Caravane médiatique sur la malnutrition :L’œil d’une spécialiste

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Les différentes formes de malnutrition,  selon Dr Kéita Marie Diakité
rnLes exposés de qualité des spécialistes de la nutrition de la direction nationale de la santé ont permis aux caravaniers de mieux cerner le phénomène de la malnutrition dans toute sa dimension.

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rnDr Kéïta Marie Diakité de la Direction nationale de la santé (Division nutrition) a brillamment exposé le thème sur les différentes formes de malnutrition. Selon elle, ‘’la malnutrition est un déséquilibre entre les apports en éléments nutritifs et les besoins de l’organisme.’’ Si les apports en nutriments sont inférieurs aux besoins, l’organisme commence à dépérir avec une disparition de la graisse avant les muscles.
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rnLa spécialiste estime que les enfants sont plus vulnérables que les adultes. Dans le cadre de la malnutrition chronique, l’enfant est petit pour son âge. On parle alors de retard de croissance. Elle se développe lentement en lien avec la pauvreté structurelle. Il s’agit d’une ration alimentaire inadéquate et une situation sanitaire précaire.
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rnLa malnutrition aigue peut être modérée ou sévère. La forme dite modérée se caractérise par une perte de poids. Parmi la malnutrition aigue sévère (les enfants subissent une perte de poids majeure avec de très hauts risques de mortalité), il y a le marasme et le kwashiorkor. Selon Dr Kéita Marie, le marasme entraîne un grave dépérissement, une maigreur extrême chez l’enfant. Ici, les enfants ont l’air ‘’vieilli et flétri’’ avec souvent des côtes et des articulations proéminentes. Dans ce cas, avertit elle, l’enfant ne dispose plus d’aucune réserve pour lutter contre les infections, notamment la pneumonie, la diarrhée, la rougeole.
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rnQuant au kwashiorkor, il survient lorsque les enfants cessent de recevoir le lait maternel en passant à une alimentation trop pauvre en protéines et autres nutriments. Les enfants ont eu un abdomen gonflé et des oedèmes -poches d’eau au niveau des pieds, des jambes et du visage. Ce type de malnutrition diminue la résistance aux infections. Il peut être une cause directe de décès. De l’avis de Dr Marie Diakité, le phénomène a de nombreuses conséquences. En plus de la mortalité, morbidité et handicap, il réduit les capacités physiques, intellectuelles et d’apprentissage de l’enfant. Il entraîne des retards de croissance et de développement en causant des maladies chroniques cardio-vasculaires ou métaboliques. Dr Kéïta Marie Diakité a la ferme conviction que la malnutrition est un obstacle au développement car elle réduit les capacités de développement des pays.
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rnL’indispensable investissement dans la nutrition ! 
rnDu 3 au 8 mars, la ‘’Caravane médiatique sur la malnutrition’’ était dans la région de Sikasso. Organisée par le ministère de la Communication et des nouvelles technologies et celui de la Santé, avec l’appui technique et financier de l’Union européenne et l’Unicef, cette caravane s’inscrit dans le cadre d’une recherche de solution à la situation préoccupante du phénomène de la malnutrition.Il s’agit d’amener les décideurs, les leaders communautaires, les hommes de médias à mieux s’impliquer dans la lutte contre ce fléau afin d’inverser la tendance. Le maintien de l’intérêt sur l’importance de la nutrition dans le développement au Mali pour une meilleure prise en compte de ce volet dans le cadre stratégique de croissance et de lutte contre la pauvreté. Un investissement dans la nutrition est indispensable. L’atteinte des objectifs pour le développement du millénaire n’est pas possible sans une amélioration de l’état nutritionnel des femmes et des enfants.
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rnUreni du Csréf de Sikasso à l’avant-garde du combat : comme si l’on suait sous la pluie !
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rnL’Unité de récupération et d’éducation nutritionnelle intensive (Ureni) du Centre de santé de référence de Sikasso est à l’avant –garde du combat contre la malnutrition. Face à l’ampleur du phénomène, le chemin est encore long et parsemé d’embûches.
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rnSelon l’Enquête démographique et de la santé (EDMS IV 2006), au Mali, 38% des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique, alors que le seuil d’alarme au niveau international est de 20%. Avec 15,2% d’enfants souffrant de malnutrition aiguë, notre pays est largement au – dessus du niveau jugé inacceptable. 27% d’enfants souffrent d’insuffisance pondérale. A Sikasso, la prévalence du retard de croissance est très élevée avec 45%. La région de Sikasso a le taux de malnutrition aigue le plus élevé avec 15,8%. C’est très alarmant. Ce qui nécessite des mesures urgentes.
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rnAu Centre de santé de référence de Sikasso (Csréf), l’Unité de récupération et d’éducation nutritionnelle intensives (Ureni) est  l’une des unités spécialisées dans la prise en charge des enfants souffrant d’une malnutrition aigue sévère avec un appétit médiocre et présentant des complications. Logée dans l’enceinte du Csréf, l’Ureni travaille avec une équipe réduite mais dynamique (un médecin, quatre infirmiers, deux techniciens supérieurs en santé publique), placée sous l’autorité de Dr Traoré Hawa. Le 6 mars dernier, une équipe de la caravane médiatique a visité les locaux de l’Ureni. Une visite guidée conduite par la maîtresse des lieux qui nous a permis de comprendre son système de fonctionnement. 
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rn‘’La prise en charge est gratuite’’

rnIl y a une salle d’enregistrement où les infirmiers accueillent les enfants. La salle de dépistage, tout le matériel (balance et autres) est là pour faire le travail. Cette salle sert également de lieu de préparation de lait thérapeutique pour les enfants. C’est ici que travaille Sali Bah, une matronne chevronnée avec ses 22 ans d’expériences. Elle sert également de relais communautaire pour convaincre les femmes à faire le dépistage de leurs progénitures. Elle a ainsi réussi à nouer une grande complicité avec les mères de famille. Car elle trouve toujours les mots justes et aimables pour sensibiliser les mères de famille dans son aire de santé sur les bonnes pratiques préventives de la malnutrition.
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rnUn couloir (on salue les accompagnateurs des malades) conduit à un autre bâtiment qui abrite la salle d’hospi
talisation pour les enfants. Des lits sont bien installés avec leurs moustiquaires. Au moment de notre passage, environ 10 enfants étaient hospitalisés. Selon Dr Hawa Traoré, l’Ureni reçoit en moyenne 15 enfants par mois. Si le dépistage se fait correctement, le nombre peut atteindre 20 enfants par mois. Les cas de décès, dit-elle, sont rares en 2010, il a été enregistré trois cas seulement. La prise en charge est gratuite. Les enfants hospitalisés reçoivent à chaque 30 minute une dose de lait thérapeutique F100 et F75, offert par les partenaires comme l’Unicef. Les cas de complications sont immédiatement transférés à l’hôpital régional. S.C est un enfant abandonné. Admis pour faire le dépistage, il s’est avéré qu’il souffre d’une malnutrition. Assis sur les jambes de sa mère adoptive, les pieds croisés, il a de la peine à regarder les gens. Sa maigreur est extrême. Le diagnostic de Dr Traoré est sans commentaire. S.C souffre du marasme. Mais son cas n’est pas trop inquiétant, rassure-t-elle.  Un peu plus loin de la salle, il y a A.S allongé sur son lit d’hôpital avec sa mère à côté. La déception se lisait sur le visage de cette jeune dame, qui venait d’être admise dans la matinée du 6 mars. Âgée de 3 ans, elle souffre de Kwashiorkor. On le constate à première vue sans être un spécialiste. Du pied à la tête, on remarque des plaies sur son corps. ‘’C’est un cas compliqué’’, se contente de dire Dr Hawa Traoré. Des dispositions avaient été prises pour assurer sa prise en charge.   
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rnVeuve, Bintou Berthé a son enfant sur ses pieds les seins dans la bouche. 
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rnÂgé de plus d’un an, le petit garçon présente des plaies sur tout son corps (de la tête au pied). Dans un premier temps, elle avait refusé l’hospitalisation pour des raisons familiales. ‘’Je devais m’occuper de mes autres enfants qui doivent aller à l’école.’’, affirme-t-elle en baissant la voix.
rnAprès son départ, l’état de santé de l’enfant s’est nettement dégradé. Ce qui l’a poussé à retourner au centre de santé. Elle était là-bas depuis plus d’une semaine. ‘’A notre arrivée, l’enfant ne pouvait rien faire. Aujourd’hui, il va mieux’’, a-t-elle souligné tout en lançant un appel pressant aux mamans, dont les enfants souffrent de la même maladie, à se rendre immédiatement dans un centre de santé. Korotoumou Traoré est mère d’une fille d’un an et 5 mois. Elle est là depuis une semaine. Sa fille présente des oedèmes aux pieds. L’enfant a le regard pensif avec des jambes gonflées. Malgré tout, sa mère se réjouit de l’état de santé de sa progéniture qui ne cesse de s’améliorer. ‘’Je ne peux que remercier Dieu’’, confie-t-elle avec une certaine assurance. I.S est un cas particulier. A 7 ans, il ne pèse que 10 kilogrammes. Maigre, son corps a du mal à supporter sa tête. Selon Dr Traoré Hawa, il ne s’alimentait pas du tout. Il oppose une certaine résistance à la prise du lait thérapeutique. Au moment de notre passage, il ne cessait de pleurer en refusant de boire le lait qui devrait lui permettre de vaincre la maladie. Un moment, son père avait suggéré même de rentrer avec lui avant de se laisser convaincre par les agents sanitaires de la nécessité de son hospitalisation. ‘’Mon père, essayons de nous comprendre. Il faut accepter que l’enfant reste un peu. Ensemble, nous allons conjuguer nos efforts pour améliorer son état’’ disait Sali Bah au père de cet enfant qui a fini par renoncer à sa décision.
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rnSensibilisation, information et éducation comme rempart !
rn Face au lit d’I S, il y a Waraba Bamba avec ses jumeaux. C’est son mari qui avait refusé l’hospitalisation des enfants dans un premier temps. Mais, aujourd’hui, il est le premier à réjouir de l’amélioration de leur état, car ils commencent à se promener entre les différentes salles.

Dr Hawa Traoré nous a signalé le cas de la jeune qui a refusé d’hospitaliser son enfant souffrant de la malnutrition sous le prétexte qu’elle n’a personne pour s’occuper de l’entretien de son jardin de pomme de terre. En marge des actions curatives, les responsables de l’Ureni mènent une large campagne de sensibilisation, d’information et d’éducation à l’endroit des mères de familles. ‘’Il faut que la communauté s’engage à nous aider car la malnutrition n’est pas perçue comme une maladie.’’, explique Dr Hawa Traoré qui a la ferme conviction qu’il y a une méconnaissance de la valeur réelle des produits locaux.

‘’La majorité des enfants hospitalisés sont des producteurs de pomme de terre. Beaucoup préfèrent venir vendre leurs pommes de terre,  œufs, avocats à un prix dérisoire que de donner à l’enfant.’’ Ses collègues et elle déploient de gros efforts pour les convaincre d’accorder une plus grande place à l’alimentation dans la consommation des produits locaux. Elles sont appelées à observer des règles d’hygiène, surtout des bonnes pratiques alimentaires. Dr Hawa Traoré comme Sali Bah se réjouissent des retombées des actions de sensibilisation qui commencent à porter fruit. A Mancourani, ce sont les populations qui réclament aujourd’hui le dépistage systématique de leurs enfants avant toute vaccination.
rnDossier réalisé par Chiaka DOUMBIA
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