«Écoutez-moi, ces derniers jours, ils mentent sur moi au sujet de la disparition de quelqu’un issu d’une de nos grandes familles… Mais si un membre de la famille disparaît pendant un jour, sans qu’on ne s’en inquiète ; deux jours de suite, une semaine, un mois, et c’est jusqu’à trois ans passés, à fortiori, qu’on s’en inquiète ! Et c’est à moi que l’on veut faire porter le chapeau. Ce sont des mensonges. Pour moi, j’en conclus que le mois de juillet dernier, je me suis rendu dans la grande famille maure pour rendre visite à mon père. Et ce n’est qu’une affaire de plaisanterie coutumière entre un grand- père et son petit-fils. C’est tout.»
Voilà les propos du fils du président de la République, lors de sa harangue à l’endroit de ses supporters venus l’écouter, ce samedi 7 mars, au lancement de la campagne électorale de la liste RPM-MPM-ADEMA pour les prochaines législatives.
Serait-ce un nouveau rebondissement dans l’affaire Birama Touré ou un épisode de plus, énième autour de la disparition du journaliste du Sphinx ? Un brin provocateur, Karim Kéita, le député sortant de la Commune II, en quête de réélection, a décidé de passer à la contre-offensive. Et à l’en croire, les Touré de Bagadadji sont coupables de pas s’être intéressés pendant longtemps au sort d’un des leurs porté disparu.
En dehors de la dénégation, «ces deux jours, ils mentent sur moi… Et c’est à moi que l’on veut faire porter le chapeau ! Ce sont des mensonges», le puissant Katio ne répond à aucune interrogation, encore moins sur le fond du différend qui l’oppose à la famille du journaliste du Sphinx disparu, il y a quatre ans, le 29 janvier 2016, contrairement aux trois ans annoncés par le mis en cause par la famille du disparu.
Mieux, Karim Kéita réduit ses relations difficiles avec les Touré, du fait de l’affaire de la disparition et de la probable mort tragique de Birama Touré, à une banale «affaire de plaisanterie coutumière entre un grand-père et son petit-fils», quand tout le reste, d’après lui, n’est qu’un tissu de mensonges.
L’intervention du candidat sortant de la Commune II en rajoute plutôt à la confusion sans parvenir à le blanchir des soupçons que font peser sur lui les interventions des familles fondatrices.
Mais il est vrai que le patriarche Mamadou Touré n’a jamais explicitement accusé Karim Kéita ; tout au plus, s’est-il borné à inviter plusieurs fois mais en vain le fils du président de la République à venir l’éclairer quant à son éventuelle implication, comme il a été cité à plusieurs reprises par les journaux.
Cependant, à travers les propos «la disparition de quelqu’un issu d’une de nos grandes familles…», les observateurs auront noté ce qui s’apparente, aux yeux de la famille, à un mépris souverain à peine caché de Karim, qui ne prononce même pas le nom de Birama Touré au cours de sa courte intervention sur le sujet devant ses supporters.
Les Touré de Bagadadji, selon des sources, sont aussi estomaqués par l’attitude du candidat et député sortant qui n’a pas hésité à les traiter de menteurs. Selon un de ses membres, la famille du journaliste a accusé le coup des accusations de Karim Kéita qui souligne implicitement des intérêts sordides, et non le souci du sort de Birama Touré, motivant la cabale des Touré de Bagadadji engagée contre lui.
Le jeudi 20 février puis le jeudi 5 mars, les familles fondatrices, regroupées autour des patriarches des 27 familles Touré de la Commune II, avaient en effet convié la presse pour à chaque fois faire part de leur détermination à s’opposer et appeler à boycotter, voire voter contre toute liste où figure le nom de Karim Kéita. La raison de cette défiance envers le puissant rejeton présidentiel, selon les familles fondatrices, était fondée sur les soupçons concernant son rôle supposé dans la disparition de notre confrère Birama Touré.
Karim semble avoir sollicité, en vain, des interventions multiples auprès de la famille Touré, dont celles de l’ambassadeur d’Arabie Saoudite, du puissant Directeur général de la Sécurité d’Etat, le Général Moussa Diawara, et de l’ambassadeur du Mali aux Emirats Arabes Unis, Boubacar Kolon Sidibé, proche de la famille présidentielle.
La réponse du puissant fils du président de la République est donc tombée, ce samedi 7 mars, sous forme d’ironie mais aussi d’accusations implicites des membres de la famille du journaliste d’être motivés par autre chose que la recherche de la vérité, d’autant qu’ils auraient attendu trois ans (en réalité quatre ans) pour s’inquiéter soudainement de la disparition d’un des leurs.
Tout porte à croire que cette réponse n’arrangera guère les relations passablement orageuses entre les deux camps. Et ce ne sont pas l’emploi et la plume acérée d’un Spin Doctor d’une officine hexagonale à la dénomination locale, appointé à plusieurs millions mensuels, qui contribueront à l’accalmie. Pas plus d’ailleurs qu’avoir luxueusement à demeure un élément clé des investigations en cours !
Décidément, si ces prochaines législatives semblent avoir donné une nouvelle impulsion à l’affaire Birama Touré, tout l’enjeu en réside en tout cas dans l’issue du scrutin en Commune II, autour de la réélection ou non de Karim Kéita.
Bourama Kéita