Ses compétences, son sérieux, son dévouement, sa grande maîtrise des dossiers et du travail font de lui un homme digne de confiance.
Du haut de ses 63 ans, ce cadre malien a un parcours aussi constant, valeureux et enviable. Magistrat de formation, il a roulé sa bosse dans la haute administration avec un sérieux toujours affiché qui est la marque des grands hommes. Tous ceux qui l’ont rencontré ou ont travaillé avec lui mettent en avant sa grande capacité d’écoute et d’analyse. Autant de qualités spéciales qui lui ont valu sa nomination au poste de directeur de cabinet du Premier ministre avec rang de ministre avant de se hisser à la tête de la Cour constitutionnelle à la faveur de la crise politique. Outre le président ci-dessus cité, Asser Kamaté et Doucourou Kadidia Touré ont été désignés par le président de la République, Maliki Ibrahim, Ba Haoua Toumagnon et Beyla Ba doivent leur qualité de membres au bureau de l’Assemblée nationale, Demba Tall, Mohamed Abdourhamane Maïga et Djénéba Karenbenta sortis tout droit du tuyau du Conseil supérieur de la magistrature. Conformément à la loi, tous ont prêté serment lundi devant l’Assemblée nationale réunie avec la Cour suprême sous le regard approbateur du président IBK et du médiateur de la Cédéao dans la crise malienne, l’ex-président du Nigeria, Goodluck Jonathan.
Avec une longue carrière, ce baroudeur nommé Amadou Ousmane Touré ne traîne pas de casseroles. Chantre de la lutte contre la corruption en sa qualité de Vérificateur général de 2011 à 2018, il a régulièrement donné des sueurs froides aux délinquants à col blanc. Ses volumineux rapports épinglaient les cas de détournement de fonds, la surfacturation devenus un sport favori. Ainsi, il a trempé sa plume dans les plaies des sulfureux dossiers portant sur l’acquisition de l’avion présidentiel et la fourniture du matériel militaire en 2014 dont les ramifications touchaient les proches du président de la République Ibrahim Boubacar Keïta.
Rigueur et honnêteté
Ses anciens collaborateurs sont les mieux placés pour révéler ses traits de caractère. Un cadre qui l’a côtoyé retient de lui «sa rigueur et son honnêteté envers la chose publique. » Bréhima Mamadou Koné, chercheur à l’Institut de recherche et de promotion des alternatives de développement en Afrique a loué « sa grande maîtrise des dossiers et du travail.»Les dossiers soigneusement renseignés, préparés, il les dévore avec une avidité alliée à l’efficacité. Combinées à sa prodigieuse rigueur intellectuelle et son dévouement achèvent de faire de lui un homme digne de confiance. Son initiative visant à demander des comptes au ministre sortant de la Sécurité intérieure, le général Salif Traoré, sur l’engagement de la Force spéciale anti-terroriste (Forsat) dans le maintien d’ordre a été bien accueillie dans le landerneau politique malien et dans le monde associatif. Des semaines après, la guerre des chiffres se poursuit encore. Le gouvernement fait état de 11 tués, le M5 évoque un bilan d’au moins 22 morts et plusieurs dizaines de blessés.
Certes, il entame sa nouvelle mission à lui confiée, mais c’est à l’aune de la pertinence des arrêts de la Cour constitutionnelle que les Maliens prendront la mesure du changement. Son baptême de feu sera le réexamen du contentieux électoral né à l’issue des dernières législatives de mars et avril derniers. Contre toute attente l’institution avait flanqué 51 des 147 sièges à pourvoir au Rassemblement pour le Mali (RPM, parti au pouvoir) contre 43 d’après les résultats provisoires publiés par le ministère de l’Administration territoriale. S’en est suivi le déclenchement d’une crise politique dans laquelle patauge à présent le Mali. En dépit de la médiation de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) soldée par un plan de sortie de crise qui se heurte à la résistance acharnée et du Mouvement du 5 juin, Rassemblement des forces patriotiques et de la mouvance présidentielle.
Des options sur la table
Les yeux sont désormais rivés sur l’institution. Plusieurs options sont sur la table allant du réexamen des résultats provisoires communiqués par le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, à la reprise totale des législatives, en passant par l’organisation des partielles dans les circonscriptions électorales litigeuses. Cette dernière possibilité reste peu probable puisque liée à une hypothétique démission des députés jugés mal élus. Beaucoup d’observateurs politiques tablent plutôt sur une dissolution du Parlement. Une mesure du reste insuffisante pour purger la crise, tant le malaise social est profond.
Georges François Traoré