L’institution spécialisée de la CEDEAO, à savoir, l’Organisation ouest africaine de la Santé (OOAS) avec le partenariat financier de la Banque mondiale a lancé le mardi 19 juillet 2016 à Bamako son projet intitulé « paludisme et maladies tropicales négligées ». D’un montant de 121 millions de dollars, soit plus de 60 milliards de nos francs FCFA, ce projet d’une durée de 4 ans vise l’élimination du paludisme et des maladies tropicales négligées au Sahel d’ici à 2030. Présidée par le Premier ministre malien M. Modibo Keita, le lancement de ce projet sous-régional s’est déroulé au Radisson Hôtel Blu en présence de Madame Marie Madeleine Togo, ministre malien en charge de la Santé, de M. Paul Noumba UM, directeur des Opérations de la Banque mondiale pour le Mali et du Dr. Xavier Crespin, directeur de l’OOAS. On notait aussi la présence de plusieurs personnalités du monde de la Santé.
Le projet Paludisme et Maladies Tropicales Négligées (P-MTN) au Sahel est un plan sous régional qui couvre trois pays membres de la CEDEAO à savoir le Burkina Faso, le Mali et le Niger et dont l’objectif est d’accroître l’accès et l’utilisation des services à base communautaire pour la prévention et le traitement du paludisme et de certaines maladies tropicales négligées dans les zones transfrontalières des pays bénéficiaires. Pour les plus hautes autorités du Mali en charge de la Santé, ce projet complète tous les investissements nationaux et régionaux en cours et en voie d’acquisition. D’autres pays du Sahel pourront se joindre à cette initiative régionale.
D’une durée de 4 ans, le projet est doté d’une enveloppe financière de 121 millions de dollars US, soit plus de 60 milliards de FCFA, financée par la Banque mondiale sous forme de prêt remboursable, soit environ 37 millions de dollars pour chaque pays. Il comporte des interventions nationales qui seront mises en œuvre par les pays et une dimension régionale de coordination et de mise en œuvre des activités régionales, sous la responsabilité de l’Organisation Ouest Africaine de la Santé (OOAS). Au Mali, ce sont 19 districts sanitaires frontaliers totalisant 57 aires de santé qui sont concernés. Les Maladies tropicales concernées par ce projet sont : la filariose lymphatique, l’onchocercose ou la cécité des rivières, le trachome, la schistosomiase ou bilharziose urinaire et les géo helminthiases ou vers intestinaux transmis par le sol (ascaris, ankylostomes).
L’idée maîtresse de cette initiative est d’alléger le fardeau énorme du paludisme et des MTN et de contribuer à la réduction de la pauvreté, à l’augmentation de la productivité et à l’amélioration de la qualité de vie des populations touchées.
Les bénéficiaires du projet sont les enfants âgés de 3 à 59 mois et les femmes avec de petits enfants pour les interventions antipaludiques, les membres de la communauté éligibles des zones frontalières endémiques avec au moins deux maladies tropicales négligées. Il y a aussi les enfants d’âge scolaire et les personnes des zones endémiques présentant des complications réversibles des MTN.
Dans sa mise en œuvre, le projet permettra d’améliorer la collaboration régionale pour de meilleurs résultats dans tous les pays. Il soutiendra aussi la mise en œuvre coordonnée des interventions contre le paludisme et les MTN dans les zones frontalières et renforcera la capacité institutionnelle.
Des efforts déployés contre ces maladies
Pour le ministre malien en charge de la Santé, en ce qui concerne la lutte contre les MTN, les pays de la Région africaine ont réalisé des progrès encourageants. A titre d’exemples, la maladie du ver de Guinée est désormais en passe d’être éradiquée, les quatre pays d’Afrique encore concernés, à savoir le Tchad, le Soudan du Sud, l’Ethiopie et le Mali n’ont enregistré que 22 cas en 2015 et, presque tous les pays sont parvenus à éliminer la lèpre. Les succès obtenus dans l’allègement du fardeau de l’onchocercose ont entraîné un changement d’objectif, on est passé de la lutte contre cette maladie à son élimination. Mais, le rythme des progrès actuels reste insuffisant pour permettre aux pays d’atteindre les objectifs d’élimination des MTN d’ici à 2030.
Au Mali, selon nos sources, des acquis importants ont été réalisés en matière de lutte contre ces Maladies. Ainsi, près de 12 millions de personnes ont été traitées en 2015 dans les régions de Sikasso, Kayes, Koulikoro, Ségou, Mopti et le District de Bamako avec un taux de couverture thérapeutique moyenne de 80% et un taux de couverture géographique de 100%. Aussi, ces mêmes sources indiquent que la situation actuelle du trachome, après sept années de lutte intégrée avec l’appui du Centre carter, a montré que sur 57 districts endémiques au départ, 52 ont arrêté le traitement de masse car la prévalence de la maladie est inférieure au seuil d’endémicité fixé à 5%. Pour la Filariose Lymphatique, après l’évaluation de l’impact du traitement de masse, deux districts à savoir Yanfolila et Bougouni ont arrêté le traitement grâce aux résultats encourageants obtenus, car le taux micro filarémie reste inférieur à 1%, seuil recommandé par l’OMS. Des évaluations d’arrêt du traitement de masse sont planifiées dans dix-sept districts sanitaires. Comme pour dire que l’onchocercose est actuellement maitrisée au Mali dans toutes les zones évaluées. Et, les prévalences enregistrées sont inférieures au seuil d’endémicité de 5%, voire nulle dans toutes les zones évaluées.
Quant au paludisme, malgré les progrès réalisés, il reste un problème crucial de santé publique en Afrique et plus particulièrement dans notre sous-région. L’Afrique reste toujours le continent le plus touché et 80% des décès dus au paludisme surviennent dans 15 pays localisés en Afrique subsaharienne. Ainsi, au Mali, il représente 40% des motifs de consultation. En 2015, les établissements de santé du Mali ont enregistré 2 369 245 cas de paludisme dont 797 322 enfants de moins de 5 ans et 117 002 femmes enceintes. 1 978 décès ont été enregistrés.
Des progrès ont été enregistrés grâce à beaucoup d’initiatives qui ont été prises telles que la création de la Direction du programme national de lutte contre le paludisme, la gratuité des CTA chez les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes. Il y a aussi la gratuité du test de diagnostic rapide pour les mêmes groupes cibles, la distribution gratuite des MII en routine et lors des campagnes de couvertures universelles, la pulvérisation intra domiciliaire dans deux districts sanitaires de Ségou, la chimio prévention du paludisme saisonnier (CPS) chez les enfants de 3 à 59 mois de 48 districts sanitaires en 2015, tous les 65 districts sanitaires prévus en 2016. A ces progrès, il faut ajouter entre autres la recherche de candidat vaccinal, la surveillance de la sensibilité et de la résistance des vecteurs du paludisme aux insecticides par le Centre de Recherche et de Formation sur le paludisme (MRTC) de la Faculté de médecine et d’Odontologie du Mali.
A retenir enfin que Madame la ministre en charge de la Santé du Mali s’est, au nom de ses homologues des trois pays concernés par ce projet, engagée pour la réussite de sa mise en œuvre mais aussi a invité tous les autres acteurs à plus d’engagement en vue de l’élimination des MTN d’ici à 2030 pour l’atteinte des Objectifs du Développement Durable (ODD).
Dieudonné Tembely