La SOMIKA ne roule pas sur l’or- pas encore en tout cas. Mais face au désarroi des populations voisines de la Guinée, elle a apporté son soutien à l’effort de guerre pour endiguer le « mal du siècle » dans la région de son site ; et au-delà dans tout le Mali. Une première nationale à imiter par d’autres.
La Somika – Société Minière de Kalana est née en 2003 sur les ruines de la Sogemork. Elle est donc venue au monde avec des handicapes qui perdurent à nos jours –notamment un déficit à combler. Mais, le Directeur pays Abdoulkarim Maïga a expliqué, sous le regard approbateur de son DG Roy MEADE, l’espoir de la boîte de se redresser avec les perspectives de l’exploitation souterraine exclusive à celle à ciel ouvert. En attendant, la société perd de l’argent au lieu d’en gagner. Mais malgré cet handicape, la Sogemork a décidé de répondre favorablement aux sollicitations (par correspondance écrite en septembre dernier) du District Régional de la Santé du cercle de Yanfolila, dirigé par le Dr. Salif Sogodogo. Ce dernier lui demandait son appui pour aider à la prévention d’Ebola dans la zone porte -d’entrée par excellence du mal au Mali.
Et cinq semaines plus tard, la réponse était là devant eux dans la salle des conférences de la Préfecture de Yanfolila: 36 combinaisons de protection, 36 masque de protection, 18 lunettes de protection, 125 gants de protection et 05 thermomètres Laser Infrarouge. Cela revient à dire que les soldats de la Brigade de guerre anti-Ebola du Dr. Sogodogo sont équipés avec du matériel de norme mondiale. Ce sont exactement les mêmes équipements que l’on peut voir sur les écrans des télévisions du grand monde – voir photos. Et ce sont des dons prêts à l’utilisation sur le champ. La preuve, un brigadier en a enfilé un équipement complet avant de revenir dans la salle où se tenait la cérémonie de la remise officielle des dons et prendre les températures du public avec son thermo laser infrarouge- votre serviteur y est passé et a été rassuré.
Et, « nono tè dèguè tchien » (cerise sur le gâteau), le don en nature était accompagné du liquide frais déjà viré au préalable sur un compte local avant l’arrivée des hôtes de Bamako, de Sikasso et de Kalana : 10.000.000 F Cfa. Cette somme était destinée à appuyer les actions de prévention, le paiement des agents sanitaires, la logistique et surtout la mise en place de sites d’isolement des personnes atteintes par Ebola – mieux vaut prévoir que de se contenter de « dieu nous en garde ». Le don est également accompagné de « notre entière disponibilité pour travailler davantage avec nos services techniques dans le cadre de la mise en œuvre des mesures préventives de lutte contre ce fléau » : signé Rikki Smit, Dga de la Somika dans une correspondance adressée au Préfet de Yanfolila Boubacar Touré.
Et la conscience du danger ?
Les dons étaient-ils judicieux et utiles ? Qui d’autre que le chef de la Brigade ? Dans une interview exclusive accordée au Le Matin, nous avons demandé au Dr. Sogodogo de nous faire une comparaison entre le niveau d’équipement de sa Brigade avant et après le don sur une échelle qui va de zéro à 100. Réponse : de 40 à 60. Ça c’est sur le plan quantitatif. Sur le plan qualitatif, il faut savoir que le docteur en charge de la prévention n’étaient pas protégés eux-mêmes et qu’ à titre d’indications, ils travaillaient avec les thermomètres classiques : pas du tout adaptés, peu efficaces et surtout, ils exposent les soldats de lutte contre Ebola. Vu tous ces éléments, le niveau d’alerte devrait être maintenu haut et le travail doit continuer pour accroître le niveau de conscience du danger.
C’est le jeudi 16 octobre qu’à eu lieu la cérémonie officielle de remise des équipements à la préfecture de Yanfolila et tous ceux et toutes celles qui devaient y être à tel ou tel y étaient ou alors y étaient représentés. Les officiels du présidium réunis autour du Préfet Touré ont eu à prendre la parole ainsi que le Directeur pays de la Somika et le docteur Seydou Sogodogo. Plutôt technique et pédagogique, ce dernier a tenté de faire le point de la situation mais aussi de faire un plaidoyer pour la cause. Sous le regard approbateur de son Dg, le Directeur pays de la Somika a estimé que le donateur ne devrait pas être beaucoup diseur. Il a plutôt brossé un tableau de parcours de la Somika, ses perspectives d’avenir et la disponibilité de la boîte à contribuer au bien-être et au développement communautaire dans sa zone hôte.
Tous les intervenants, y compris les interviewés par nos soins, ont montré leur conscience du danger, renforcée par la proximité de la Guinée, signifié leur gratitude face au geste de la Somika et espéré que d’autres l’imiteront. Le confrère Seydou Camara – Radio Wassoulou – que nous avons également interrogé (il est ainsi l’arroseur arrosé du jour) nous a signifié que les populations ordinaires n’étaient pas toutes pénétrées par la conscience du danger que représente Ebola. Pour lui certains ont commencé par dire que c’était un mensonge inventé comme le Sida et qu’il ne fallait pas se laisser gagner par la propagande. Lui aussi est, personnellement soulagé de l’intervention de la Somika.
Par contre, le chef de cabinet du Ministre, lui a signifié que le geste de la Somika était une simple et pure obligation prescrite par le Code minier. Donc, la Somika ne faisait qu’obéir à une prescription contraignante. Il a également tenu à déclarer qu’il refusait de voir des « petits Paris » dans un ilot de misère en pleine campagne. Et pour finir son sermon, il a lancé à l’endroit des responsables de la Somika présents dans la salle et devant témoins : ceci est une première et il ne faut pas que cela soit une dernière. Cette manière de voir les choses n’est pas malienne où l’on a coutume de dire qu’il faut saluer (le geste de) quelqu’un pour lui-même. Ce sont là des ersatz de pépites importées. Mais, tout ce qui brille n’est pas l’or – c’est même parfois du cyanure.
Amadou Tall