Indéniablement, la presse privée malienne à travers seulement 3 organes (Les Echos, Aurore, La Roue) à partir de 1989 aura contribué de manière décisive au triomphe de la révolution démocratique dans notre pays.
Elle inspirait alors, respect et admiration.
Mais, très vite, les choses se gâtent, car le noble métier de journaliste est devenu, le refuge de toutes sortes d’individus.
« La mission d’un organe de presse, c’est d’informer et chacun a son combat à mener.
Mais, au Mali, de plus en plus, le journal est utilisé comme une arme de destruction plutôt qu’un support d’informations qui se prête au combat que chacun veut mener.
De 1990-91 à nos jours, la presse a fortement évolué, mais dans quel sens ?
La presse aurait pu aller loin, tout en restant combattante, si c’était son choix, à aller vers plus de profesionnalisme, de propension à informer les gens.
Mais, le constat est qu’aujourd’hui, quand on prend le journal, on arrive au milieu de l’article sans savoir ce que l’auteur veut dire, sans avoir un seul fait.
Si ces journalistes se prennent pour des combattants, ce n’est pas la meilleure façon de faire.
On peut se battre dans le journalisme, mais en appliquant les règles du métier qui consistent principalement à informer le lecteur, et que celui-ci trouve dans les toutes premières lignes les faits, le commentaire pouvant suivre ou pas.
Il y a aussi ceci qui est inadmissible : les conseils que nombre de journalistes mettent en guise de conclusion à la fin de leurs articles.
On ne paye pas un journal pour un conseil et qu’on vous fasse la morale.
On le paye pour être informé et tirer les leçons qui s’imposent.
On peut être combattant et informer de façon moins ennuyeuse.
La presse, malienne n’a pas évolué
Quand nous prenons l’ensemble des titres, on remarque (dans 80% de cas) que la première page est vide ; la deuxième est réservée à des annonces ou à des tradithérapeutes.
L’information qui peut intéresser, c’est sur une page, le reste, on le remplit avec MFI, SYFIA et ALTERCOM NDRL : (des articles d’agences étrangères) et Internet.
Visiblement, les gens n’ont pas les moyens de remplir quatre pages, encore moins 6 pages ou 8 pages.
Quand on regarde la presse écrite, on se dit que les journalistes n’ont d’oreilles que pour la politique au Mali.
Mais, peut être que c’est facile aussi, parce qu’on prend des déclarations et puis, on spécule là-dessus, alors qu’il faut aller chercher les faits.
Peut être aussi que les politiciens sont les premiers bailleurs de la presse.
Tout cela, est lié à la faible capitalisation financière et humaine.
Les capitaux sont dispersés
Rares sont les journaux qui se créent avec deux millions CFA disponibles.
Rares sont les journaux où exercent même 2 journalistes chevronnés qui peuvent avoir la responsabilité et de façon satisfaisante, de tenir une rubrique.
Les gens sont éparpillés, le titres naissent tous les jours, mais le contenu ne gagne pas en qualité, parce que, pour certaines raisons, les gens sont amenés à créer leur journal.
Souvent, c’est plus facile de créer son journal que de trimer dans un autre.
C’est aussi puisqu’on découvre que tel journal « pour lequel je me tue ne mène pas le même combat que moi ».
Plus de 100 journaux, c’est trop ! La presse écrite privée gagnerait en crédibilité si l’ensemble des titres fusionnait en deux quotidiens et cinq à huit hebdo.
Avec des rédactions d’une dizaine de personnes, on peut créer des journaux dignes de ce nom.
Certes, il se trouve dans nombre de journaux, au moins un bon élément.
Mais, il y a une faible capitalisation parce qu’on ne trouve dans aucun journal, la masse critique de journalistes qu’il faut et aucun journal n’a les moyens de sortir pendant un certain temps sans être lié aux insertions publicitaires. Et, il faut un certain temps pour que le journal puisse conquérir le lecteur et qu’il ne soit pas esclave des aléas de mévente. Cette capacité financière aussi n’existe pas.
La plus grande évolution que la presse puisse faire, c’est d’aller dans le sens qu’on retrouve un journal où on a une dizaine de journalistes pour un quotidien et six à sept pour un hebdo.
Pour en venir à la radio
Là aussi, les gens n’ont pas évolué.
La radio ayant fait son apparition à la surprise générale, il fallait d’abord exister, avant de chercher à paraître ou à respecter les normes.
21 ans se sont écoulés sans que les radios aient pu faire cette mue qui aurait dû faire qu’elles aient en leur sein cette masse critique de journalistes et d’animateurs qui puissent permettre à la radio de continuer à servir la même qualité de programme, quand une personne s’absente pour une raison ou une autre.
Aussi, les radios n’ont pas suffisamment les moyens financiers pour faire les investissements qu’il faut au niveau du matériel, et des hommes, pour être de vraies radios.
Cependant, la radio au Mali correspond un peu plus au goût de ses auditeurs, que le journal à celui de ses lecteurs.
Je ne suis pas moi-même fan des radios, mais je constate qu’aucune radio n’a fermé, faute de moyens ou d’auditeurs, alors que nombre de journaux n’existent plus pour cause de mévente et de crédibilité.
La radio pour des raisons socio-culturelles correspond beaucoup plus à notre mental.
Mais à la radio, l’évolution tant attendue n’est pas arrivée.
Il n’y a pas plus d’une dizaine qui sont à la hauteur.
Il n’y a pas de vrais programmes à ce niveau, pas plus qu’on ne trouve dans les journaux des rubriques de façon cohérente.
En 21 ans, on dispose d’un certain nombre de journalistes et d’animateurs formés sur le tas qui auraient dû quand même nous amener à un niveau plus élevé.
Les évolutions ne se sont pas faites parce que, malgré les séminaires, la formation n’a pas permis cette élévation de niveau, cette progression dans la compétence qu’on attendait.
Quand à la télévision, elle fait ses mues de façon régulière.
Même là aussi, il y a à dire.
Quand je compare le budget de l’ORTM aux budgets des autres télé d’ailleurs, je dis qu’il y a un problème de moyens matériels.
Mais, il y a surtout à l’ORTM, une moins bonne utilisation des ressources.
Avec tout ce qu’ils ont comme producteurs, réalisateurs journalistes, je crois qu’on aurait dû avoir un peu plus de programmes produits au Mali et de meilleure qualité.
Je dis aussi, qu’il faut faire avec son temps, son milieu.
Maintenant, je me demande : les Maliens méritent-ils plus qu’ils ont actuellement ? Non !
Est-ce que les Maliens sont décidés à payer le prix qu’il faut pour que les émissions soient à hauteur de leur souhait ? Je ne le pense pas. Or, vouloir avoir une bonne télé, ça se paye. C’est la même chose pour la radio.
Du côté des annonceurs
Quand on voit le prix qu’on accepte de mettre dans les annonces, on se rend compte qu’ils sont tellement bas qu’il est difficile d’avoir des émissions de meilleure qualité.
De ce point de vue, les responsabilités sont partagées.
Mais je ne disculpe pas les journalistes, parce que l’effort qui leur revient, ils ne l’ont pas encore fait.
Venir dans la presse par accident ou par défaut, parce qu’on ne peut aller ailleurs ne sert personne.
Que les promoteurs sachent qu’on peut créer un journal sur un coup de tête.
Un journal ou une radio doit être un projet mûrement réfléchi et qui a eu le temps d’amasser les moyens humains et matériels qu’il faut.
Or, ce n’est pas le cas ici. Dans ce cas, est-ce qu’on ne peut pas tenter des fusions ?
Je pense que sur la centaine de titres (dont seulement une vingtaine paraissant régulièrement) il est étonnant qu’il ait cent écoles de pensées.
Il y a des affinités qui font que les gens peuvent se regrouper, pour former des réseaux, amortir les coûts de production et élargir l’espace publicitaire pour les annonces.
Quant aux textes régissant la presse, ils ont évolué
Je ne suis pas de l’avis de ceux qui disaient que le grand problème, sont les textes.
Je crois qu’on aurait pu faire nettement mieux avec les textes qui existent.
Pour preuve, avant même que ces textes ne soient votés, les gens se sont agités pour mettre en avant des écueils qui, en ce temps se sont révélés comme de vrais obstacles à l’exercice de cette profession.
Par contre, on voit que les journalistes se sont permis certaines choses.
Toutes les dispositions prévues dans les textes n’ont pas été appliquées, les excès qui étaient prévus et punis par la loi n’ont presque jamais été sanctionnés.
Une presse responsable peut évoluer dans le cadre des textes, qui la régissent.
Ces textes, c’est vrai, ont besoin d’être relus, parce qu’il y a des incohérences qui, doivent être corrigés.
L’essentiel n’est pas la loi, mais c’est dans l’attitude des hommes de presse ou de leur capacité à se défendre face aux assauts de tout pouvoir.
L’Essor est le journal qui a évolué de la meilleure façon dans le sens du professionnalisme et de la qualité. Ce n’est pas la même chose pour les journaux privés.
Au niveau de l’ORTM, le pouvoir accepte difficilement de lâcher un peu la corde par laquelle, il essaie de tenir l’ORTM.
Néanmoins, ils auraient dû faire mieux en traitant l’information plus en professionnel qu’il ne le font maintenant.
Quand je regarde le journal télévisé, je dis que c’est une page d’affaires publiques. Il y a les inaugurations, les télégrammes. Mais, c’est la loi.
Pour un journal de 15 à 30 mn c’est trop.
Quand je vois que le communiqué du conseil des ministres est lu intégralement, je dis qu’il y a un anachronisme qui ne dit pas son nom… Il paraît que c’est la règle.
Le gouvernement rendra un service en se délaissant de cet anachronisme et souvent en punissant les attitudes qui méritent d’être punies parce qu’elles portent atteintes, soit à l’honorabilité des gens ou c’est de l’intox, la propagation de fausses nouvelles.
Ce n’est pas rendre service aux journalistes que de les laisser se décrédibiliser eux-mêmes.
La presse malienne joue certainement un rôle
Mais, est-ce que la presse joue son rôle de la meilleure façon ? Je ne le pense pas.
Je pense qu’elle peut nettement mieux faire. C’est vrai qu’il y a des problèmes de moyens. C’est vrai aussi que, la presse écrite souffre de l’analphabétisme dans le pays.
En dépit de toutes ces conditions, la presse aurait pu faire mieux.
Le grand problème est qu’on n’est pas encore arrivé au moment où on distingue ceux qui sont venus dans la presse par vocation pour informer (parce qu’aussi ils ont une qualification), de ceux qui sont là par accident, pour faire fortune, ou pour régler des comptes.
Qui porte plainte contre un journal est traité souvent par une bonne partie de la presse comme quelqu’un qui porte atteinte à la liberté d’expression.
La liberté de presse découle de la démocratie, mais cette même démocratie donne le droit à tout citoyen de saisir la justice quand celui-ci s’estime lésé.
On gagnera à laisser les gens saisir le juge pour dire le droit.
Ce n’est en rien, porter atteinte à la liberté d’expression ou de presse.
Les deux libertés, celle de la presse et le droit du citoyen à saisir la justice vont ensemble.
Par ailleurs et c’est grave, autrefois, une information émanant de la presse était prise avec sérieux, maintenant c’est avec réserve.
Les journalistes y sont beaucoup dans cette situation misérable dans laquelle se trouve une bonne partie des organes de presse.
Il faut alors rétablir le crédit, parce que les bailleurs ne mettront pas leur argent dans une entreprise dont les acteurs ne sont pas crédibles.
De même, les auditeurs n’écouteront pas et les lecteurs, n’achèteront pas, les annonceurs non plus ne viendront pas.
Ce qu’on peut faire, c’est d’avoir cette crédibilité qu’on avait à un moment donné et qui va être le socle sur lequel se bâtira une presse solide.
Modibo Diallo
Merci frere Diallo pour ce tres bon article, qui comporte quand meme quelques erreurs de grammaire. Car aujourd’hui le Mali a plus besoin d’une presse professionnelle que d’une armee. Or, nos journalistes decoivent sur plusieurs fronts: melange des faits et des opinions, parti pris flagrant, trop grande credulite/dependence envers les medias etrangers, peur d’aller au front pour reporter la guerre…
Bref, le seul merite de notre presse, c’est d’exister.
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