C’est la ville de Ouelessébougou, à 85 km au sud de Bamako, qui a abrité, la 12ème édition du Forum des Peuples, organisée par la Coalition des Alternatives Africaines Dette et Développement (CADMali). C’était du 7 au 8 janvier 2016.
Présidée par le sous-prefet de Ouelessebougou, Modibo Diarra, la cérémonie d’ouverture du forum a enregistré la présence du nouveau maire Yaya Samaké, le chef du village et autres autorités locales, ainsi que des coordinateurs du CAD-Mali.
Le forum des Peuples est une initiative de la Coalition Africaine Dette et Développement (CAD Mali), organisée, habituellement en contrepoint du sommet du G8 et du G20, appelés encore “sommets des superpuissances”.
Comme son nom l’indique, le Forum des Peuples, depuis 2006, mobilise les masses populaires de différents pays et fait remonter leurs préoccupations aux gouvernants et décideurs. Il se veut comme un sommet alternatif Citoyen Afrique-France et dont l’objectif est de contribuer à la réflexion sur les problématiques qui impactent le développement durable de l’Afrique. Aussi, il s’agit à travers ce forum de faire des propositions alternatives sur des préoccupations mondiales, telles que la Dette, les accords de partenariat, la sécurité, l’immigration, les ressources naturelles, l’Agriculture, le foncier, l’emploi jeune.
L’édition de Ouelessébougou a mobilisé plus de 500 représentants des mouvements sociaux africains et internationaux. Les participants sont venus du Bénin, du Burkina-Faso, du Cameroun, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée, du Maroc, de la Mauritanie, du Niger, de la RDC, du Sénégal, du Togo et de l’Occident pour partager leurs expériences et proposer des alternatives aux problèmes auxquels les masses ouvrières et paysannes sont confrontées en Afrique et de par le monde.
Les thèmes cette édition portent sur des questions de la France-Afrique et les accords de libre echanges; la sécurité et la paix en Afrique; des questions migratoires. S’y ajoutent, les problématiques de la monnaie, de l’industrialisation de l’Afrique, du néocolonialisme, du financement des services sociaux de bases, etc.
Ces thèmes ont été débattus par des conférenciers maliens et étrangers à travers des symposiums, des conférences populaires paysannes, des ateliers et conférences-plénières.
Les recommandations issues de cette 12è édition seront remises aux responsables du 27è sommet Afrique-France en guise de contribution.
Le chef de village, le maire et le Sous Préfet ont exprimé leur satisfaction quant au choix de Ouelessebougou pour la tenue du 12ème forum des peuples ou forum des “pauvres”.
Si pour le chef de village, il permet de donner une belle image à la commune de Ouelessébougou, le sous- préfet a estimé qu’il permet d’apporter des éclairages aux paysans, éleveurs, commerçants et artisans sur le partenariat entre la France et l’Afrique. C’est aussi, a-t-il ajouté, une occasion en or pour les populations rurales d’apporter leurs propositions à la construction du Mali et de l’Afrique.
Ce 12ème forum des Peuples, comme les précédents, a été marqué par des expositions ventes des produits locaux (marché des Peuples) et des prestations culturelles.
Berthé M’Pè
A retenir de la 12ème édition du Forum des Peuples : « Les altermondialistes demandent la sortie de tous les pays africains de la Cour Pénale Internationale(CPI) et la création d’une Cour Pénale Africaine
A l’issue des travaux de la 12è édition du forum des Peuples, des 7 et 8 janvier 2016 à Ouelessebougou, voici la déclaration qui a sanctionné les travaux de ce forum dit des “Pauvres”
“Nous Femmes, hommes, jeunes, étudiant-e-s, paysan-ne-s, commerçant-e-s, ouvrier-e-s, chercheurs, migrant-e-s, militant-e-s des mouvements sociaux, citoyen-ne-s d’Afrique, et d’Europe, mobilisés du 07 au 08 Janvier 2017 à Ouélessébougou, cercle de Kati, région de Koulikoro, adoptons la présente déclaration à l’occasion de la 12ème Edition du Forum des Peuples du Mali, un Sommet Alternatif Citoyen au 27ème Sommet Afrique-France qui a porté sur le thème central : « Les peuples du Sud exigent des alternatives pour un nouveau partenariat économique, social et sécuritaire entre la France et les Etats africains ».
Cet Evénement inédit en Afrique a réuni plus de 800 participantes et participants, venant des différentes régions du Mali, du Bénin, du Burkina Faso, du Cameroun, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée Conakry, du Togo, du Sénégal, du Maroc, de la Mauritanie, du Niger, de la RD Congo et de l’Europe représentant plus d’une centaine d’organisations et mouvements sociaux.
Face à la crise globale du système capitaliste et à la faillite du mode de gouvernance néolibéral dicté par les multinationales et les puissances de l’Occident, qui cherchent davantage à reconquérir notre continent, les résistances s’organisent un peu partout dans le monde pour construire des alternatives respectueuses des droits humains, de l’ équité, de la justice sociale et environnementale.
La Coopération France-Afrique datant de plus de 56 ans n’a apporté aucun remède adéquat aux multiples défis que connait le Continent africain. Le sommet alternatif citoyen Afrique-France constate au contraire que la coopération françafricaine n’a servi que les intérêts économiques, politiques et géostratégiques des seuls dirigeants français, africains et leurs multinationales au mépris des peuples africains.
Les participantes et participants au Sommet Alternatif Citoyen se sont indignés des politiques de répression, de stigmatisation et de racisme des Etats du Nord à l’encontre des populations immigrées, reflet d’un passé colonial et d’un présent néocolonial.
Considérant qu’en dépit des accords sur le droit de libre circulation des personnes dans les espaces régionaux comme la CEDEAO, les participants voient ce droit être bafoué ;
Considérant que les accords commerciaux inéquitables comme ceux des APE (Accords de Partenariat Economique), que l’Union européenne est en train d’imposer aux pays de l’Afrique-Caraïbes-Pacifique constituent des instruments en faveur des grandes puissances capitalistes et des multinationales du Nord contre les peuples ;
Considérant que les peuples africains sont victimes des effets du dérèglement climatique causé principalement par les industries du Nord, de l’accaparement des terres agricoles, de l’agrobusiness et la destruction de l’agriculture vivrière accentuent l’appauvrissement des paysans et la dépendance alimentaire de nos pays ;
Etant donné que le système de la dette imposée par les Institutions de Bretton-Woods est un instrument de domination, de pillage et compromet le développement de l’Afrique et constitue une violation flagrante des droits humains ;
Considérant que le système de la microfinance et du microcrédit est un outil d’endettement et d’appauvrissement des victimes des programmes d’ajustement structurels entrainant la perte de la dignité humaine ;
Constatant, que les interventions militaires étrangères sur le continent et les accaparements de ressources naturelles qui s’en suivent plongent l’Afrique dans une nouvelle phase de domination impérialiste. Les peuples africains sont pris dans le piège d’une spirale de conflits qui entrainent l’utilisation de la violence et esclavagisme sexuel des femmes et des enfants comme armes de guerre, la prolifération des armes et la présence massive et permanente des forces étrangères sur nos terres ;
Considérant les limites du francs CFA qui se trouve être une monnaie de domination ;
Eu égard à ce qui précède nous, mouvements sociaux exigeons :
- L’arrêt immédiat de l’accaparement des terres, du pillage des ressources naturelles, de la destruction de l’environnement du continent africain ;
- L’expropriation des terres sans indemnisation des grands propriétaires fonciers ;
- La mise en place de politique publique sociale et environnementale basée sur la redistribution des richesses, la production vivrière pour garantir la souveraineté alimentaire, la justice sociale et environnementale ;
- Le respect des droits humains fondamentaux, aussi bien à travers le droit à la libre circulation et d’établissement des personnes, qu’à travers le droit à avoir une vie digne ;
- L’annulation des accords de libre-échange ;
- La poursuite des débats sur la création de la banque du Sud et la création d’une monnaie unique africaine ;
- L’arrêt de la criminalisation et de la persécution des migrant-e-s et la libre circulation des personnes ;
- L’arrêt des accords de réadmission, de l’utilisation des Laisser Passez Européens et de l’externalisation des frontières Européennes sur le Continent ;
- La suppression des visas et la liberté de circulation des Africains dans tous les Etats du continent ;
- La sortie de tous les pays africains de la Cour Pénale Internationale(CPI) et la création d’une Cour Pénale Africaine ;
- La fin du financement de l’Union Africaine par les fonds Européens ;
- La mise en place d’audit citoyen de la dette extérieure et intérieure publique des États pour en déterminer les parts illégitimes, illégales, odieuses et insoutenables et de procéder à leur abolition pure et simple et le remboursement d’une dette écologique et la création d’un front mondial contre la dette ;
- L’arrêt et l’annulation des contrats de concession de nos États avec les multinationales ;
- L’arrêt et annulation des contrats de désendettement et de développement (C2D) qui maintiennent les peuples africains sous le joug colonial ;
- L’arrêt de la vente des titres de dettes publiques sur les marchés financiers des pays les plus industrialisés aggravant la situation d’endettement des pays du Sud ;
- L’arrêt de l’émission d’euro-obligations que certains de nos États (le Cameroun, la RD Congo etc.) sont en train d’effectuer sur le marché financier international ;
- La renationalisation de toutes les sociétés d’État qui ont été privatisées sous la pression du FMI et de la Banque Mondiale et contre les intérêts des Africains ;
Nous, mouvements sociaux du Sud comme du Nord, nous nous engageons à poursuivre ce combat en développant une solidarité concrète pour que toutes nos luttes légitimes constituent les piliers du monde de demain.
le Forum des Peuples !
Vive le Forum Social Ouest Africain !
Vive le Forum Social Africain !
Un Autre Monde plus juste est nécessaire.
A Ouélessébougou le 8 Janvier 2017
Le Sommet Alternatif Citoyen Afrique- France.