C’est ce mercredi 18 août qui fait une année, jour pour jour, depuis que l’Armée a intervenu entre le mouvement populaire formé par des associations issues de la classe politique et de la société civile et le Régime d’Ibrahim Boubacar Kéïta. Intervention militaire des entrailles de laquelle sortira la quatrième Transition politique du Mali depuis l’avènement de l’ère démocratique en 1991. Après une année d’existence de cette transition, que peut-on retenir ? Quels sont les avancées et les manquements ?
Etant donné que la Charte de la transition signée aux lendemains de la chute du Régime d’Ibrahim Boubacar Kéïta, sous l’égide de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a acquis l’adhésion d’une bonne partie des mouvements et associations de la classe politique et de la société civile, la date du 18 août 2020 est une autre date mémorable dans le processus démocratique malien.
Ce jour, tôt le matin, un Groupe d’Officiers des Forces Armées Maliennes (FAMA) est descendu du camp Soundjata Kéïta de Kati pour prendre assaut le domicile du Président IBK à Bamako et repartir avec lui et son Premier Ministre Boubou Cissé.
De cause à effet, dans l’après-midi, c’est l’annonce de la chute du Régime contesté par le Peuple malien qui envahira le célèbre monument de l’Indépendance nationale de Bamako-Coura où manifestants civils et Hommes en treillis sympathisaient et fraternisaient déjà dans un élan de victoire acquise. Un renversement de Régime, cette fois-ci, sans aucune de sang du Peuple malien versée ni pillage des Biens publics et privés des innocentes populations. De cette date mémorable à nos jours, il y a un an. Un an à l’issue duquel beaucoup d’eaux semblent avoir coulé le pont des Acteurs politiques civils et militaires.
En effet, force est de constater que le bilan qui se dégage de la mise en œuvre de la feuille de route confiée aux nouvelles Autorités dans le cadre de la charte de cette transition parait mitigé. Entre lenteur, hésitations et suspicions politiques de part et d’autre et la persistance de la crise sécuritaire dans les Régions du Nord et du Centre du pays ainsi que du phénomène d’impunité, le processus de mise en œuvre de la feuille de route semble s’être ensablé et ce, malgré les lueurs d’espoir suscité de çà et là.
D’abord, au plan politique, la première erreur du Régime militaro-civil aura été de mettre à l’écart l’aile civile du combat contre le système IBK. A savoir le M5-rfp dont le Comité stratégique et l’Autorité morale ont été les vrais meneurs de la fronde populaire contre le Régime corrompu en place. Ce qui entraina des blocages et mésententes internes au sein de la première équipe du Gouvernement de la transition avec le trio arbitral de Bah N’Daw, Assimi Goïta et Moctar Ouane (respectivement Président, Vice-président et Premier Ministre de la transition).
Comme l’enseigne un adage universel, dans l’union de trois, il y a implicitement un qui sera mis en minorité, c’est le tandem du Président et du PM qui semblera s’afficher plus clairement dans le cadre de la prise des décisions inscrites dans le cadre de la mise en œuvre de la feuille de route de la transition. Cela, jusqu’à la date du 24 mai 2021 qui sera marquée par le clash survenu au sommet de l’Etat. Pour rectifier le processus mal parti, les lendemains du coup de force soldé par la dépossession à Kati de Bah N’Daw et Moctar de leurs des prérogatives, le Colonel Assimi Goïta et ses compagnons d’armes ont eu le flair de s’assumer et lancer l’appel à la rescousse au Président du Comité stratégique du M5-rfp. Et la suite, on la connait.
Au plan politique, c’est le principal fait marquant de la première phase de l’an 1 de la chute du Régime d’IBK.
Au plan sécurité, le climat social se dégrade davantage avec la montée d’un cran des attaques terroristes, du phénomène de grand banditisme et de criminalité résiduelle dans l’ensemble du pays. Cela, malgré les efforts des forces de sécurité dans leur mission régalienne de protection principalement des centres urbains.
Pour la mise en œuvre du fameux Accord de paix d’Alger, c’est presque le statuquo.
Pour l’organisation des élections à la date indiquée, des efforts sont en court tant du côté du Département de l’Administration territoriale et de la Primature. Ce, malgré les velléités incessantes des Politiciens nostalgiques de l’ancien système d’IBK.
Côté ‘‘ Bonne Gouvernance’’, les douze mois écoulés de la transition équivalent à une véritable saison de grèves avec de trop d’hésitation dans la lutte contre l’impunité.
Ainsi, concernant la demande sociale, devenue le dossier le plus sensible dans la gestion sociopolitique de ce pays, les centrales et sections syndicales des travailleurs ont multiplié les pressions sur le Gouvernement de la transition. Leur plate revendicative portait sur la mise en application à tout prix tous les Accords signés aveuglement par le Régime défunt d’IBK. Or, suite aux répercussions de la double crise sécuritaire (sévissant dans les Régions du Nord et du Centre) et sanitaire (COVID-19) aggravée par la série de crises sociopolitiques de 2020 suivies du coup d’Etat militaire, les caisses de l’Etat sont vides. Sur la scène internationale, le Mali est placé dans un isolement avec tout ce que cela sou tend comme blocages et dégâts collatéraux sur les sources de revenus financières et économiques pour l’Etat et les Populations.
Au plan socioéconomique, le coût de la vie reste cher avec l’inflation, les flambées des prix des denrées alimentaires et des biens de première nécessité. La politique de contrôle des prix sur le marché très attendue tarde à s’instaurer à l’échelle nationale.
Pour ce qui concerne le chapitre ‘‘ Lutte contre la corruption et l’impunité’’, les yeux des Maliens restent rivés vers la Justice à qui les Institutions spécialisées (Bureau du Vérificateur Général, CASCA, OCLEI…) ont transmis leurs piles de dossiers mais sans aucune poursuite engagée effectivement contre les principaux Accusés. Pourtant, de 2013 à 2020, sous le Régime d’IBK, le pillage des ressources de l’Etat et l’impunité ont été érigés en système au su et au vu de tous les contribuables maliens. Marqué par des actes et comportements frisant le détournement des deniers publics, la pratique de surfacturations, les vols, le népotisme, le clanisme, la délinquance financière, l’héritage auquel sont confrontées les nouvelles Autorités de la transition demeure lourd et quasiment intact. Le dossier de lutte contre la corruption et l’impunité reste pendant devant les juridictions compétentes en matière juridique.
Dans l’ensemble, le processus de mise en œuvre de la feuille de route de la transition accuse des lenteurs pour atteindre des progrès escomptés quelques progrès.
En conclusions, les défis à relever ne sont pas des moindres. La persistance des attaques terroristes n’est pas pour arranger les choses.
En termes d’acquis, il y a eu, certes, un élan d’espoir ; mais, les défis, eux, restent énormes et de loin les plus difficiles. Ce qui donne à la mise en œuvre de la feuille de route de cette transition un caractère de mi-figue-mi-raisin après une année consommée. Une situation de sur-place qui risque de compromettre éventuellement les sacrifices consentis jusqu’ici par le nouveau Gouvernement.
Djankourou