La constitution du Mali garantit le droit à la santé, et la loi 044 relative à la santé de reproduction dit que les femmes doivent pouvoir accéder aux soins prénataux, périnataux postnataux, y compris la promotion de l’allaitement au sein. Confirmée au Mali en mars 2020, la pandémie de la Covid-19 à mis à l’épreuve la fréquence des consultations des femmes enceintes au niveau des systèmes de santé. Un passage obligé quand on sait que la médicalisation de la grossesse par des consultations prénatales de qualité permet le recul de la mortalité et morbidité materno-fœtale selon les spécialistes de la santé.
-maliweb.net- « Les premiers mois de ma grossesse ont coïncidé avec l’apparition de la maladie. Et sans vous mentir, avec tout ce qui se disait sur la maladie, franchement j’ai eu peur de me rendre à l’hôpital. Je me disais que j’allais me faire inutilement contaminer. Ma peur était d’autant plus grande qu’on associait systématiquement le coronavirus à la mort», témoigne Fatim Diarra, une jeune hôtelière tenant dans ses bras une petite fille de moins d’un an.
Des propos soutenus par d’autres jeunes mères, et femmes enceintes. En effet, bon nombre de femmes étaient anxieuses rien qu’à l’idée de devoir se rendre aux visites prénatales par crainte de contracter le virus du coronavirus. D’où la faible affluence des femmes enceintes et nouvelles mères dans les services de santé tant au niveau du public que du privé. Une tendance qui a été très vite inversée selon le Chef de service d’obstétrique au CHU-Gabriel Touré, le Pr Mounkoro Niani gynécologue-obstétricien.
Selon ses dires, l’anxiété des patientes était surtout due à la désinformation liée à la Covid-19. Aussi, le Pr Niani, affirme que grâce aux différentes communications diffusées par les médias et les sensibilisations menées à leur niveau, les consultations ont vite retrouvé leur affluence.
Si la pandémie avait poussé beaucoup de personnes à craindre les services de santé publique, les cliniques quant à elles étaient préférées aux centres publics nous déclare le Dr Mandjou Kéïta promoteur d’une clinique privée sise à ACI-2000. « Bien sûr les gens avaient peur de se rendre dans les centres de santé pour ne pas se faire contaminer. Mais comme elles devaient quand-même consulter des spécialistes de la santé, beaucoup ont préféré les services privés aux centres publics », déclare le Dr Kéîta.
Pourtant les dispositions sanitaires étaient prises pour prévenir la maladie nous explique le Pr Mounkoro Niani. Il assure que dès l’annonce de la pandémie, au CHU-Gabriel Touré, des mesures drastiques de prévention avaient été mises en place. « Lors des consultations, nous distribuions des masques aux patientes. Les températures sont vérifiées à l’entrée de l’hôpital et le dispositif du lavage des mains se trouvent également à l’entrée en plus du gel qu’on met à la disposition des malades », soutient le Chef du service de gynécologie de l’hôpital Gabriel Touré.
Santé maternelle en période de Coronavirus
Selon le rapport publié par Save The Children en 2021, au Mali, la mortalité maternelle et néonatale reste élevée avec 325 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes et 33 décès néonataux pour 1000 naissances vivantes. Et les spécialistes de la santé à l’instar du Pr Mounkoro Niani, affirment que ces décès peuvent être évités si la grossesse est vite médicalisée et prise en charge par un spécialiste de la santé.
D’où l’importance des consultations prénatales et postnatales. Qui, d’ailleurs est un droit reconnu par la loi 044 relative à la santé de reproduction dont l’article 7 dit que les femmes doivent pouvoir accéder aux soins prénataux, périnataux postnataux y compris la promotion de l’allaitement au sein. Pour Samaké Fatoumata Traoré, juriste experte en genre et développement, en plus de cette loi relative à la santé de la reproduction, la Constitution du Mali garantit le droit à la santé pour tous même. Cependant, contrairement à ce que dit la loi, l’accès aux services n’est pas facile pour tous les citoyens comme le témoigne Kadiatou Coulibaly. « Déjà que l’accès aux services de santé n’est pas facile pour nous personnes vivant avec un handicap, avec l’arrivée de la Covid-19, la situation s’est empirée. Souvent pour accéder aux locaux des hôpitaux ou atteindre la table de consultation, il faut supporter des situations gênantes sans oublier qu’il nous arrive des fois d’être confrontée aux regards discriminatoires de certains personnels de santé. Certains vont jusqu’à dire toi aussi, tu es enceinte ? », déplore ainsi Kadiatou Coulibaly personne de petite taille, membre de l’association des femmes écrivaines du Mali.
« Je suis membre de l’association de personnes de petites tailles, et j’avoue que beaucoup de mes camarades ont préféré éviter les centres de santé. Déjà que les infrastructures ne sont adaptées à nos besoins, imaginez que vous allez ramper là-bas, c’est aller s’acheter d’autres maladies », explique K.C, expliquant le difficile accès aux soins de santé pour les personnes vivant avec un handicap.
Des campagnes de sensibilisation
La pandémie de la Covid-19 a conduit beaucoup de personnes à reléguer au second plan les examens médicaux. Une négligence qui n’est pas sans conséquence pour une bonne santé maternelle. C’est dans ce cadre, que certaines associations de la société civile ont entrepris des campagnes d’information et de sensibilisation auprès des populations. Selon Aïssata Bocoum, de la fédération nationale des collectifs d’organisations féminines du Mali (Fenacof-Mali), la Fenacof, a effectué de nombreuses activités de sensibilisation pour encourager les populations à exécuter leur examen médical en dépit de la pandémie et les humeurs qui l’entourent.
Selon Aïssata Bocoum, assistante de la présidente de la Fenacof, leur structure a sensibilisé les populations sur la disponibilité des services de soins de santé, et les One Stop Center. A travers les médias et autres activités de terrain, la fédération a sensibilité les populations sur l’utilité et l’importance des soins de santé en général, et ceux spécifiques à la santé maternelle pour le bien être de la femme et de l’enfant.
Khadydiatou SANOGO / Ce reportage est publié avec le soutien de JDH/JHR-Journaliste pour les Droits Humains et Affaires Mondiales Canada