Assurance maladie obligatoire au Mali :Un sujet qui fâche

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De nombreux syndicats entendent protester contre le régime Assurance Maladie Obligatoire initié par l’Etat malien. Les raisons de leur colère sont, hélas, légitimes…
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rnAdopté par  le Conseil des Ministres du 29 septembre, le projet de création du régime assurance Maladie est désormais dans sa phase pratique. Les salaires des bénéficiaires s’en ressentent depuis le mois de Novembre dernier. Une cotisation de 3,6% est en effet prélevée sur tous les salaires depuis cette date  alors que le système ne sera opérationnel qu’en Avril prochain. C’est le principe.
rnCe ne sont pourtant pas les grincements de dents qui manquent. Et pour cause : Certains esprits malins ont  déjà fait le rapprochement entre le taux de prélèvement de 3,6% et l’augmentation 7.500 F CFA sur les salaires et devant prendre effet à partir du mois de janvier dernier. Ils ont trouvé que le montant de la cotisation (3,6%) correspond approximativement à celui de l’augmentation concédé par l’Etat sur la base du SMIG malien.  Une manière pour l’Etat, disent-ils, de «récupérer» l’augmentation  concédée sous la pression des syndicats.
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rnCe n’est pas tout. Ils sont encore nombreux à s’interroger sur plusieurs autres aspects de la question.
rnS’agit-il d’une assurance maladie  ou d’un système de sécurité sociale ? La loi N°15 du 26 juin 2009, présente l’Assurance  Maladie Obligatoire  (AMO)  comme   un mécanisme de protection sociale  couvrant les frais de soins de santé inhérents à la maladie et à la maternité des assurés et des membres de leurs familles à charge.
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rnPour sa part dans la pratique, la sécurité sociale, se définit comme un service public de l’État assurant une protection des travailleurs pour les risques de maladie, d’accidents ou de maternité. Mais contrairement à l’assurance Maladie, le principe de la  sécurité sociale dépend surtout de la situation professionnelle et personnelle des assurés.
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rnExplications : un travailleur des mines est beaucoup plus exposé aux risques de son métier qu’un bureaucrate. Mais le salaire de ce dernier peut s’avérer plus ou moins conséquent. Alors, les deux travailleurs doivent-ils être logés à la même enseigne, c’est-à-dire, avoir le même taux prélèvement de 3,6% ? En clair, faut-il uniformiser les cotisations alors que les risques professionnels encourus et le montant salarial perçus par les adhérents ne sont pas les mêmes ? Il faudra signaler au passage que le prélèvement est effectué sur le salaire brut et non sur les indemnités.
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rnAutres motifs d’inquiétudes : Les taux de prise  en charge du panier de soins sont de 80 % des frais en cas d’hospitalisation et 70 %  en cas de soins variables. Toutes fois, ne sont concernés que les produits pharmaceutiques à dénomination Commune Internationale (DCI) et non les spécialités. Ne sont également pas  concernées les opérations d’évacuation sanitaires à l’étranger.
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rnAussi, le caractère obligatoire du régime soulève également beaucoup d’autres inquiétudes. De nombreux travailleurs sont d’ores et déjà affiliés à des mutuelles de santé. Et voilà que l’Etat leur en impose une autre sans leur consentement.
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rnPour leur part, ces mutuelles de Santé crient également à la concurrence déloyale de l’Etat.
rnFaut-il le rappeler ? C’est l’Agence pour le Développement et la Coordination des Relations Internationales (ADECRI), une organisation française, qui a mené l’Étude technique sur la mise en place de l‘Assurance Maladie Obligatoire et du Fonds d’Assistance Médicale au Mali. Les travaux ont été entièrement financés par l’ambassade de France au Mali à hauteur de 30.000 dollars US soit un peu plus de 15 millions F CFA.
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rnC’est donc très logiquement que nous devrons nous inspirer du modèle français. Ici, il existe de nombreux régimes d’assurance Maladie (la Mutualité Sociale Agricole, le régime SNCF, le régime social des indépendants par exemple) et même des régimes spéciaux selon les caractéristiques particuliers de l’activité professionnelle des adhérents. Et le choix de l’assureur est laissé à l’appréciation du groupe socioprofessionnel.
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rnEn somme, quoique relevant du social, l’Assurance Maladie constitue également une activité économique devant initialement être soumise au principe de la libre concurrence. Mais en imposant un seul régime et une seule caisse, l’Etat malien encourage non seulement la concurrence déloyale préjudiciable aux mutuelles de santé existantes, mais aussi favorise la médiocrité et la corruption. Et pour cause.
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rnLe mécanisme mis en œuvre voudrait que la Caisse Nationale d’Assurance Maladie signe un contrat avec les prestataires de santé que sont les hôpitaux publics seuls partenaires agrées.
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rnIl n’y a qu’à consulter les rapports de contrôle au niveau de ces structures sanitaires pour évaluer le niveau de corruption, de clientélisme et d’autres. Ajouter à cela les grèves sauvages avec ses morts (les plus fortunés parmi les patients sont alors contraints de se rabattre sur les cliniques privées – un privilège qui n’est pas accordé à l’adhérent), la non-pénalisation du secteur (un médecin malien ne risque pénalement rien en cas de faute professionnelle grave, de négligence coupable)…
rnEn somme, le travailleur adhérent (obligé) peut ne pas bénéficier de soins appropriés  pour ces motifs. En voulant le protéger, l’Etat l’expose malheureusement.
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rnA la lumière de tous les griefs évoqués, les initiateurs de l’opération doivent revoir copie. Mais puisque nous nous trouvons dans un Etat ayant peu d’égard pour son citoyen, le fameux régime se trouve déjà dans sa phase d’exécution. Le Conseil d’Administration est déjà en place ; les contrats de prestation de services signés ; le personnel recruté… Tout cela a été rondement mené avant même la note d’information à l’endroit du travailleur. Bref, il ne reste plus maintenant qu’à conduire le mouton à l’abattoir après l’avoir dépouillé de sa laine.
rnB.S. Diarra

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