Lèpre : Un grand pas pour la science

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Bien que le Mali ait atteint le seuil d’élimination, la lèpre demeure jusqu’à présent un réel problème de santé. Au Mali, le Centre national d’Appui à la Lutte contre la Maladie (Cnam) et la fondation Raoul Follereau poursuivent ce combat en facilitant la réinsertion professionnelle des malades de la lèpre tout en les aidant à accepter leur maladie.

 

Brusquement visible sous forme de taches claires, la lèpre est une maladie qui fait appel à une contamination par des agents pathogènes due au bacille mycobacterium. Selon sœur Catherine Arama, actuelle directrice du volet léprologie au Centre national d’Appui à la Lutte contre la Maladie (Cnam) cette maladie touche principalement la peau et les nerfs.

Le Cnam accompagne les malades tout au long de leur cursus sanitaire. Le centre les forme aussi sur comment se comporter en société et à accepter leur maladie. Aux dires de sa directrice, « Malgré qu’il y ait une minime chance de guérisons, nous faisons de notre mieux ».

La réinsertion professionnelle des malades de la lèpre est un combat que mène depuis des lustres la fondation Raoul Follereau. En 2009, la fondation prenait en charge près de 1 247 cas. Grace à la fondation, les lépreux sont dans pratiquement tous les domaines. L’Etat, la fondation Raoul Follereau et l’Union malienne Raoul Follereau viennent en aide à ces personnes.

Oumar Traoré est président de l’Union Raoul Follereau. Le groupement compte à ce jour 14 structures gérées par les lépreux. Le président rappelle les principaux objectifs de leur projet. « La lutte contre la lèpre a été le combat du français Raoul Follereau suite à l’étrange façon dont ces malades étaient traités dans la société. La fondation a pour but de faire la promotion de l’Union Raoul Follereau et de créer des fonctions de réinsertion professionnelle pour les malades de la lèpre ».

« Certaines disent que cette maladie n’est pas guérissable », c’est faux, répond le président de l’Union Raoul Follereau. Avant de poursuivre, « il faut reconnaitre que le traitement n’est pas facile et prend énormément de temps chez certains, comme ça peut ne pas le prendre chez d’autres. Alors cette maladie est belle et bien guérissable et est moins contagieuse. Le seul problème est que lorsque la maladie est beaucoup trop avancée, il y a de faible possibilité pour que ça se guérisse », souligne-t-il.

A en croire le président, ce n’est pas comme le Covid-19, ou d’autres maladies très contagieuses. « Peut-être dans une famille sur trois générations, seule une personne peut contracter cette maladie. Nous ne faisons pas de distinction entre les malades. Nos portes sont ouvertes à toutes les personnes malades de la lèpre. La fondation prend en charge le traitement des malades et fait partenariat avec d’autres structures ».

En dehors de ses activités, l’Union Raoul Follereau mène aussi des campagnes de sensibilisation. Ce sont les malades de la lèpre eux mêmes qui vont sur le terrain, selon M. Traoré. « Ils utilisent lors de leur campagne leur propre réinsertion. Une équipe orchestrale dont chaque participant est lépreux est aussi mise à leur disposition lors de leur campagne. La perspective de Raoul sur la lèpre surtout quand il dit que le plus grand malheur d’un homme c’est de n’être utile à personne est vraiment une source de motivation pour notre union. Mais selon les études, les malades de la lèpre ont une longévité remarquable », ajoute-t-il.

Bien que le Mali ait atteint le seuil d’élimination de la lèpre, cette maladie demeure jusqu’à présent un réel problème.

 

 

Issa Katilé :

Lépreux guéri et businessman

 

Malgré leur marginalisation, certains malades de la lèpre ne baissent pas les bras et se battent pour ne pas dépendre des gens. C’est le cas Issa Katilé. Sensibiliser et aider les autres malades est devenu son quotidien.

 

Tous les malades de la lèpre n’abandonnent pas aussi facilement. C’est le cas d’Issa Katilé. M. Katilé a un programme très chargé et essaie de lutter contre cette marginalisation faite à ces semblables. Sa vie quotidienne fait référence au dur labeur. Il a monté son propre projet au niveau de Raoul Follereau.

Issa est le président des éleveurs et son association ne recueille que des lépreux afin qu’ils puissent exercer un métier et éviter la mendicité. En dehors des travaux de l’association, cet homme ne s’assoit pas. En plus de son association, M. Katilé vend des céréales en gros ou et détail. Il a aussi la gestion d’une petite table sur laquelle, il vend des produits qui répondent dans l’immédiat aux besoins des gens qui passent au bord du goudron. Selon lui, cette table est sa mini boutique qui est d’ailleurs sa première source de revenue. Tout est parti de cette histoire de table au début. C’était juste un moyen de ne plus retourner au bercail. « Mais maintenant ce n’est plus le cas », assure-t-il.

Issa Katilé n’a aucun repos. « Je ne peux vraiment pas me permettre de me reposer maintenant car d’énormes vies sont mêlées à la mienne. Raison de plus de redoubler d’efforts pour ne pas les décevoir, non seulement les lépreux, mais aussi l’Union Raoul Follereau qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Je ne me repose que les dimanches mais même avec ça je ne cesse de recevoir des appels tel est mon quotidien », ajoute-il.

Après la création de son association, beaucoup ont pris exemple sur Katilé et y ont adhéré. Actuellement l’union Raoul Follereau compte 13 associations plus celle de M. Katilé.

Sensibiliser, aider, vendre, et travailler est devenu son maillon fort dans la vie quotidienne. A la différence de certains malades de la lèpre qui ne cessent de se lamenter sur leur sort, M. Katilé préfère être indépendant.

Grace à son dévouement, il entretient une très bonne relation avec le président de l’Union malienne Raoul Follereau, Oumar Traoré depuis 21 ans. Qui d’ailleurs le considère comme son associé et fait très souvent recours a lui à cause de son expertise et de sa sociabilité avec ses semblables sur un terrain bien.

 

La lèpre au vu de la religion :

Une malédiction ?

La lèpre est moins contagieuse que le Covid-19. Mais un peu contraignant qui affecte beaucoup les personnes atteintes. Cette maladie est-elle une malédiction ?

La lèpre au regard de la religion ne répond pas aux mêmes aspects. Chrétiens et musulmans ont tous leur opinion là-dessus. Mais une certaine similitude est remarquable au niveau de ces deux religions au fil du temps.

Abbé Gérard Zala ex-curé de Gwalala en dit plus en faisant recourt à ce que la Bible dit « avant, dans l’ancien testament ou l’ancienne alliance, être atteint de la lèpre était non seulement un dégoût mais aussi une malédiction divine suite à un péché de l’individu. C’est en faisant référence à ça que les personnes atteintes étaient exclues de la vie communautaire. Ces malades étaient bannis de leur localité et n’étaient pas autorisées à prendre part à tout ce qui était propre aux personnes non atteintes ».

Pour l’ex-curé de Gwalala, cette conception a été appliquée jusqu’à la venue de Jésus-Christ qui a pu guérir les malades de la lèpre, les sanctifier. « Il a donc demandé à un lépreux d’aller se montrer et dire au grand prêtre qu’il a reçu la purification. Donc il est membre de la communauté juive. Alors ce n’est plus la faute de lépreux et la maladie n’est pas une malédiction divine. Tout homme peut faire l’expérience et l’attitude qu’on nous demande. C’est d’accueillir nos frères et sœurs, dit Jésus ».

« C’est ainsi qu’après Jésus, saint Damien a décidé de prendre le relai et se fixer un objectif clair et précis de prendre uniquement soin des lépreux en les aidant et en leur apportant des soins jusqu’à ce qu’il a lui aussi contracté cette maladie. C’est pour nous demander à être compatissants envers nos frères et sœurs qui vivent une certaine maladie. Ne pas les culpabiliser en plus de leur souffrance physique et morale ».

Une compassion également recommandé en islam. Selon Idrissa Diarra, imam du Centre islamique, « toute personne atteinte d’une quelconque maladie mérite de l’affection, du soutient, de la tendresse et non un mépris. La maladie est une volonté divine donc l’homme doit tout simplement accepter son sort et se remettre à Dieu. S’entraider fait partie de la vie quotidienne d’un homme. Dieu est amour et l’homme ne pourra pas l’égaler mais il peut essayer de marcher dans ces pas. Les malades de la lèpre n’ont pas choisi cette maladie, donc ce n’est pas à nous de les mettre à l’écart ou de sentir du dégout à leur endroit. Ces malades méritent respect et considération ».

 

ISSA KATILE ET MOCTAR MAÏGA

Vaincre la marginalisation

 

Pourtant peu contagieuse, la lèpre est mal perçue dans la société malienne et africaine. Portait croisé sur le parcours d’Issa Katilé, 70 ans et Moctar Maïga, 14 ans. Le premier est victime de la lèpre. Le second est fils ainé d’un malade.

 

Né dans les années 1952, Issa Katilé a eu la chance d’aller à l’école. Très jovial et brillant, Issa était 1er de sa classe jusqu’en 4e année où sa maladie a été détectée. Les études ont basculé pour lui au second cycle. L’adolescent était obligé abandonner en 9e année suite aux mépris de la société face à sa situation sanitaire.

Vivre avec cette maladie n’était pas le seul problème qu’il devait affronter, mais plutôt de tout un village vu qu’il était le seul enfant de son père à souffrir de la lèpre.

Marginalisé longtemps, il se rendit alors dans la ville des trois caïmans suite à des informations sur la fondation Raoul Follereau. Deux mois après son intégration dans la fondation, il fut libéré de ce lourd fardeau qui pesait sur ses épaules. Il était temps pour lui de retourner dans son village natale à N’gorodjan à 65 kilomètres de Kona.

Sachant ce qui l’attendait là-bas, il décida de prendre l’argent de son transport, 6 000 F CFA, pour monter son business de vendeur ambulant. Qui, lui a apporté une somme de 80 000 F CFA sur une période de 4 semaines. Il s’est donc lancé dans la vente cette fois-ci avec une petite table au bord du goudron. C’est ainsi qu’il resta à Bamako auprès de la Fondation Raoul Follereau où il créa sa propre association. Cette structure est à présent une branche de l’Union Raoul Follereau qui compte de nos jours 14 associations. Très jovial, Issa est marié et père d’une fille.

Comme Katilé, l’adolescent a abandonné les blancs pour se consacrer à son père. Le Seul à avoir contracté la lèpre. Elancé, tête complètement rasée, Moctar Maïga, 14 ans, est l’ainé d’une fratrie de 4 enfants dont le père est un malade de la lèpre.

La vie pour lui est un peu difficile car le regard méprisant auquel, il fait face dans son entourage l’affecte beaucoup. «  Je suis incapable de m’amuser et de faire tout ce qu’un garçon normal de mon âge doit faire. Même avoir des amis est très compliqué uniquement parce que je suis fils d’un lépreux », avance-t-il.

Accompagner son père est le quotidien de Moctar. Issu d’une famille où les trois repas de la journée ne sont pas garantis, il va au bord du goudron chaque jour mendier avec son père pour pouvoir atténuer et subvenir aux besoins de la famille.

Cependant, l’adolescent nourrit un rêve ardent : se lancer dans la mécanique. Pour le moment, il en est incapable car le père est dépendant de lui. Marginalisé et indexé dans son entourage, le jeune Moctar est devenu comme son père, un être à part. Mais il s’estime heureux vis-à-vis de sa santé car être fils d’un malade de la lèpre est différente d’être une victime de la lèpre.

 

Réalisé par

Aline Doumbia

(stagiaire)

 

 

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