C’est le Directeur de publication du quotidien Info-Matin, Président de l’Association des Editeurs de Presse Privée (ASSEP) et de l’Observatoire pour la Déontologie et l’Ethique de la Presse (ODEP). Se prononçant sur la crise que traverse actuellement la presse malienne, il souligne " il n’y a pas de problème de personne entre Belco et Sambi. Il y a un problème de légitimité et de légalité. L’ASSEP n’a pas respecté ses textes. Les gens en ont marre, un bureau a été nommé pour un mandat, c’est fini, on change de bureau, point à la ligne. La même personne ou une autre peut être élue à sa tête " déclare Sambi Touré.
Sahélien de Nioro du Sahel né il y a juste 42 ans, il a d’abord commencé son cycle primaire dans la localité. Sous l’influence de ses aînés, qui avaient embrassé la série Lettres, il fut, très jeune, un littéraire. A Nioro, à l’époque, il n’y avait que la série Sciences humaines au Lycée, alors il fut contraint de faire SH. Il vint ensuite à l’Ecole Nationale d’Administration de Bamako, en Sciences juridiques, section Droit privé, après avoir raté une bourse sur l’Allemagne. Sambi et ses camarades ont adhéré à la lutte bien avant la chute du régime de Moussa Traoré, en créant la commission de juristes de la lutte, l’ancêtre de ce qui est aujourd’hui la Commission nationale des jeunes juristes. Cette commission l’a conduit au CNID Faso Yiriwa Ton.
Après l’ENA, en 1990, et en attendant d’avoir un boulot stable, il donna des cours de droit de travail, de droit civil et de techniques bancaires dans certaines écoles privées de la place, jusqu’en 1993. Il restera au CNID jusqu’à cette date à partir de laquelle débute sa carrière de journaliste. Il fut embauché à Nouvel Horizon (hebdomadaire à l’époque) mais avait été pigiste au Républicain avant.. «Il n’y avait pas de quotidien privé. Nouvel Horizon a été le premier à tenter l’expérience en 1994, ensuite vinrent les Echos, un mois plus tard. Lorsque Chouaïdou (le fondateur) a été nommé Consul à Djedda, il m’a cédé le journal en location gérance». Là, Sambi brûlera les étapes. En six mois de service il devint directeur. «Il fallait tout apprendre vite et bien, pour ne pas décevoir un lectorat à l’époque exigeant». A la fin du contrat, en 1997, l’homme prit l’initiative de créer son propre canard, "Infos Matin" qui compte aujourd’hui parmi les meilleurs journaux de la place. Sambi est grand religieux. Son seul modèle est le Prophète, Paix et Salut sur lui. En bon musulman, l’homme est marié sous le régime polygamique. Pour la petite histoire, il était d’abord monogame. Sa première épouse a accepté de changer de régime afin que son mari puisse se marier une seconde fois. Selon lui, tout va à merveille dans sa famille. L’homme est père de cinq charmantes filles et un sixième enfant va bientôt naître.
D’après Sambi, la presse malienne peut être fière d’offrir un paysage multiforme, divers et de qualité. Car les médias maliens ont gagné beaucoup en professionnalisme et en productivité, de l’avènement de la démocratie à aujourd’hui, de façon qualitative et quantitative. Une approche beaucoup plus politique, professionnelle, est de s’inquiéter de la qualité des ressources humaines dans cette presse. Lors des assises du Forum national de 2000, la disposition prise était que désormais les journalistes soient au moins des cadres supérieurs, à défaut de détenir un diplôme de journalisme. Mais, cependant, l’arbre ne doit pas cacher la forêt "il y a beaucoup de tares là dedans, de faiblesses et de lacunes. Le plus souvent, les informations sont tirées par les cheveux. La profession est beaucoup trop pervertie par l’appât du gain. Les journalistes sont plus intéressés par les per diem que par l’information, ce qui fait qu’il n’ y a pas d’objectivité dans le traitement de l’information. Autant on peut se réjouir des avancées qualitatives, autant il faut aussi déplorer des pratiques qui n’honorent pas notre profession". Il est vrai que la formation ne pose pas de gros problèmes, puisque la grande majorité des journalistes connaît le B.A.ba du métier.
Etre directeur d’un quotidien et président de l’ASSEP et de l’ODEP est loin d’être une partie de plaisir, ajoutera Sambi. A ce propos dit-il "franchement, je me cherche aujourd’hui. Si on pouvait me soulager de certaines tâches, ce serait bien. Cela dit, chaque personne assume ses responsabilités à un moment donné de l’histoire ". «C’est une chance d’occuper ces postes en même temps. J’accepte volontiers, car il n’est pas donné à tout le monde de diriger des organes à caractère collectif. Je suis même prêt à ajouter d’autres fonctions à celles dont j’ai déjà la charge. Mais tout ce que je veux c’est être le Directeur de Infos Matin». En fait, Sambi Touré cherchait déjà, avant d’être élu à la tête de l’ASSEP, à quitter l’ODEP pour se consacrer à son journal.
S’agissant de la crise que traverse la presse malienne actuellement, le Directeur de Infos Matin déplore, comme tout journaliste, la situation. «Dans une famille, on ne prend pas le couteau pour discuter et convenir de quelque chose». Sambi estime que la presse, en tant qu’entité démocratique, se doit d’accepter de jouer les règles du jeu de la démocratie. «On ne peut pas avoir un regard critique sur les hommes politiques et les autres composantes de la nation si nous-mêmes ne jouons pas franc jeu, en respectant les textes, quant aux associations et structures. Si tel n’est pas le cas, on en viendra à des problèmes de personnes. Au niveau de l’AJPP, le problème se pose différemment. Il s’agit d’un problème d’application de textes aussi, par rapport aux statut sde l’AJPP et d’un problème de principes, par rapport à la qualité de journaliste».
S’agissant de l’ODEP le président assure que l’Observatoire ne se porte pas aussi mal qu’on le croit , puisqu’aux yeux du Réseau des Instances d’Auto Régulation des Médias en Afrique, c’est l’observatoire le plus dynamique en Afrique. Pour preuve, le Mali a été choisi pour abriter les assises du RIARM, qui devaient se tenir en septembre, mais compte tenu de la crise actuelle de la presse et des congés des autorités, l’ODEP a demandé à ce que la date soit reportée à octobre. Certes, «nous avons des petits problèmes de fonctionnement, qui dépendent aussi de la qualité et de la compréhension des missions confiée à l’ODEP». Sambi est traumatisé à chaque fois qu’il se «plante». «Le journaliste croit toujours ses sources diverses, mais des gens en qui on a confiance qui peuvent se tromper et induire les journalistes en erreur. A chaque fois que je fais le journal, c’est une responsabilité. Si je dérape, en dehors des coquilles, j’en suis blessé et ça me marque "
Ses temps libres, l’homme les consacre à la lecture, surtout de bouquins politiques, à la religion, à la musique et un peu à la télévision. Il sort pas beaucoup de chez lui en dehors de son travail et son plat adoré, en bon Sarakolé, demeure le couscous. Sambi Touré est demeuré un accro du terrain, du reportage. Il est un peu découragé dans ce domaine et s’est mis à l’écart depuis un certains temps, suite aux histoires de per diem car, estime t-il "on ne peut pas avoir l’information et en même temps l’argent, sinon il n’y aura pas d’objectivité dans le traitement ". Sambi n’adhère à aucun parti politique depuis qu’il a quitté le CNID, mais a des amis un peu dans tous les partis. "Le jour où je déciderai de faire de la politique, je quitterai la presse, les principes sont clairs et nets ".
Réalisé par F. Mah THIAM DOUMBIA
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