Au commencement, on peut dire que l’Imam Mahmoud Dicko, membre influent de l’Association Malienne pour l’Unité et la Promotion de l’Islam (AMUPI) fut l’ami de chacun des trois présidents du Mali démocratique de 1992 à nos jours. Cet Imam polyglotte parlant, l’Arabe, le Français, l’Anglais, le Peul, le Sonrhaï, le Bamanan, le Sarakolé, a un commerce agréable lorsqu’on le rencontre. Mais cela ne suffit pas pour le juger. Pour le connaitre, il faut discuter des concepts de l’islam avec lui. En jouant à cet exerce, c’est là qu’on le découvre dans sa bonne lecture islamique et de sa connaissance de la politique au sens propre du terme. En un mot, il est cultivé et ne se laisse pas prendre au premier piège monté. Le Président Alpha a accepté la construction d’une église à l’entrée de la ville de Tombouctou, au motif que le Mali est un pays laïc. Les mises en garde proférées par Mahmoud Dicko à l’endroit du Président Alpha en présence de l’actuel premier Ministre Soumeylou Boubèye Maïga à l’époque chef de cabinet du Président Alpha Oumar Konaré ont fini par lui donner raison, lorsque Alpha a renoncé à ce projet. Cela a constitué une première victoire pour lui. Cette victoire sera par la suite une occasion de désamour et la pomme de discorde entre les deux responsables autrefois amis inséparables. Mais avant cela, Alpha le consultait beaucoup par rapport à la nomination de ses premiers ministres . Le cas le plus patent a été le choix du nouveau premier ministre après la démission forcée de Me Abdoulaye Sékou Sow en mars 1994. En effet, Alpha soucieux de l’avenir de son mandat et de la démocratie malienne a suggéré trois noms à son ami Mahmoud Dicko, afin de lui permettre de choisir celui qui pourra apporter la stabilité. A la fin de la consultation, l’Imam après s’être éclipsé pendant 48 heures, est revenu avec le nom d’Ibrahim Boubacar Keïta, comme étant celui qui pourra apporter la stabilité au pays et à son régime. A cause de cela, IBK, Alpha et Mahmoud Dicko sont devenus très familiers jusqu’au jour où les Institutions de Breton Wood à savoir le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale ont annoncé que le pays était stable, mais que les clignotants macro-économiques étaient au rouge, et qu’il faille par conséquent changer d’attelage. Lorsqu’il a été mis fin à la mission d’IBK en tant que Premier Ministre l’Imam s’est éloigné d’Alpha pour lequel il devenait gênant, à cause de ses prises de position dans la défense des concepts religieux. Cet appel de l’imam à voter en faveur d’IBK n’a pas eu grand effet, parce qu’Alpha avait déjà sa stratégie en tête pour barrer pour de bon la route à IBK et à son ami Mahmoud Dicko. Peut-être qu’il avait fini d’évaluer la capacité d’IBK ,si jamais il est à la tête du pays ? Alpha dans sa volonté de combattre IBK et Mahmoud Dicko, avait instruit à ATT de ne jamais permettre à l’Imam Dicko, d’être le président du Haut Conseil Islamique du Mali (HCIM) après le départ de son premier président, à savoir le doyen Thiam de Lafiabougou, au motif que Dicko était un extrémiste.
ATT venu dans ces conditions a été abordé par les responsables de la communauté wahabite du Mali, afin de permettre à l’Imam Dicko, d’être à la tête du HCIM, tout en garantissant à ATT, que les membres du HCIM allaient se charger de l’encadrer. ATT a été sensible à ces mots, et il lui a permis de diriger le HCIM du Mali. Leur premier désaccord viendra de l’adoption du code de la personne et de la famille en Août 2009. En effet ce nouveau code qui venait d’être adopté par l’Assemblée Nationale du Mali un 21 juillet 2009 était jugé également attentatoire aux valeurs religieuses de l’islam. L’Imam Dicko en tant que Président du HCIM a organisé ouvertement la riposte des musulmans du Mali pour bloquer la ratification du dit code. Il a fallu une seconde lecture pour supprimer tous les articles qui donnaient un temps soit peu une certaine autonomie à la femme malienne. C’est au cours d’un très grand meeting au Stade du 26 Mars le 9 Août 2009, en présence de 100 000 fidèles musulmans que la mise en garde a été lancée par le président du HCIM. ATT absent du pays, a vite fait de rejoindre le Mali, en se mettant immédiatement à consulter une à une les institutions du Mali. Enfin, la loi est allée en seconde lecture. Mahmoud Dicko, venait de gagner une autre victoire contre le régime d’ATT. Son combat, ne s’est pas arrêté à ce stade. Trouvant que ATT était laxiste dans la gestion du pays, il n’hésitait plus à le lui faire savoir lors des cérémonies de présentation de vœux de nouvel an à Koulouba. Chose qu’ATT n’appréciait guère. Très souvent le ton montait dans leurs discours respectifs. Trois jours avant la mutinerie du 22 Mars 2012, au cours de leur dernière rencontre à Koulouba, ATT n’a pas hésité à faire savoir à Dicko, qu’il fait parti d’un groupe qui s’apprêtait à intenter un coup d’état contre lui. Bien que l’Imam ait réfuté cette allégation, trois jours après, le capitaine Sanogo et sa bande ont perpétré une mutinerie qui a abouti à un coup de force le 22 Mars 2012, à trois mois de son départ du Palais de Koulouba. Paradoxalement, Dicko a été le premier responsable malien, que les mutins ont rencontré à Kati. La suite est connue, car ayant été déchu par les putschistes, il a voulu créer un parti islamique, mais apparemment, il n’a pas eu de soutiens dans le milieu des musulmans qui en majorité voulaient s’éloigner de la politique. Il s’est donc résolu à créer des associations à l’image de Sabati 2012 pour aider IBK à conquérir le Palais de Koulouba. On se souvient de ce fameux slogan de Sabati 2012 « IBK fô Koulouba ». IBK venu dans des conditions dont nous nous interdisons de commenter a renforcé ses relations avec le président du HCIM. Au détriment de son parti IBK a même dit publiquement que ce sont les religieux qui l’ont fait élire. Pour la conquête d’un troisième mandat, IBK a mis des pieds et des mains afin d’élire l’Imam Dicko à la tête du HCIM en driblant la communauté des leaders religieux du Mali dirigée par Cherif Ousmane Haïdara. Etant entendu que le maçon se juge au pied du mur, Dicko a fini de juger IBK dans la pratique de la gouvernance malienne qui était désormais sans vision réelle. Néanmoins, il a accepté pour aider le Mali à sortir de sa crise multidimensionnelle à prendre la tête d’une commission de bon office pour nouer le dialogue avec les groupes islamistes non signataires de l’Accord d’Alger en 2015. Nous pouvons dire que la première étape de cette mission a été couronnée de succès, car Iyad Ag Ghaly, vu ses rapports avec Mahmoud Dicko, depuis 1992, a accepté la main tendue de l’imam, et avait décidé d’arrêter les attaques en attendant les négociations futures entre toutes les parties. Cela s’est passé sous l’ancien premier Ministre Abdoulaye Idrissa Maïga. Avec l’arrivée de SoumeylouBoubèyeMaïga à la Primature et suite à la menace des ministres français des affaires étrangères de France et d’Allemagne, interdisant toutes négociations avec les islamistes, IBK et SoumeylouBoubèyeMaïga ont décidé de dissoudre ladite commission de bon office et de mettre le rapport de Dicko dans les poubelles de Koulouba, sans lui en informer. Rappelons que l’imam était parvenu aux premières heures de l’invention du nord par des groupes islamiques à libérer et faire ramener plus de 160 soldats maliens détenus par eux. Dès lors Mahmoud Dicko a compris que la mal gouvernance était devenue un ver qui a infiltré le fruit et qu’il fallait changer de cap après plusieurs conseils et mise en garde sans succès. Dans ce combat, il s’est retrouvé dans le même camp que le Cherif de Nioro, qui a été l’un des acteurs clés de l’élection d’IBK en 2013.Au Mali, nous avons toujours mis en garde les hommes politiques en leurs faisant savoir qu’ils n’apprennent pas les leçons de l’histoire et des régimes. Sinon comment peut-on être amnésique en allant clandestinement insérer dans le programme scolaire à Ségou l’éducation sexuelle au collège sans penser aux conséquences d’une telle décision surtout par rapport aux faits similaires précédents à savoir la construction d’une église à Tombouctou, le code de la personne et de la famille des différents régimes successifs de la démocratie malienne ? Cet autre projet vient d’être abandonné fort heureusement. IBK en disant qu’il n’était pas au courant a lâché ses ministres et le Chef du gouvernement. Une fois de plus encore, l’Imam Mahmoud Dicko, vient de remporter une autre victoire éclatante bien appréciée par le peuple. SoumeylouBoubèyeMaïga, qualifié de renard politique s’est laissé prendre au jeu et a subi une grande humiliation. En conclusion l’Imam Dicko dans l’engagement pour la défense de l’islam, devient le talon d’Achille de tous les régimes démocratiques au Mali.Que Dieu sauve le Mali et Mahmoud Dicko.
Badou S. KOBA