Réunis dans la Venise malienne, les représentants des régions de Mopti, Tombouctou, Gao et de Kidal viennent de boucler deux jours de réflexion sur la valorisation du rôle des autorités traditionnelles dans le renforcement de la démocratie et de la décentralisation. Pour impulser une nouvelle dynamique à la l’initiative, les participants ont adopté une batterie de recommandations.
Autrefois piliers de la société, garante de la stabilité, de la justice et de la sécurité de la communauté, l’autorité traditionnelle au Mali (comme dans beaucoup d’autres pays africains) a été dépossédée de ses pouvoirs face aux enjeux d’une société en pleine mutation. Comment redonner à ces « anciens » toute leur place, et renforcer leur rôle dans le processus de démocratisation et de décentralisation dans notre pays ? La problématique était au centre d’un forum tenu les 7 et 8 février derniers à Mopti.
Initiative de l’Association « Cri-2002 » en partenariat avec le ministère délégué chargé de la décentralisation, et celui des relations avec les institutions et de la Coopération Suisse, la rencontre a regroupé les participants venus des régions de Mopti, de Tombouctou, de Gao et de Kidal. Pour les organisateurs, elle vise l’information, la sensibilisation, la formation des acteurs sur le chemin de la participation, de l’implication, de la responsabilisation et de l’autonomisation des autorités traditionnelles dans le cadre de la démocratie et de la décentralisation.
Dépossédées de leurs pouvoirs
De façon générale l’autorité traditionnelle peut se définir comme une personne, ou un groupe de personnes de notoriété respectable reconnue par la communauté, et à qui on confie des pouvoirs de gestion, de surveillance de la stabilité…On comprend qu’en Afrique cette couche, qui incarne des valeurs de tradition, avait une place de choix dans la société. Les chefs traditionnels étaient garants de la sécurité (territoriale et alimentaire) de la communauté, ils avaient le monopole d’un certain pouvoir, ils contrôlaient le culte de la pluie, etc. Bref, ils organisaient le pouvoir ».
Dans le contexte démocratique actuel, l’autorité traditionnelle est peu prise en compte dans la dimension des prises de décisions participatives. Aujourd’hui, les observateurs sont formels qu’elle a été dépossédée de son pouvoir.
La rencontre de Mopti a été donc l’occasion d’adopter une nouvelle feuille de route dans le but de valoriser son rôle dans le renforcement de la démocratie et de la décentralisation. Mopti a été aussi le cadre de lancement des premières balises en vue de l’opérationnalisation des résultats et recommandations du « Forum National sur la décentralisation : Bilan et perspectives », tenu en juin dernier.
Les échanges ont en effet abouti sur la conceptualisation, l’élaboration et l’opérationnalisation de passerelles pour réussir une synergie d’action multiacteurs, multidimensionnelle en vue de la valorisation du rôle et de la place des autorités traditionnelles. Cela, non seulement dans leurs relations avec l’administration d’Etat, les organes des collectivités territoriales et les citoyens, mais également dans leur participation, implication et responsabilisation dans la mobilisation des ressources internes, notamment les taxes de développement régional et local (TDRL) et autres taxes et impôts régionaux et locaux.
Au terme de leurs réflexions, les participants ont adopté une batterie de recommandations, dont l’application correcte des textes de la décentralisation, l’opérationnalisation des textes portant sur les motivations et indemnités des chefs de villages, fractions et quartiers, la professionnalisation de la fonction de chef de village, fraction et quartier, l’implication des autorités traditionnelles dans l’identification des citoyens afin de permettre de s’acquitter de leur devoir de citoyens dans leur communauté. A Mopti, il a été question aussi de la mise à jour du répertoire des chefs de villages, fractions et de quartiers, la tenue d’un registré du aux autorités traditionnelles, etc.
Issa Fakaba SISSOKO