À ce jour, le Mali n’a enregistré aucun cas de coronavirus. Qu’à cela ne tienne, les autorités ont pris des mesures de prévention contre la pandémie. En effet, à l’issue de la réunion extraordinaire du Conseil supérieur de la défense nationale présidée par le chef de l’État la semaine dernière, il a notamment été décidé d’interdire jusqu’à nouvel ordre des regroupements à caractère social, sportif, culturel et politique de plus de 50 personnes, sous réserve du respect des mesures-barrières.
Face à la nouvelle donne qui intervient en pleine campagne électorale pour le 1er tour des élections législatives, nous avons recueilli
Les réactions de certains acteurs politiques
Pr Tiémoko Sangaré, président de l’Adéma-PASJ : « nous avons décidé de revoir les modes d’actions »
C’est pourquoi, comme la campagne électorale continue, il est important que les acteurs adaptent leurs méthodes de travail au nouveau contexte. Au niveau de l’Adéma-PASJ, nous avons décidé de revoir les modes d’actions dans le cadre de la campagne, et faire le travail de manière à respecter les restrictions qui s’imposent, en relation avec la menace de la pandémie.
Pendant la campagne, il y a beaucoup de modes d’actions parmi lesquels des grands meetings qui constituent quelque part des démonstrations de force qui n’ont pas beaucoup de valeur ajoutée en termes de mobilisation de l’électorat en tant que tel. Mais, les grands meetings font partie des actions qui donnent de la visibilité aux partis, à la campagne et aux candidats.
Si les restrictions qui s’imposent au regard du contexte particulier, font que de pareilles activités ne peuvent plus être menées, il est du devoir de chaque acteur de s’adapter à cela. C’est pourquoi, à notre niveau, nous allons désormais privilégier, dans la mesure du possible, les démarches personnalisées, ce qu’on appelle le porte-à-porte, les regroupements en petit nombre, donc la multiplication des points de rencontres avec les électeurs et les militants. En tout cas, nous sommes déterminés à faire en sorte que les dispositions prises par le gouvernement soient strictement respectées par nos militants et sympathisants dans le cadre des activités de la campagne électorale.
J’appelle d’ailleurs tous les acteurs à faire en sorte que les mesures prises par le gouvernement soient confortées par le comportement des uns et des autres, parce qu’il y va non seulement de la sécurité des acteurs eux-mêmes, mais surtout de l’ensemble du pays.
Aujourd’hui, cette pandémie est devenue une question de sécurité nationale, c’est d’ailleurs pour cette raison que le président de la République a convoqué une session spéciale du Conseil national de défense. Alors, tous les citoyens doivent se considérer désormais comme mobilisés sur le front de la défense du pays par rapport à cette pandémie.
Moussa Mara, président du parti Yéléma : « Nous avons reconfiguré notre campagne électorale »
Aussi contraignantes que ces mesures puissent être, il n’en reste pas moins que nous avons toujours des opportunités de toucher le maximum d’électeurs et leur porter nos messages. Nous avons ainsi reconfiguré notre campagne électorale en réduisant la taille de nos activités et en annulant tous les meetings. En lieu et place, nous accentuons les activités de proximité dans les grins de jeunes, les marchés, les gares routières, les maisons, les ateliers… en veillant à ce qu’il n’y ait pas de rassemblement important.
Nous avons aussi renforcé les actions de communication à travers les médias pour porter nos messages au plus grand nombre. Grâce à l’effet combiné de ces initiatives et au fait que nos liens avec nos électeurs sont demeurés forts, l’impact des mesures gouvernementales ne devrait pas peser trop lourd pendant le scrutin le 29 mars prochain.
Néanmoins, compte tenu de l’évolution des événements, nous restons prêts à nous ajuster encore s’il le faut face à un éventuel alourdissement des mesures du gouvernement face à la menace.
Amadou Aya, secrétaire général adjoint de la CODEM : « Nous allons faire la campagne de porte-à-porte»
Ce sont des mesures préventives. à cet effet, nous avons instruit tous les candidats d’éviter les regroupements et de faire la campagne de porte-à-porte. En plus de cela, nous avons demandé à tous les candidats de profiter de cet instant pour également sensibiliser les populations sur les mesures d’hygiène. Toutes choses qui peuvent être, à notre avis, un facteur de plus pour éviter la propagation de ce virus qui n’est pas encore rentré chez nous.
Il y avait des programmes de campagne déjà établis avec, dans certaines localités des caravanes, des meetings de clôture qui font des rassemblements de masses. Donc, depuis les décisions prises par les autorités, nous avons annulé ces meetings et caravanes. Nous devrons nous adapter à la situation du moment, étant donné que ces élections, qui sont une demande du Dialogue national inclusif, se passent dans une situation particulière.
Malgré la situation sécuritaire, le gouvernement a décidé d’aller à cette élection afin de légitimer notre Assemblée nationale.
Ibrahima N’Diaye, 2è vice-président de l’URD : «Il faut des mesures plus détaillées pour bien gérer le jour du scrutin »
Cependant, même s’il arrivait qu’on ait des cas, il faudrait que les mesures que nous avons prises, plus d’autres à venir, nous permettent de résister suffisamment, pour que ce pays qui est très ébranlé ne puisse pas encore connaître une situation pire que ce qui est la nôtre. La question de la maladie liée au coronavirus nous a fait oublier quelque chose. Avant cette pandémie, chacun trouvait que la sécurité elle seule était une menace pour la tenue de ces élections. Il ne faudrait pas qu’on l’oublie, cette insécurité est toujours là.
Ce qui s’est passé jeudi dernier à Tarkint, dans la Région de Gao, vient nous le rappeler malheureusement. Donc, il ne faudrait pas oublier que l’insécurité est là et qu’elle demeure une menace extrêmement importante. À cela, je dois ajouter qu’il faudrait saluer le courage, la bravoure de tous les candidats qui sont en campagne. J’ai mon président, Soumaïla Cissé qui est en campagne à Niafunké, l’une des zones les plus touchées par l’insécurité. Je pense à lui et à tous nos candidats.
J’espère que d’ici quelques jours, nous allons pouvoir tenir ces élections dans les meilleures conditions. À mon avis, nous pouvons encore tenir, mais restons vigilants. La double menace sécuritaire et sanitaire, doit nous permettre d’être assez prompts à réagir à toute situation inattendue.
Je conclus en disant que la garde ne doit pas baisser pour ce qui concerne la maladie du coronavirus et l’insécurité qui est là. Je voudrais que l’on porte l’attention surtout au jour du scrutin. Des mesures plus précises, plus détaillées doivent venir des structures concernées pour bien gérer le jour du scrutin. Ce, détail par détail, que ça soit les centres de vote et alentours, les agents électoraux, le matériel électoral, même les rangs qui vont se faire devant les bureaux, les distances qui doivent être respectées.
De même, le dépouillement qui est public, le traitement des résultats sont des occasions de regroupement. Donc, il y a beaucoup de détails sur lesquels nous devons revenir pour que nous soyons à l’abri de tous les risques.
Propos recueillis par
Massa SIDIBÉ
Aboubacar TRAORÉ