA à l’OMVF en vue de consolider les acquis. « L’autosuffisance alimentaire des régions du Nord passe par la remise en eau des lacs de Goundam », indique Mr Tidiane Khalil Ascofaré, directeur général de l’OMVF. Pour ce faire, a-t-il ajouté, des ressources financières supplémentaires doivent être affectées à l’OMVF. Afin de lui permettre de poursuivre, le surcreusement des chenaux d’alimentation des lacs. Un message qui a valeur d’avertissement.
Oumar Babi