Avec l’appui de l’Ong française Médecin Sans Frontières (MSF), le Centre de santé de référence de Koutiala mène une lutte silencieuse mais très efficace contre la malnutrition.
Le 7 mars dernier, une équipe de la caravane médiatique sur la nutrition organisée par l’Unicef et ses partenaires s’est rendue dans la ville de Koutiala. Elle était par Mme Touré, Médiatrice de l’Unicef, avec la complicité de Dr Kéita Marie Diakité et de Mme Oumou Modibo Diabaté, en service à la Direction nationale de la santé. A l’arrivée, l’équipe fut accueillie par le médecin – chef du Centre de santé de Koutiala, Mahamadou Magassa et du chef du service de Développement social et de l’économie solidaire, Ibrahim Frantao. Après les salutations d’usage, Mme Oumou Modibo Diabaté qui jouait à merveille son rôle de modératrice s’est chargée de répartir les caravaniers en différents endroits en fonction du centre d’intérêt de chacun.
Cap sur l’Unité de récupération et d’éducation nutritionnelle intensive ou encore ‘’Ureni du Csréf de Koutiala’’, histoire de faire voir aux visiteurs l’ampleur de ce danger public qui s’appelle la malnutrition. Avec l’appui de l’Ong française, Médecin Sans Frontières (MSF), le Centre de santé de référence de Koutiala mène une lutte permanente et très efficace contre le fléau. Pour Mme Touré Médiatrice de l’Unicef, qui avait fait quelques jours auparavant une excellente communication sur ‘’la nutrition au cœur du développement’’, la malnutrition freine la croissance économique. Elle perpétue, affirme Mme Touré, la pauvreté par 4 facteurs :
Primo : des pertes en vie humaines. Deuxio : des pertes directes de productivité liées au mauvais état physique.
Tertio : des pertes indirectes dues à la mauvaise fonction cognitive et aux déficits de scolarisation des enfants.
Quarto : des pertes résultant de l’augmentation des coûts de soins de santé.
Ampleur du phénomène dans la capitale de l’or blanc !
A Koutiala, l’Ong Médecin Sans Frontières abat un travail gigantesque à travers la construction d’infrastructures sanitaires et la prise en charge des enfants souffrant de la malnutrition. Cela en étroite collaboration avec les responsables du Csréf. Des salles d’accueil et d’hospitalisation sont exclusivement consacrées aux enfants qui ont des problèmes de nutrition. Après leurs dépistages, les malades sont conduits dans l’une des salles en fonction de la gravité de leur état de santé.
Dans la salle des soins intensifs, les lits sont au nombre de 28. Lors de notre passage, ils étaient tous occupés. Ici, l’état de santé des enfants témoigne de l’ampleur du phénomène dans la capitale de l’or blanc. Au fur et à mesure que l’on avance, Dr Moumouni Sanogo s’efforce d’expliquer la situation de quelques uns de ses patients. Comme ce garçon de deux ans qui souffre de kwashiorkor ! On n’a pas besoin d’être un spécialiste pour le savoir. Son état suscite compassion et inquiétude. Des pieds à la tête, tout son corps est couvert d’oedèmes qui ont entraîné des glonféries. Il a été admis le 5 mars dans un état très critique. C’est pourquoi il a été mis sous soins intensifs. A son admission, il pesait 12, 40 kilos pour 82,5 cm, alors que son poids normal est de 9,3 kilos. Sa mère est assise au bout du lit avec un regard qui en dit long sur son état d’âme. Il reniat sa langue dans sa bouche. Il est surpoids. Ce qui s’explique par le fait que les œdèmes ont fait gonfler ses pieds, son organe génital et ses bras. Il doit passer au moins trois semaines pour que ces parties de son corps soient débarrassées de ces enflures. A quelques mètres de là, un autre nourrisson d’à peine 12 mois. Il pèse 5,27 kilos alors que son poids normal est de 6,4. Au moment de son admission à l’Ureni, il pesait 5,6 kg. Il a eu la diarrhée. Et son poids a fait une chute. C’est un cas sévère de marasme, lance Dr Sanogo. ‘’Ce sont des enfants qui sont au-dessous de leur poids normal. En fonction du régime alimentaire, on les fait augmenter de poids.’’, conclut-il.
Un peu plus loin, se trouve une fille allongée sur le dos. Au bout du lit, elle est assise dans un silence olympien. Le ventre de la fille est gros de même que sa tête. Il n’a que 25 mois. Difficilement, elle se lève pour boire de l’eau car chaque 30 mn, le personnel sanitaire vient remettre une eau spéciale qui leur permet de récupérer. Après son admission, elle a attrapé la diarrhée. Juste à côte, il y a cet enfant maigre, voire fragile. Ses pieds sont maigres tout comme ses bras. Sans aucune autre volonté d’exagération, il n’a que la peau sur les os. Il ne pleure pas. Mais tout laisse croire qu’il s’alimente difficilement. Après les soins intensifs, les enfants sont transférées dans une autre salle où on règle les problèmes de santé.
Ce jour-là, il y avait environ 28 enfants. Cet enfant de trois mois souffre du marasme. Elle ne cesse de pleurer.
Son ventre est gros, ses pieds très minces. Assise sur les jambes de sa maman en train de téter, on voit même ses squelettes. Il suit un traitement de stabilisation. La fille de Mme Mallé pleure tout d’un coup. Depuis quelques jours, elle a commencé à vomir. ‘’Ça commence à aller mieux’’, nous confie-t-elle. Au départ, elle ne savait pas de quoi son enfant souffrait.
Des causeries éducatives aux démonstrations culinaires !
Dans la troisième et dernière salle, on sent une certaine ambiance, loin du silence qui régnait dans les deux autres. Ici, les enfants traités prennent de lait avant leur libération vers d’autres structures sanitaires comme les Cscom. On les initie à la vie sociale avec des jeux, des jouets, des ballons, ou encore du balafon. H. D a y passé 12 jours. Il souffrait d’une malnutrition doublée d’une pneumonie sévère. ‘’Aujourd’hui, Dieu merci’’, se contente de dire sa mère, Aissata Diarra, le sourire aux lèvres, visiblement heureuse de voir son enfant retrouver la santé. Le petit trouve du plaisir à jouer au balafon à côte de sa mère.
Tout comme Aissata Diarra, la vieille Fatoumata Dembélé se réjouit de l’état de santé de son petit-fils de 12 mois. En l’absence de sa fille déjà enceinte, Fatoumata Dembélé veille jalousement sur le petit qui souffrait d’un marasme et d’une diarrhée qui a entraîné une déshydratation. Il a subi des soins intensifs pendant 4 à 5 jours. Les mères sont sensibilisées.
Chaque jour à partir de 16 heures, Bassirou Diarra, infirmier et responsable pour la qualité de soins au MSF et ses collègues, organisent des causeries éducatives. Ils développent plusieurs thèmes comme hygiène et malnutrition. Le thème sur la planification est largement développé. L’accent est mis sur la diversification alimentaire tous les mercredis avec une séance de démonstrations culinaires.
A en croire Dr Moumouni Sanogo du Csréf de Koutiala, le marasme est la forme la plus répandue de la malnutrition et est en général la conséquence de maladies comme le paludisme, la diarrhée. ‘’C’est rare que de voir un cas de malnutrition sans ces maladies’’, souligne-t-il. Dernière l’émotion, tous les visiteurs ont été émerveillés par la qualité de la prestation de l’Ong MSF dans la lutte contre la malnutrition. ‘’On ne peut que vous remercier. Vos actions s’inscrivent dans le cadre de mission de la division nutrition.’’, a souligné pour sa part, Dr Kéita Marie Diakité, en service à la division nutrition de la direction nationale de la santé.
Mahamadou Magassa, Médecin-chef du Csréf de Koutiala
‘’ La prise en charge est gratuite pour les enfants de 0 à 5 ans ‘’
Pour briser le cercle vicieux de la malnutrition, Mahamadou Magassa préconise une synergie d’actions des différents acteurs impliqués. Cela doit commencer au niveau communautaire à travers l’intensification des campagnes d’éducation, de sensibilisation et d’information autour de la malnutrition dans nos familles, villages etc. A en croire le médecin du CSRF de Koutiala, la malnutrition est un problème préoccupant dans le cercle. Rien qu’en 2010, il a été enregistré plus de 20 000 cas d’enfants souffrant de malnutrition. Pourtant, la prise en charge est gratuite pour les enfants de 0 à 5 ans. Encore qu’elle intègre le traitement de certaines autres pathologies développées par l’enfant au cours de son passage à l’Unité de récupération d’éducation nutritionnelle (Ureni). Dans le nouveau projet avec MSF, le premier responsable du CSRF de Koutiala compte mettre un accent particulier sur la prévention. Par ailleurs, il déplore la faible capacité d’accueil de l’Ureni. Aujourd’hui, l’Unité peut accueillir environ 200 enfants avec une bonne gestion de l’espace.
Chiaka Doumbia