Aide ménagères : La misère des retours compromis

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Beaucoup de filles viennent des campagnes pour faire l’aide-ménagère à Bamako après la saison des pluies. Pendant neuf mois, elles travaillent chez l’habitant avec des salaires allant de 10 000 F CFA à 20 000 F CFA. Cet argent est gardé, la plupart du temps par la logeuse ou l’employeuse. Cependant, quand arrive le moment de rentrer, difficile très souvent de mettre la main sur l’argent.

Des milliers de jeunes filles, très souvent même pas majeures, arrivent à Bamako dès la fin de la saison des pluies. Elles se font embaucher chez l’habitante. Le but est de se constituer un trousseau car, beaucoup, dès le retour, seront données en mariage. L’argent collecté pendant les neuf mois passés à Bamako sert donc à constituer le trousseau de mariage, à d’acheter les ustensiles dont elles auraient besoin dans leur futur foyer. D’autres viennent pour aider les parents.

N’ayant aucun lien avec les banques, elles font très souvent confiance, soit à la logeuse, soit à l’employeuse pour garder leur revenu mensuel. Cependant, de plus en plus de cas de “détournements” sont rencontrés.

“Je travaille chez ma patronne depuis 3 ans et c’est une personne très gentille. Depuis bientôt un mois que ma sœur et moi devrions rentrer chez nous au village. C’est quand on a fini de mettre le henné et de nous tresser que la veille du départ, notre tante éloignée, qui garde nos sous depuis 3 ans, qui nous a fait venir et qui nous a d’ailleurs placées en famille, est portée disparue. Cela a été un véritable choc pour nous. J’ai tellement pleuré. C’est comme si j’avais travaillé toutes ces années pour rien”, nous confie Oumou, 15 ans, les larmes aux yeux.

Sarata, aide-ménagère, âgée de 19 ans, a connu la même infortune. Elle informe sa patronne de sa décision de rentrer au village suite à l’appel de ses parents et celle-ci s’emporte jusqu’à vouloir lui porter main.

“Elle a commencé à crier sur moi, oui, en disant qu’elle comptait sur moi pour lancer un commerce, que je la prends au dépourvu. Je lui ai dit que ce sont mes parents qui demandent que je rentre et que mon mariage est prévu avant la Tabaski. C’est en ce moment, à ma grande surprise, qu’elle me dit qu’elle a utilisé justement mon argent car elle ne pensait pas que j’allais rentrer aussitôt”. Depuis, Sarata est bloquée à Bamako.

Educo Mali à travers le projet “Jigitugu” pour la promotion des droits et la protection des filles travailleuses domestiques, accompagne les aide-ménagères défavorisées ou qui ont des problèmes avec leurs familles d’accueil. L’Association de défense des droits des aide-ménagères et domestiques (ADDAD), aide également à ralentir le phénomène de maltraitance des domestiques.

Malgré les efforts des ONG comme le Bureau national catholique de l’enfance (BNCE-Mali), les abus contre les aide-ménagères connaissent de beaux jours.

Ces aide-ménagères, à peine âgées de 15, 16 ou 17 ans, travaillent jusqu’à point d’heure, pour des salaires en dessous du Smig et finalement, qui subissent des sévices parmi lesquelles, les détournements des salaires.

Sarata, quant à elle n’a eu d’autre choix que d’attendre, espérant que sa patronne lui trouve une solution. “Elle m’a payé 100 000 F CFA il y a dix jours. J’espère qu’elle me trouvera une solution avant la fin de l’hivernage”, ajoute-t-elle.

Oumou, dont l’âge ne permet pas de travailler selon la loi n°1992-20 du 18 août 1992 portant Code du travail au Mali, se trouve coincée, n’ayant aucun recours. Elle n’a aucune nouvelle de sa tutrice. Elle compte sur l’époux de sa patronne qui lui a promis de lui donner de l’argent pour qu’elle puisse rentrer comme prévu afin de se marier.

Il est évident que la prise de conscience couplée à la création d’un cadre de protection plus pointue est le premier pas vers la solution aux problèmes des aide-ménagères afin de leur garantir leurs droits les plus fondamentaux.

D’ailleurs, l’application des instruments internationaux ratifiés au Mali en l’occurrence la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant (CDE) et la Charte africaine sur les droits et le bien-être de l’enfant (CADBE) reste l’une voie à suivre pour permettre des meilleures conditions de travail.

 

Aminata Agaly Yattara

Ce texte est publié avec le soutien de JDH Journalistes pour les Droits Humains et NED

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