Gouffre financier, désorganisation, dysfonctionnement des soins, manque d’équipements sanitaires ou appareils en panne… sont là, entre autres maux, qui minent les deux grands centres hospitaliers du pays, notamment, le CHU Point G et CHU Gabriel Touré.
Aujourd’hui, Point G, comme la plupart des hôpitaux maliens, est dans un état de délabrement avancés, sinon dans l’agonie. Des fissures, murs décolorés, système d’arriération déficitaire, une odeur de peste, lits de fortune…Voilà le triste décor qu’offrent nos hôpitaux. De véritables mouroirs pour les pauvres populations.
Alors que la grande majorité des Maliens est obligée de se contenter des soins au rabais fournis par ces hôpitaux. Aujourd’hui, ceux-ci sont dans un état de délabrement avancés, sinon dans l’agonie.
Combien de fois, des patients se sont entendus dire que le scanner de l’hôpital Gabriel Touré était en panne ? Les patients sont régulièrement redirigés vers des structures privées pour faire leur analyse. Combien sont ces familles qui, impuissantes, ont assisté à une mort lente d’un proche ignorant de quoi il souffrait ?
En effet, ils sont nombreux les malades qui dénoncent leur mauvaise prise ne charge dans ces hôpitaux même dans les cas d’urgence. Pour eux, cela est dû à la négligence et souvent à la mauvaise formation des médecins.
Même accompagner dignement nos morts, nos hôpitaux peinent à assurer souvent le service minimum. Faites un tour des morgues de Bamako, vous rendez compte de l’état de putréfaction des installations et du conditionnement. Quid des soins les plus élémentaires ? Aucune prestation dans nos hôpitaux n’échappe au « trafic ». Tout est rare. Et ce qui est rare devient cher. C’est la politique de l’appât du gain. Aujourd’hui, quand une ordonnance est prescrite, c’est seulement 10 % des médicaments qui sont au niveau des pharmacies hospitalières. Consulter, soigner, analyser et même laver les morts, tout est inclus dans le business des affairistes. C’est, entre autres, le mal des hôpitaux maliens. Un mal qui s’accentue jour après jour malgré les dénonciations de la presse et des réseaux sociaux.
Le Labo est vide !
Les praticiens justifient cette situation par le manque de matériel. On se souvient des explications de Djimmé Kanté, membre du syndicat de l’hôpital Gabriel Touré. « Ici les conditions de travail sont vraiment déplorables. Lorsque vous arrivez chez nous, à l’hôpital Gabriel Touré, facilement on vous dit : il n’y a pas de gants, allez acheter vos gants vous-mêmes. Parce qu’il n’y a pas suffisamment de gants pour les médecins. Et souvent les médecins sont très exposés par rapport à ça. Egalement, vous partez au laboratoire pour un simple prélèvement, on vous demande d’aller chercher une seringue, ce qui est tout à fait anormal. Le strict minimum, les médicaments essentiels… Le labo est pratiquement vide.
Et puis les analyses ne sont pas du tout fiables du fait que certains réactifs sont vendus n’importe comment et les équipements sont souvent achetés vraiment dans des conditions très douteuses. Donc c’est un vrai problème…», avait déclaré le syndicaliste sur une chaîne internationale au moment le secteur de la santé observait une grève illimitée. En effet, le Mali a vécu, sous le règne d’Ibrahim Boubacar Keïta, une situation inédite dans son histoire, à savoir une grève illimitée des agents de santé. Ce qui engendre des conséquences incalculables dans un contexte où les soins de santé sont déjà précaires et à un moment de forte chaleur. Durant cette grève, certains patients, n’ayant pas les moyens de se faire soigner dans les cabinets médicaux privés se sont tournés vers la médecine traditionnelle. Pauvres Maliens ! Alors qu’IBK a promis (en 2013 et 2018) l’accès à un soin de qualité pour tous. Et jusque-là, aucun acte n’a été posé pour réaliser ces (vaines) promesses. Après un premier quinquennat, IBK n’a pratiquement posé aucun acte fort pour respecter ses engagements. Au contraire…
Paris-Genève-İstanbul…
Aujourd’hui encore, le nombre insuffisant des infrastructures hospitalières fait des quelques structures existantes des véritables mouroirs, car n’offrant plus les services de qualité aux patients qui dans la plupart des cas rendent l’âme dans l’attente des premiers soins. Il faut ajouter à ce facteur le manque de personnel médical pour la prise en charge des patients.
De ces maux, le régime n’a certainement aucune idée.
Au même moment, les gouvernants, qui se plaisent dans un luxe ostentatoire, se font soigner ailleurs. Paris, Bruxelles, Genève, Istanbul, Tunis, Rabat : ce sont là entre autres destinations pour de hauts responsables maliens qui s’y rendent fréquemment pour des soins ou encore de simples contrôles médicaux.
En rendant à l’étranger, c’est faire preuve de mépris pour son peuple. Cela reviendrait à dire que le peuple peut se contenter de ce qu’il a, pour ses soins, l’essentiel étant que les gouvernants puissent s’offrir le luxe d’aller faire leur check-up à l’étranger.
Et dire que ces voyages et toutes les dépenses y afférents sont généralement supportés par les (pauvres) contribuables maliens. Scandaleux !
Face à cette tendance quasi systématique des hautes autorités (président, ministres etc.) à aller se soigner à l’étranger, l’argument selon le Mali manque de médecins spécialistes et compétents, n’est pas défendable! Notre pays a un retard sur la France et certains pays (Maroc, Tunisie) fréquentés par nos dirigeants, tout simplement parce que ces pays ont fait de leur politique de santé, une priorité !
Cette propension des élites et des fortunés à recourir aux soins d’ailleurs pose l’inéluctable débat de la «fréquentabilité» de nos centres de santé et hôpitaux de référence.
Mohamed Sylla