Environ 20 millions de femmes avortent chaque année dans le monde. Sur un million d’avortement 78 000 meurent des complications. Si les soins post avortement constituent un élément essentiel de la santé, cependant, par crainte de stigmatisations, nombreuses sont les femmes à se soustraire de cet exercice. Quid du Mali ?
-maliweb.net- Qu’elle soit involontaire ou provoquée, l’avortement est une réalité sous nos cieux. Pour les professionnels de la santé, les soins post avortement sont des éléments essentiels dans la santé car ils permettent de réduire la mortalité et la morbidité maternelle.
Selon l’OMS, en octobre 2021, environ 13% des décès maternels à échelle mondiale sont les résultats de complications d’avortement dangereux, et dans certaines régions, ce chiffre représente jusqu’à un tiers de ces décès. Toujours selon l’OMS, bon nombre de ces cas surviennent dans les pays où l’accès à l’avortement est limité par la loi.
Au Mali, le Code pénal, en son article 170, condamne l’avortement volontaire tenté ou obtenu de quelque manière et les personnes concernées sont passibles d’une peine d’un à 5 ans d’emprisonnement, et facultativement de 20 000 à 1 000 000 FCFA d’amende. Cela a pour conséquence, de faire de l’avortement clandestin un recours.
« Mes parents sont divorcés, j’habite avec ma grand’mère à Ségou. Quand je suis tombée enceinte, peu de temps après je me sois rendue compte que l’auteur de ma grossesse était quelqu’un immature, mais surtout ne pouvant pas garder cet enfant par crainte de l’opprobre pour ma mère et ma grande mère, j’ai décidé d’avorter avec l’aide d’un pharmacien de Bamako. Ce dernier m’a fait parvenir des comprimés et j’ai suivi ses instructions. Les jours qui ont suivi la prise des comprimés, j’ai eu des maux de ventre et j’ai expulsé le fœtus petit à petit », témoigne une jeune dame âgée d’à peine 18 ans. Selon ses dires, elle n’a pas été dans un centre de santé pour suivre de soins particuliers après ‘son avortement’ par peur de voir son secret dévoilé.
La peur de devoir avouer leurs forfaits aux médecins, semble la grosse crainte de nombreuses filles et femmes. « Après mon dernier avortement, j’ai choisi d’aller vers les herboristes pour nettoyer mon utérus. Car je garde un mauvais souvenir d’un de mes avortements qui a échoué, et au moment de mon accouchement la sage-femme qui avait retrouvé au fond de moi un tube sensé me faire avorter, m’a fait des remontrances et menacé de me dénoncer si je recommençais » témoigne O.T, une jeune mère-célibataire d’une trentaine d’années.
Dr Amadou Bocoum, gynécologue obstétricien au CHU Gabriel Touré, affirme qu’au Mali, toutes les structures de santé de l’intérieur comme de Bamako, est dotée d’une unité dédiée aux soins après avortement. Pour le Dr Bocoum, l’accès à ces services n’est pas problématique. Le gynécologue indique que le Mali possède une politique gouvernementale axée sur les soins après avortement. Et d’ajouter que le personnel soignant est également formé pour faire une prise en charge professionnelle des patientes sans préjugés.
Selon Dr Amadou Bocoum, les soins après avortement concernent l’ensemble de services fournis à une femme ayant subi une interruption de grossesse avant la 22è semaine de grossesse, qu’elle soit spontanée ou provoquée. « Dans le monde, environ 20 millions de femmes avortent chaque année. Et sur un million d’avortement, 78 000 meurent des complications liées à l’avortement. En Afrique y compte le Mali, on a 3 à 4 millions d’avortement et la grande majorité des décès maternels sur le continent est lié aux complications de l’avortement. L’avortement est un sujet à grand intérêt sur la santé publique qui nécessite une prise en charge en dépit des tabous qui concours le sujet », souligne- t-il.
Le Mali dans son Plan d’Action National de Planification Familiale (2012-2018) élaboré à la suite des conférences de Ouagadougou, de Mbour au Sénégal, et de Londres. Ce document dispose d’un Plan d’Action de repositionnement de la planification familiale dans lequel l’accès aux soins après avortement (SAA) est précisé comme un concept de la santé de la reproduction au Mali.
En plus, au Mali, des structures sanitaires privées ou publiques, se chargent d’accompagner des femmes après fausse couche ou avortement incomplet en leur offrant des soins après avortement sans préjugés comme c’est le cas de l’ONG Marie Stopes Mali.
Khadydiatou SANOGO, Ce reportage est publié avec le soutien de JDH et FIT en partenariat avec WILDAF-Mali et la Coalition des OSC/PF