La chloroquine, appelée aussi nivaquine est aujourd’hui inefficace au Mali. Cette situation a poussé les chercheurs à découvrir les Cta ou Combinaisons thérapeutiques à base d’artémésinine qui luttent plus efficacement contre le paludisme. Dr Georges Dakono, Coordinateur du Programme national de lutte contre le paludisme, nous explique les raisons scientifiques de cette mutation et la nature des médicaments en question. Interview !rn
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Qu’en est-il exactement de l’inefficacité de la chloroquine ?
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En parlant d’inefficacité, je pense qu’on va un peu loin car ce n’est pas une notion d’inefficacité totale. Un produit est bon par rapport à son action sur un germe donné. Présentement, on utilise la chloroquine pour lutter contre le plasmodium qui est le germe du paludisme. Le plasmodium est arrivé à reconnaître la molécule. Donc, la molécule ne peut plus éliminer le plasmodium.
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Il faut cependant signaler qu’il y a d’autres germes qui transmettent le paludisme mais qui sont encore sensibles à la chloroquine. Au Mali, nous avons près de 90% de cas de paludisme dus au plasmodium falcifarum. La nivaquine est inefficace contre le plasmodium falcifarum. Ce qui ne veut pas dire que la molécule n’est pas bonne.
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La chloroquine n’arrive donc plus à soigner le paludisme ?
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Non !
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Y’a-t-il eu sensibilisation au niveau des malades qui continuent à acheter la chloroquine ?
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On a essayé mais c’est difficile parce que la chloroquine est bien ancrée dans les moeurs comme un médicament ‘’traditionnel ‘’ Nous sommes venus au monde en trouvant sur place la chloroquine et dans beaucoup de pays, la chloroquine était utilisée depuis les temps anciens. C’est la première molécule qui s’est avérée efficace pendant longtemps contre le paludisme.
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Cette résistance à la chloroquine est apparue depuis les années 60 dans les pays asiatiques et c’est de manière progressive qu’elle a gagné tous les continents. Avec le professeur Ogobara Doumbo, on s’est rendu compte que c’est dans les années 78 que sont apparus les germes de résistance à la chloroquine au niveau des parasites qui font le paludisme au Mali. C’est d’ailleurs inhérent à la nature parce que tout phénomène agressif vis-à-vis de l’organisme l’oblige à se défendre contre ce phénomène.
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On s’adapte pour des besoins de survie. La chloroquine tue les germes du paludisme mais pas complètement et celles qui ne sont pas éliminées se repositionnent de nouveau en développant une résistance totale à la molécule. Même si tu prends la chloroquine, le germe est devenu assez efficace pour éviter que la chloroquine ne l’extermine.
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Quel est alors le médicament recommandé actuellement pour soigner le paludisme ?
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Avec les phénomènes de résistance à la molécule, les recherches ont progressé pour déployer une nouvelle molécule. On a alors défini les ‘’Combinaisons thérapeutiques à base d’artémésinine -Cta- pour lutter contre le paludisme.
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Pour préciser ces termes scientifiques, il faut savoir que la ‘’combinaison’’ est le mélange de deux médicaments, ‘’thérapeutique’’ se réfère au traitement et le nom ‘’artémésinine’’ est celui de la molécule de base autour de laquelle s’articule toute cette prise en charge.
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L’artémésia est une plante médicale découverte en Chine. Elle a un principe actif qui lutte très bien contre le paludisme et qui s’appelle artémésinine. Au bout de trois heures, elle arrive à décaper l’organisme par rapport au parasite du paludisme en éliminant 95% des germes qui circulent dans le sang. Puisque sa durée d’action est très courte, on lui a adjoint une autre molécule dont la durée d’action est plus longue pour protéger la première. Cette molécule peut durer une semaine à dix jours dans le sang et sert donc à éliminer les germes que la première n’aurait pas totalement détruites. Cette combinaison empêche les germes de développer des résistances et de reconnaître la molécule comme ce fut le cas contre la chloroquine.
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Le médicament est-il commercialisé ?
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Il est commercialisé au Mali depuis longtemps. Ce qui a suscité les craintes, c’est qu’il coûte cher.
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Quand on découvre une molécule, les firmes pharmaceutiques mettent en avant des problèmes de licence. Concernant la nouvelle molécule, le gouvernement a décidé de donner gratuitement le médicament aux enfants de moins de 5 ans. Pour les autres tranches d’âge, les molécules coûtent moins chères et sont accessibles. Les recherches ne sont pas suffisamment avancées pour permettre de savoir si elles n’auront pas d’effet sur la grossesse des femmes. Donc, les femmes enceintes sont traitées à la quinine, en injectables et en comprimés.
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La chloroquine n’est-elle pas retirée du marché ?
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On a arrêté de produire la chloroquine et de la faire commercialiser. Elle est inefficace. Ce n’est pas la peine de laisser circuler un produit qui agit de manière inefficace.
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Il est de notre devoir de l’expliquer et de prendre les dispositions nécessaires.
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Propos recueillis par Baba Dembélé
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