Les dernières instructions reçues par les équipes médicales au niveau des cordons sanitaires à Kourémalé, village frontalier de la Guinée Conakry, sont claires. Ne plus laisser aucun malade (quelque soit le diagnostic établi), sur le territoire malien. Ainsi, au niveau de ces filtres anti Ebola, la vigilance doit être de mise.
Pour apprécier, les efforts de contrôle des risques de propagation à partir de la frontière avec la Guinée et évaluer la riposte contre Ebola, le Premier ministre, Moussa Mara s’est rendu hier à Kourémalé, une semaine après la visite du chef de l’Etat dans cette localité. Il était accompagné du ministre de la Santé et de l’Hygiène publique Ousmane Koné, du directeur exécutif de l’Onusida, notre compatriote Michel Sidibé et d’une délégation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et d’autres partenaires techniques et financiers.
Transparence oblige, notre pays a enregistré en fin de semaine un nouveau cas de fièvre Ebola confirmé. Il s’agit de la fiancée de l’infirmier de la polyclinique Pasteur, contaminé en soignant un patient guinéen : l’imam de Kourémalé du côté de la Guinée (tous deux décédés). Ce sujet contact de l’infirmier reçoit actuellement les soins au centre de traitement des malades Ebola, au sein du Centre national d’appui à la lutte contre la maladie (CNAM). Il aurait une infime charge virale, selon de sources proches du dossier. Ce qui nourrit l’espoir d’une guérison éventuelle.
Cette nouvelle contamination rappelle l’urgence et la nécessité pour notre pays de maintenir la garde haute et de renforcer les activités de prévention des risques de contamination, mais aussi de prise en charge des cas. Des activités de prévention et de prise en charge des cas, sont déployées pour contenir la menace d’une éventuelle propagation.
Le constat général est que les équipes médicales ont été étoffées et les kits de lavage des mains multipliés. A Lougani, un village situé à une dizaine de kilomètres de Kourémalé, un cordon sanitaire est installé pour renforcer la surveillance épidémiologique, afin que les voyageurs qui échappent aux deux cordons déployés au niveau de la barrière douanière et du poste de contrôle de la police, puissent être identifiés et contrôlés aussi. Les véhicules qui passent à ce niveau sont enregistrés, tout comme le chauffeur et les autres occupants du véhicule. Pour les personnes qui présenteraient une température élevée au niveau de ce cordon, les équipes médicales procèdent à un test de diagnostic rapide (TDR) du paludisme pour circonscrire tous risques de propagation du virus Ebola. L’équipe médicale au niveau de ce cordon sanitaire, est renforcée par la direction régionale de la santé de Koulikoro. Il a été également suggéré à l’équipe médicale au niveau de ce cordon de mentionner systématiquement la date et l’heure du passage du véhicule.
Le cordon sanitaire au niveau de la barrière douanière a été aussi visité par le Premier ministre. Moussa Mara a pu constater de visu que les mêmes dispositions étaient prises pour contenir la maladie. Les voyageurs accueillis au niveau de ce filtre anti Ebola, sont aussi soumis aux recommandations du moment, c’est-à-dire le lavage des mains au savon et le contrôle de température. Ils sont également répertoriés dans un registré.
Sur les appréhensions diffuses liées à la partie guinéenne, le Premier ministre a souhaité avoir le cœur net. Il a franchi la frontière pour s’assurer que nos amis guinéens, poussent dans la même direction que nous. Kourémalé du côté guinéen a été pourvu en dispositifs de lavage des mains par la direction régionale de la santé de Koulikoro. Leur cordon sanitaire oblige aussi le voyageur à se soumettre au contrôle de température.
Dans cette localité, la clinique qui a accueilli préalablement le patient guinéen avant qu’il ne soit admis en hospitalisation à la polyclinique Pasteur, est sortie de la période d’observation. Elle aurait été totalement désinfectée. Ce patient guinéen qui a contaminé l’infirmier et un médecin de Pasteur a perdu, selon les informations du poste de contrôle de Kourémalé, côté guinéen, ses deux épouses et son fils (tous victimes du virus Ebola). De même que deux filles (mariées) dont la dernière dans la nuit du samedi au dimanche. Mais ces deux filles n’ont pas été prélevées pour analyses et le mari de l’une d’entre elles serait farouchement opposé à toute action allant dans ce sens.
UNE PRISE EN CHARGE COLLECTIVE. Le chef du gouvernement a souhaité que disparaissent les frontières dans la prise en charge de la maladie à virus Ebola. Si nous n’avons pas le même niveau de riposte à tous les niveaux de la frontière, cela risque de compliquer la situation. Il a souhaite donc une collaboration entre les deux parties. A ce propos, le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique a expliqué que notre pays a pris en charge la formation des agents de santé de la Guinée.
Le chef du gouvernement a aussi rendu une visite de courtoise aux notabilités de la localité, notamment le chef du village de Kourémalé malien avant de rallier le centre de santé communautaire de la localité. Ici, Moussa Mara a eu un bref échange avec le comité de crise, créé par le village pour mieux sensibiliser les familles sur les conséquences tragiques et la nécessité d’observer des mesures de prévention. La promesse des autorités sanitaires de faire un forage au niveau du Cscom de Kourémalé, connaît un début d’exécution. Des équipes sont à pied d’œuvre pour réaliser l’infrastructure.
Le cordon sanitaire, basé au niveau de la police a été aussi renforcé et reste exigeant sur l’application de la réglementation du moment, notamment la prévention.
Le dernier site vu par le Premier ministre, c’est le centre de transit, construit par l’Alliance médicale contre le paludisme (AMCP). Ce centre doit accueillir 48 heures maximum, les cas suspects à investiguer. Ceux qui se révéleront positifs seront transférés dans un centre de traitement des malades Ebola.
Le département de la Santé et de l’Hygiène publique, aurait souhaité décentraliser la prise en charge des malades. Pour ce faire il entendait mettre en place les capacités requises au niveau du centre de transit pour en faire un centre de traitement. Des partenaires techniques ont rappelé la complexité de créer un centre de traitement contre Ebola. Il nécessite au delà du site et du matériel, la disponibilité des compétences parce qu’il faut des médecins, infirmiers et hygiénistes, formés. Cette formation est requise pour éviter que les équipes ne contaminent pas surtout au moment de se débarrasser des combinaisons.
Le chef du gouvernement a noté une bonne implication du personnel sanitaire, de la population et des forces de sécurité. Notre réponse est en train de se renforcer et la riposte devient plus robuste. Moussa Mara a rappelé aussi la nécessité d’avoir une prise en charge collective avec le même le niveau de riposte pour éviter les complications. Pour lui, Kourémalé doit être considéré comme une zone à risque et doit être pris en charge dans sa globalité, en termes d’enjeux et de difficultés. Le Premier ministre a souligné l’éveil de conscience sur la maladie. « Si on veut arriver à contenir la maladie, il faut regarder les différentes zones frontalières pour mettre le même dispositif de prévention pour que la riposte soit globale et nationale » a indiqué Moussa Mara.
Par ailleurs, Michel Sidibé a témoigné du leadership du président de la République et du Premier ministre. « On a jamais gagné contre une épidémie sans leadership et sans coordination. Il faut établir des mécanismes qui permettent de travailler ensemble pour circonscrire la maladie ». Il a souligné que la communication est une des clés pour combattre le virus Ebola, avant de souligner que notre pays ne pourrait pas seul contenir la maladie et que les partenaires techniques et financiers, nous accompagneront.
B. DOUMBIA