Le siège du Réseau malien des associations des personnes vivantes avec le VIH ( RMAP+) a servi de cadre, ce mercredi 13 février 2019 , à une conférence de presse organisée par ladite structure autour du VIH/Sida. Cette occasion a été favorable pour présenter les résultats des enquêtes menées entre 2015-2016 sur « l’index de stigmatisation et de la discrimination des PVVIH au Mali ». Cette activité initiée par GNP+ a été effectuée en collaboration avec ONUSIDA, IPPF et ICW.
Daouda Koné, point focal de l’observatoire communautaire pour le traitement du VIH/sida, a présenté le résultat des études réalisées en 2016. Cette étude, à ses dires, était financée par l’ONU sida. Koné exposera les travaux préparatifs ayant conduit à la réalisation de cette enquête. À l’en croire, tout a commencé par un atelier sous-régional à Dakar en juin 2015 pour préparer les pays d’Afrique de l’Ouest à la mise en œuvre de cette étude. La formation devait sortir une feuille de route « permettant à chaque pays d’amorcer le processus selon le niveau auquel il se trouvait », a-t-il précisé.
Selon Daouda Koné, leur enquête a été menée dans toutes les régions du Mali excepté Kidal. Cette enquête financée à hauteur de 38 000 000 FCFA par les SE/HCNLS s’est effectuée auprès des personnes dont les 76,20 % vivaient dans des zones urbaines et le reste des 20,80 % dans les zones rurales. À l’en croire, 686 personnes vivant avec le VIH Sida (PVVIH) ont été approchées. Parmi elles, 257 étaient des hommes et 429 des femmes. Le point focal de l’observatoire communautaire fera savoir que 203 des personnes interrogées se trouvaient dans une situation de sans-emploi. Toujours dans le cadre de la stigmatisation, il précise que 22% des enquêtés « ont eu au moins un membre de leur famille qui n’ait pas eu à manger ne serait-ce qu’un jour dans le mois précédant les enquêtes ».
Outre cela, dans l’exposé de ce résultat d’enquêtes, il ressort que 8,5% des malades enquêtés étaient victimes d’exclusion au niveau familial et social, explique-t-il. La plupart étaient des femmes qui représentent 81,5%, précise-t-il. Les commérages, les insultes, les agressions physiques étaient nombreux, a-t-il expliqué. « L’orientation sexuelle et le travail de sexe constituent également des causes de stigmatisation ou de discrimination chez les deux sexes à la même proportion », note M. Koné pour ensuite préciser que leur étude concerne toutes les couches de la société puisque négliger une couche, c’est pratiquement ne rien faire si nous savons que cette partie négligée pourrait avoir des relations avec toutes les autres parties.
À suivre ses propos, on comprend que 9,1% des personnes interrogées ont perdu un emploi ou une source de revenus, 7,1% ont été refusé pour un emploi, 4,3% ont été refusé d’accès à des services de planification familiale. Tout ça à cause de leur statut sérologique.
En ce qui concerne la stigmatisation interne, elle se révèle grande notamment chez les adultes de 30 à 39 ans où le sentiment de honte représente 37,3%. Dans ce cadre, la perte de l’estime de soi représente 37,3%, le sentiment de culpabilité 21,9%, le sentiment du blâme social de soi 20,8%, le sentiment du blâme d’autrui 14,7%, le sentiment de vouloir être puni 7,7%, le sentiment de suicide 4,8%, la décision de ne plus avoir d’enfants 18,7%, la peur des commérages 47,5%, la peur de jouir pleinement de sa sexualité 23,50% chez les femmes et 20,6% chez les hommes, a-t-il tenu à expliquer.
L’ignorance des textes régissant les droits des PVVIH notamment la déclaration d’engagement des Nations-Unies sur le VIH/Sida a été largement constatée, précise-t-il avant de suggérer : « Pour l’atteinte des 90-90-90, il faudrait lutter au préalable contre la stigmatisation. »
Amadou Sancho, secrétaire administratif de RMAP+, a, quant à lui, formuler quelques recommandations adressées aux autorités afin de les inviter à des actions concrètes pour la réussite de la lutte contre ces différentes violations constatées. Ces recommandations sont entre autres : l’organisation des campagnes de sensibilisation, renforcer les capacités des associations, utiliser les associations pour une large diffusion des règles, renforcer l’implication des familles des séropositifs, renforcer les capacités des pairs éducateurs, rendre accessible et procéder à une large diffusion des résultats des études, amener les services sociaux à tous les niveaux, plaider au niveau du ministère de la santé et du budget public en faveur des personnes vivant avec le VIH, impliquer les communautés dans la lutte contre la stigmatisation, impliquer les PVVIH dans toutes les activités pour leur épanouissement, promouvoir les activités de dépistage pour tous, impliquer la société civile, venir en aide alimentaire aux PVVIH, etc.
Quant à Mariam Touré, présidente de la coalition des associations, ces résultats constituent un outil de plaidoyer devant permettre de lutter contre la stigmatisation et la discrimination des PVVIH.
Fousseni TOGOLA