Absentéisme des médecins : L’Hôpital Gabriel Touré, l’internat de la mort

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C’est sans appel : les services du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) Gabriel Touré se trouvent dans un état agonisant par la faute de ses médecins qui travaillent ailleurs dans des cliniques privées. Conséquences : à l’hosto, les malades  y rentrent vivant et en sortent  les pieds devant.

Autrefois réputé pour la qualité de ses soins de santé,  le CHU-Gabriel Touré n’est aujourd’hui que l’ombre de lui-même. À dire vrai, l’hosto ressemble à une « boucherie » en service hospitalier.

Avec un plateau technique de renommé internationale, à l’époque, et qui par ses prouesses réduisait le nombre élevé de décès des malades au Mali, le hic est qu’aujourd’hui, l’Hôpital Gabriel Touré brille par l’absence  des médecins pour son fonctionnement. Ces derniers, qui ne se soucient que de leur cent sous, prennent en otage la santé et la vie des malades pour se faire la poche dans les cliniques privées de la place.

Une fois admis aux services des urgences de cet hosto, on vous enregistre au bureau des entrées. C’est peut-être le seul mérite.

Le serment d’Hippocrate fait place au serment d’hypocrite 

Selon le constat des usagers, aujourd’hui, cet hôpital ne répond à aucun « critère international » tant sur le plan infrastructurel que dans la prestation. D’autres estiment que le CHU Gabriel Touré est un simple internat où les malades viennent attendre impatiemment leur jour. « La qualité des soins offerte ne peut sauver un malade », confie un travailleur de l’administration de l’HGT qui préfère garder l’anonymat.  À l’en croire, c’est un simple « mouroir ». Car, argue-t-il, au rythme que les appareils sont en panne, les médecins spécialisés vaquent à leurs affaires dans les cliniques privées. Et le reste des toubibs sur place ne sont pas à la hauteur.

Du coup, pour un mal à l’oreille on vous occasionne une paralysie faciale à vie. Et pour un mal à la dent, on vous rend sourd durant le reste de votre existence.

Parlant de réanimation au sein de ce centre hospitalier universitaire, le plus souvent, l’équipement manque d’oxygène, d’appareils et de médicaments indispensables. Conséquences, 90% des patients qui y viennent dans un état de coma, meurent faute de soins appropriés. Autrement dit, à l’Hôpital Gabriel Touré, on y rentre vivant et on en sort les pieds devant.

Pour « sauver » des vies, les médecins spécialisés utilisent leurs relations à travers les hôpitaux et cliniques privés du pays. Un effort moyennant des espèces sonnantes et trébuchantes des parents des patients.

Du côté du département en charge de la Santé et de l’Hygiène Publique, tout porte à croire qu’il n’a pas les moyens de sa politique. Selon nos informations, le fonds alloué à ce secteur ne dépasse pas  4,32% du budget national alors que la norme internationale est de 15%. Des sources confirment que le Mali, pays frontalier de la Guinée, alloue 8% de son budget au secteur de la santé.

En tout  cas, au CHU Gabriel Touré, les malades et parents continuent de payer le lourd tribut. Par jour, on peut y compter une dizaine de morts. Pauvre de nous.

Selon le dernier rapport  du BVG, l’Hôpital Gabriel Touré, bat le record de mortalité hospitalière au Mali. Sur un total de 19 154 enfants hospitalisés à la Pédiatrie, 4 633 sont décédés, soit un taux de mortalité de 24%. Ainsi, de 2016 à 2017, les décès enregistrés à la pédiatrie de l’hosto sont passés de 64% à 96% du total des décès hospitaliers du CHU-Gabriel Touré. Et ce n’est pas par hasard que l’ANEH (Agence Nationale d’Évaluation des Hôpitaux) a classé le CHU-Gabriel Touré au rang de dernier des hôpitaux du Mali. Avec une subvention représentant plus de 70% des ressources de l’hôpital, soit respectivement en 2016 et 2017,  3,70 milliards de FCFA et 3,89 milliards de FCFA et un plateau technique hors norme, il y a eu un décès hospitalier de 2 761 en 2016 et 1 955 en 2017.

Les horreurs médicales se multiplient  

Racket des malades, ordonnances kilométriques auxquelles s’ajoutent, parfois des bavures médicales… Depuis, le serment d’Hippocrate a fait place au serment d’hypocrite au niveau du CHU-Gabriel Touré.

Les stagiaires foisonnent dans ce CHU, comme des champignons. Tantôt, dans des couloirs insalubres ; tantôt dans des bureaux malfamées. Mais dans un cas, comme dans l’autre, les patients sont victimes d’une souffrance double : une hémorragie financière et un service de piètre qualité.

Outre les frais de consultation exorbitants au niveau de l’Hôpital Gabriel Touré, les ordonnances sont rédigées à la tête du « client ». Au cours de la consultation, le médecin soumet le malade à une série de questions. Histoire de sonder son pouvoir d’achat ou le poids de sa bourse. Puis, tombe comme un couperet, une ordonnance kilométrique qui noiera le porte-monnaie du patient.

Et comme par enchantement, dans cet hosto du Gabriel Touré, les médecins multiplient les rendez-vous. Mieux, à chaque fois, la même torture : délier les cordons de la bourse pour être consulté. Nombreux sont les patients, qui y ont laissé des plumes pour n’avoir pas eu sur eux, le calice réclamé par leur toubib traitant. Nombreux aussi, les malades qui se plaignent d’avoir déboursé des fonds, sans résultat.  En bloc, le CHU-Gabriel Touré ne l’est que de nom : manque de kits, de personnel qualifié etc.

Pour des interventions chirurgicales, les opérations sont reportées pour manque d’anesthésie. S’agissant des accouchements, ils se passent dans des conditions…tragiques. Nombreux sont les époux qui ont été veuf, avant l’âge. Suite au massacre de leur seconde moitié à l’Hôpital Gabriel Touré par ces bourreaux, entendez ces bouchers. Dans tout ça, ce sont les médecins qui se frottent la blouse. Pendant que leurs malades passent l’arme à gauche, ils s’en mettent plein les poches.

Mais face à cette pagaille organisée, les autorités sanitaires gardent profil bas. Aucune enquête, aucun contrôle. Rien.  Pourtant, ce ne sont pas les plaintes qui manquent. Les victimes, aussi, qui n’ont plus que leur tombe pour pleurer.

En tout cas, la santé est très précieuse pour être confiée à des « assassins » en blouse blanche ou bouse verte. Serons-nous tentés de dire.

Car, comment appelle-t-on un médecin qui, après une intervention chirurgicale, oublie ses kits  dans les entrailles de son patient ? Ou un toubib qui laisse mourir son malade, parce que ce dernier ne dispose pas de la somme, nécessaire à son traitement ? Un criminel ou un assassin ?

Bref,  c’est ainsi qu’on meurt souvent à l’Hôpital Gabriel Touré. Parce que les disciplines d’Esculape se sont hissées hors des lois ordinaires sous le couvert des jugements de l’Ordre des Médecins, le citoyen malien est désarmé et impuissant.

Le dernier changement de Directeur avait soulevé de grands espoirs parmi les usagers du CHU, la partie est-elle perdue pour la nouvelle Direction et les victimes de nos blouses blanches ou bouses vertes ? Insouciance, incompétence même pas trop poussé…

Le Département de la Santé et de l’Hygiène Publique tient là un beau coup à jour. S’il le veut, bien évidemment.

Jean Pierre James  

 

 

 

 

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