Les rares messages et annonces sur le Covid-19 intéressent de moins en moins le public malien et disparaissent à mesure que s’estompent les craintes d’une hécatombe due à cette pandémie. Révolue ainsi l’époque où les gels hydro-alcoolisés et les masques de protections envahissaient le marché et s’arrachaient à prix d’or. Des stocks importants de ces marchandises naguère prisées et disputées, y compris par les moins nantis, sont voués à la mévente même en étant ravalés à leurs plus petites valeurs monétaires par des vendeurs ambulants. Quant aux dispositifs de lavage de mains acquis à coups de millions, ils sont actuellement abandonnés réduits à l’état d’épaves dans les édifices publics où peu de gens s’embarrassent désormais de lourdeurs précautionneuses devenues inutiles aux yeux de tous. Partout ou presque, en effet, l’accueil des usagers de l’administration publique est de moins en moins filtré et les formalités instaurées dans l’air du Covid ne sont désormais observées qu’avec une rigueur assez légère pour mettre en évidence la lassitude de vigiles en nette baisse d’ardeur à la tâche. Même la température des passants est souvent prélevée avec moins d’attention sur le résultat que pour les appels téléphoniques que privilégient les agents releveurs.
Les grands centres hospitaliers et autres cliniques privées ne sont plus une référence de précaution et d’observance de mesures préventives contre la propagation du Covid-19; l’indifference s’y manifeste avec autant de désinvolture que partout ailleurs, à en juger par les rassemblements et mouvements humains incontrôlés.
Un autre indice de cette insouciance collective réside dans le retour en force des manifestations et rassemblements publics tolérées sans conditions depuis que les protestations populaires ont eu raison du couvre-feu et de son régime de confinement nocturne.
Par-delà les événements sportifs et de jouissance, c’est aussi le cas, entre autres, de la fête de Maouloud que ses inconditionnels adeptes ont préparée et célébrée sans la moindre retenue ou considération du contexte de crise pandémique. À Tombouctou, une ville singulièrement éprouvée par le phénomène, les habitants n’en avaient cure et les ressortissants à travers le pays, au mépris de toutes menace et mesures de précaution, n’ont guère dérogé à la tradition de se joindre massivement à la population résidente pour grever la densité urbaine. Pour le plus grand bonheur notamment des agences de voyage et de transports nouvelle agence de voyage. Idem pour le traditionnel rassemblement autour du leader des «Ançars» dans la capitale malienne. Le rendez-vous annuel d’Ousmane Cherif Madani Haïdara n’a pas dérogé non plus à la tradition ni renoncé à l’opportunité de faire fortune sur le rassemblement massif de ses adeptes au Stade du 26 Mars.
Certes l’événement intervient dans un contexte de bilan moins alarmant du nombre de morts attribuables au Covid-19, mais d’une hausse pour le moins relative du nombre des contaminations probablement imputables au déclenchement d’une redoutable seconde vague en Europe ainsi que dans le reste du monde. Aucune assurance, par conséquent, qu’une propagation de portée similaire ne pointe à l’horizon et n’engendrerait des dégâts plus sérieux pour un virus dont les possibles mutilations échappent pour l’heure à toute maîtrise scientifique. Qui plus est, les autorités actuelles n’affichent aucun signe de préoccupation face à la situation et donnent l’air de s’illustrer avec beaucoup moins de volonté d’en juguler les effets. A leur indifférence apparente vis-à-vis des mesures de distanciation s’ajoute une gestion très approximative de la prise en charge des malades ou encore de l’isolement des personnes contacts. Au demeurant, tous les efforts et stratégie nationale anti-Covid semble orientés vers un filon : la manne que génère les tests massifs de voyageurs à destination de l’extérieur, soit 30 000 francs par individu. Quid alors de la fortune budgétisée par le pouvoir déchu en vue de doter les autorités sanitaires de l’impressionnant équipement préventif et curatif que sont entre autres les masques pour l’ensemble des citoyens et les respirateurs pour malades en détresse ?
A KEÏTA