À l’occasion de la Journée internationale de la liberté de la presse, nous avons ouvert le débat sur l’impact des nouveaux moyens d’information sur la presse. Des journalistes évoquent le danger de cette évolution pour la qualité de l’information et pour la viabilité des entreprises médiatiques. Ils soulignent aussi les possibilités offertes par la technologie pour se réinventer
La domination par les réseaux sociaux de la communication publique est, aujourd’hui, fait dans notre pays comme partout ailleurs. Les dérives sur le plan de l’éthique et de la déontologique constituent une source d’inquiétude pour les professionnels qui voient aussi poindre une menace sérieuse pour le modèle économique des médias dits traditionnels.
Les journalistes voient leurs lecteurs, auditeurs et téléspectateurs se tourner de plus en plus vers les réseaux sociaux en quête d’informations fraîches et instantanées. En témoignent ces propos d’un groupe de jeunes hommes au «grin» à Bacodjicoroni Golf, en Commune V. Où l’ambiance était bon enfant après la rupture du jeûne. Certains jouaient aux cartes d’autres les yeux rivés sur les écrans de leurs Smartphones.
L’un d’eux, Ibrahim Traoré, la vingtaine, fait défiler différentes pages à la recherche d’information sur Facebook. Assis à côté de lui, Salia Berthé estime que les réseaux sociaux sont plus accessibles. «Je n’ai pas de budget pour acheter un journal papier. Je n’ouvre la télévision que pour regarder les matches de football. Je m’informe uniquement sur les réseaux sociaux».
Khalifa Traoré, lui, estime que les réseaux sociaux sont plus attractifs et simples à exploiter. Il suit des pages comme «Kati 24», Malik Konaté, OM TV, etc. Donc plus besoin, selon lui, de s’encombrer de radio ou de télévision et surtout plus besoin de dépenser de l’argent pour acheter un journal. Face à cette déferlante des réseaux sociaux, quelle stratégie de survie pour les médias traditionnels?
Faire évoluer le contenu- La communication publique qui était l’apanage des médias a migré petit à petit sur les réseaux sociaux. Ceux-ci sont animés très souvent par des personnes qui n’ont pas la qualité de journaliste. Gaoussou Drabo, journaliste et ancien ministre de la Communication, rappelle que la communication publique apporte l’information et forme les opinions.
Il fait le constat que les réseaux sociaux se sont substitués à tous les médias que ce soit les médias traditionnels ou les médias en ligne. «Ceux qui les animent ne s’embarrassent pas de scrupules, n’observent pas les préalables élémentaires du métier de journaliste. C’est-à-dire recouper les faits, vérifier et contextualiser», déplore l’ancien ministre.
À cet égard, il est primordial, selon lui, que les médias proposent une alternative : donner de l’information correcte au public. C’est à ce prix que l’on peut assurer la survie économique des médias. Certains l’ont compris et ont déjà trouvé des alternatives, souligne Gaoussou Drabo qui cite les exemples du journal américain « New York Times » et du journal français « Le Monde ». «Le Monde, en 4 ans, a eu 18% d’abonnement en plus et le New York Times en l’espace d’une année a gagné 300.000 nouveaux lecteurs», illustre l’ancien directeur général de l’Agence malienne de presse et de publicité (Amap), précisant que ces deux journaux ont suivi des démarches différentes.
Constatant que les lecteurs étaient plus intéressés par leurs écrans pour s’informer, Le Monde a fait évoluer son contenu au fur et à mesure que l’actualité dicte de nouveaux thèmes. à titre d’exemple, ce qu’un journal comme L’Essor classique, «propose ce mardi matin est valable jusqu’au lendemain matin et entre-temps tout ce qui se passe, vous l’apprenez soit par les réseaux sociaux soit par la télévision ou la radio.
Le journal est donc un objet immobile», alerte-t-il. Aujourd’hui, ajoute le doyen, ce qui intéresse le lecteur, c’est surtout le commentaire et l’analyse. C’est dans cette perspective que Le Monde a mis en place une version évolutive de son journal et a mis sur son site une application appelée La Matinale. Ce qui signifie que le lecteur, l’abonné, a les informations les plus fraîches le matin et les commentaires. Grâce à cela, le lecteur n’a plus besoin de fouiller les réseaux sociaux pour s’informer, assure Gaoussou Drabo.
Quant au New York Times, «ils sont plus réactifs dans le contenu. Au cours de la journée, les dernières nouvelles sont traitées». En plus, ajoute l’ancien ministre, ils ont créé des plateformes thématiques comme le New York Times Cuisines et le New York Times mots-croisés qui, chacun, ont 50.000 abonnés.
Gaoussou Drabo invite alors les responsables des médias à s’interroger sur ce qui peut intéresser le lecteur que les réseaux sociaux ne proposent pas. Car dans la bataille de l’information, la technologie a donné des avantages aux réseaux sociaux mais, elle donne aussi des ouvertures aux médias traditionnels, explique notre confrère.
ATOUT À EXPLOITER- Pour lui, le Fact-checking qui se propose de vérifier les informations sur les réseaux sociaux, constitue un atout à exploiter. Cependant, consent-il, il est très contraignant et demande du temps car il exige une enquête minutieuse pour donner la vérité des faits. Entre-temps, d’autres sujets sensationnels seront traités par les réseaux sociaux. «Les réseaux sociaux ont été plus dynamiques mais la presse traditionnelle qu’elle soit sur les supports traditionnels ou qu’elle soit en ligne a les moyens d’être une alternative aux réseaux sociaux», conclut le ministre Drabo.
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