Bien que le pays compte plus d’une centaine de cas positifs de la maladie à Coronavirus (Covid-19), le ministère de la Santé et des Affaires sociales peine à prendre la mesure du danger.
Le constat est alarmant ! Le ministère de la Santé et des Affaires sociales offre un triste spectacle. La longue période, pendant laquelle le Mali avait été épargné par le Covid-19, n’aura rien servi aux autorités sanitaires du pays. Puisque trois semaines après l’apparition de la maladie et plus centaine de cas positifs, le ministre de la Santé et des Affaires sociales, Michel Hamala Sidibé, n’arrive pas à rassurer les Maliens.
Son plan de riposte de la maladie est remis en cause par le personnel sanitaire, qui estime qu’il n’est pas robuste. Nos interlocuteurs fustigent la gestion de la crise faite par le ministre Sidibé, qui croule sur le poids des dossiers. Indécis, le ministre Sidibé est, selon eux, sous l’influence de deux de ses prédécesseurs (un homme et une femme), auxquels il se réfère pour prendre des décisions.
Les cadres (administratifs et financiers) du ministère, disent-ils, sont mis ou jetés aux oubliettes. Courroucés, ils affirment ne pas toujours comprendre la mise sous l’éteignoir de l’équipe de riposte de la maladie à virus Ebola, qui avait fait à l’époque un résultat. Sceptiques, ils estiment que le pays est très mal outillé dans la lutte contre cette pandémie.
Pourtant, la situation est très grave comme l’a rappelé à juste titre Pr. Akory Ag Iknane, directeur général de l’Institut national de la santé publique, coordinateur de la cellule de crise Covid-19, lors de sa conférence de presse hebdomadaire, le samedi 11 avril. Elle (la situation) appelle à l’union sacrée de tous et exige des mesures fortes et non pas des atermoiements comme semble le faire le chef du département de la santé.
Ces inquiétudes sont partagées par Dr. Boubacar Niaré, secrétaire général par intérim du syndicat des médecins du Mali (SyMeMa), qui déplore le manque d’implication des syndicats dans la gestion de la crise.
Insuffisance criarde de moyens
Près d’une année après sa prise de fonction, l’ancien patron de l’ONUSIDA, selon Dr. Niaré, n’a jamais rencontré le syndicat. « Nous avons été appelés une fois à travers un appel téléphonique pour nous dire que le ministre souhaite rencontrer le syndicat. Nous avons malgré tout décidé de partir au cabinet. À notre grande surprise, on nous annonce que le ministre Sidibé est absent. Nous avons été reçus par son chef de cabinet », regrette le syndicaliste qui promet d’introduire une demande d’audience dans les prochains jours.
Aussi, le secrétaire général par intérim du SyMeMa dit ne pas être satisfait des mesures prises par les autorités sanitaires dans le cadre de la lutte contre la maladie. Il a en effet déploré le manque de disponibilité des moyens de protection au niveau des centres de santé.
Dr. Niaré a souligné que le ministère n’a remis que « 600 bavettes » à la direction régionale de la santé du district de Bamako, soit 100 masques par centre de santé de référence (CSREF). Ce qui, a-t-il dit, reste très insuffisant et contraste avec l’annonce faite par le département de la santé à grand renfort de publicité.
Il déplore aussi l’insuffisance de gants pour la consultation. « Avec la pandémie, il faut une paire de gants à chaque consultation au risque de contaminer d’autres malades », rapporte un médecin d’un des CEREF de Bamako, qui a indiqué que tout le personnel de santé doit avoir l’équipement nécessaire pour faire son travail. « Les symptômes du Covid-19 sont très souvent décelés à la suite de consultations ordinaires », a-t-il précisé.
Un manque de moyens que fustige Djimé Kanté, syndicaliste à l’hôpital Gabriel, qui se demande sur sa page Facebook jusqu’à quand les médecins maliens et autre personnel sanitaire vont continuer à payer de leur poche des masques, gels et autres.
Cette situation est à l’origine de l’abandon des structures sanitaires par la population et du personnel de santé qui craignent tous d’être contaminés, a révélé le secrétaire général par intérim du SyMeMa.
Ce qui a comme conséquence, le diagnostic tardif de la maladie. Ce qui pourrait par ailleurs entraîner une propagation rapide de la maladie. Ce n’est pas pour rien que le pays enregistre un taux anormalement élevé de cas post mortem. Ce qui est très inquiétant.
Abdrahamane SISSOKO