Pr. Sounkalo Dao à propos de la fièvre Ebola : «J’invite les uns et les autres à ne pas céder à la panique…»

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En ce moment où la fièvre Ebola domine l’actualité nationale et internationale, le Professeur Sounkalo Dao, sage, accessible et dévoué à la cause des étudiants, nous donne, dans l’interview qui suit, d’amples informations sur cette maladie très tragique qui, jusqu’à présent, n’a pas de traitement. Lisez plutôt !

 

Le Flambeau : Peut-on mieux connaître le Professeur Sounkalo Dao ?

 

Pr Sounkalo Dao : Je suis Enseignant chercheur et Professeur chargé des cours d’infectiologie à la Faculté de médecine et d’odontostomatologie de Bamako. J’ai dirigé et co-dirigé plusieurs thèses pour l’obtention du grade de Doctorat en médecine.

 

Pouvez-vous nous parler du virus Ebola ?

Ebola est une maladie infectieuse épidémique très contagieuse à transmission à déclaration obligatoire dueà un virus de la famille de Filoviridae, le virus Ebola. Elle se traduit par une fièvre importante accompagnée de saignements internes et extériorisées .Ce saignement pouvant intéresser toutes les parties du corps humain. La chauve souris semble être le principal réservoir. En effet cet animal héberge le virus dans son organisme et n’en meurt pas. Le virus se transmet à travers la peau et les muqueuses. Le malade et le cadavre sont tous dangereux. Tous les liquides de l’organisme humain peuvent transmettre la maladie: le sang, les morves, les urines, la sueur, le sperme (le convalescent peut transmettre le virus par le sperme même 7 semaines après la fin des symptômes).

D’où vient le nom Ebola ?

La maladie porte le nom d’une rivière dans la localité de Yambuku en République Démocratique du Congo (RDC) où elle a été découverte en 1976. Depuis cette date, 30 vagues épidémiques ont secoué certains pays d’Afrique. Il s’agit, en Afrique Centrale, de la RDC, du Soudan, du Congo, du Gabon ;  En Afrique de l’Est, de l’Ouganda, du Soudan ; et en Afrique de l’Ouest, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée et du Liberia.

 

Quels sont les différents sous types d’Ebola?

Il y en a 5, à savoir : le sous-type Zaïre, le sous-type Soudan, le sous-type Gabon, le sous-type Côte d’Ivoire et le sous-type Reston.

 

 A quoi le virus Ebola est-il sensible ?

Le virus Ebola est sensible à l’eau de javel, au formol et au chauffage à 60°C pendant une heure

 

Quels sont les éléments  favorisant  cette maladie ?

Le contact avec les  victimes d’Ebola, y compris les rites funéraires et le contact avec les effets personnels du malade ou du défunt sont les éléments favorisant cette maladie. Cependant, en milieu de soins, le contact avec un cas vivant ou mort sans équipements de protection, le transport ou le transfert des malades, l’examen, le soin, les prélèvements,  le non-respect des mesures d’hygiène, comme l’hygiène des mains, les matériels et équipements médicaux, les déchets médicaux sont aussi des éléments favorisant cette maladie.

 

Comment se manifeste donc Ebola ?

La pénétration du virus dans l’organisme (peau, muqueuse) se fait par voie sanguine et lymphatiques. Ainsi que par l’infection des monocytes, l’envahissement de plusieurs organes, les troubles de la  coagulation, les hémorragies internes et extériorisées (état de choc, décès).

 

Quels sont les diagnostics cliniques de la maladie ?

Les diagnostics cliniques de la maladie sont : l’incubation de 2 à 21 jours, la fièvre, les signes hémorragiques, l’éruption masculo-papuleuse, l’atteinte multi-viscérale, l’état de choc, tout malade ou décès présentant ou ayant présenté une température de 38°C depuis plus de 72 heures et de moins de 2 semaines.

 

Quels sont les diagnostics différentiels de la maladie?

Il s’agit des étiologies infectieuses et des étiologies non infectieuses. Pour ce qui concerne le premier cas, c’est-à-dire les étiologies infectieuses, il s’agit du paludisme, de la fièvre typhoïde ou de la leptospirose et autres fièvres hémorragiques, les hépatites virales. Pour ce qui concerne l’étiologie non infectieuse, on parle d’intoxication.

 

Quels sont les conduites à tenir devant un cas d’Ebola en unité habilité ?

Le port obligatoire des équipements spéciaux, avant tout contact ; éviter les voies veineuses, la réhydratation Ringer lactate, l’apport glucosé, l’antipyrétique (paracétamol), la transfusion (sang, facteurs de coagulation), la prise en charge d’un état de choc, la surveillance…

 

Qu’est ce qu’il ne faut pas faire  en cas d’Ebola en unité habilité?

Il ne faut pas examiner le malade, faire les prélèvements, faire des soins sans les équipements ; faire transférer les malades dans un autre service non habilité, l’injection IM, les gestes invasifs ; donner au malade de l’acide acétyle salicylique ; amener les matériels ou équipements hors unité, sont des choses à ne pas faire.

 

Quels sont les mesures de préventions contre Ebola ?

L’hygiène individuelle des mains ; éviter tout contact avec les malades, cadavres ou ses effets sans protection ; ne pas se rendre en zone épidémique ; désinfecter le domicile des malades/décès ; désinfecter l’unité de soins, sont des mesures préventives contre la maladie.

A l’endroit de la population générale : 1- ne pas se rendre en zone d’épidémie. 2- éviter le contact avec un malade d’Ebola ou ses effets. 3- éviter la manipulation de la viande fraiche d’animaux sauvages comme le singe, les antilopes, le cochon et la chauve souris. 4- appeler les équipes spécialisées pour l’enterrement des décès d’Ebola. 5- ne pas transférer les morts d’Ebola d’une ville vers une autre. A l’endroit du personnel de Santé et des stagiaires en Médecine. En plus de ces mesures sus mentionnées, le personnel médical doit redoubler de vigilance: 1- ne pas examiner ou procéder à des prélèvements sans équipements de protection adéquats. 2- se désinfecter avant et après tout geste médical. 4- devant un cas d’épidémie, chaque malade doit avoir son matériel médical.

Quels sont les maladies virales qui ont pour signes communs hémorragies internes/externes et état de choc ?

Le Flaviviridae, Bunyaviridae, Arenaviridae, Filoviridae (Ebola, Marburg) sont des maladies virales qui ont pour signes communs les hémorragies internes/externes et l’état de choc.

 

Existe t-il un traitement contre la maladie?

De nos jours, il n’existe aucun traitement contre le virus Ebola. Cependant, un vaccin est en cours d’expérimentation sur des singes et le résultat est assez encourageant.

 

Est-ce que la maladie existe déjà chez nous ici au Mali ?

Jusqu’à preuve de contraire, notre pays na pas recensé de cas de fièvre Ebola. Mais, des patients suspectés ont été placés en quarantaine et des actions sont en cours pour savoir s’ils sont effectivement atteints du virus Ebola ou non.

 

Quel est votre dernier mot en guise de conclusion ?

J’invite les uns et les autres à ne pas céder à la panique et à mettre en application les conseils que donne le ministère de la santé…

Propos recueillis par KANTAO Drissa

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2 COMMENTAIRES

  1. je félicite le Pr SOUNKALO pour son éclaircissement sur cette maladie et surtout ses conseils( ne pas céder à la panique). Moi je sollicite la population a respecté ces conseils et surtout de croire à l’existance pour ceux qui y croient pas.

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