Ce grand et très sérieux journaliste, toujours caché dans les locaux de l’ORTM, s’appelle Oumar Moussa Traoré. Il est le rédacteur en chef du journal télévisé. Bamako Hebdo l’a rencontré. Il nous parle de son travail en affirmant que le journalisme l’a tellement passionné qu’il s’est donné le temps d’apprendre et d’aimer ce métier.
Natif de Bougouni, l’homme est juriste de formation, comme ancien de l’Ecole Nationale d’Administration (ENA), section Administration Publique. A sa sortie, en 1987, il fut assistant d’un notaire pendant un an, avant de devenir vendeur à l’officine "le Bourgou " du Dr Moriba Sidibé à Magnambougou.
Sur le conseil d’un de ses amis d’enfance, en la personne de Amadou Beïdy Haïdara, le Directeur de publication du bi-hebdo "Le Challenger ", il entame une carrière dans la presse. Il avoue qu’il avait des réticences au départ, mais, finalement, ABH a réussi à le convaincre. Il a commencé au sein de la rédaction de l’hebdomadaire "Le Soudanais " de Kissima Gakou, tout en continuant à travailler à l’officine, durant un an, jusqu’à sa nomination comme rédacteur en chef du journal. Il décrochera définitivement de la pharmacie en 1995. Le métier, il l’a appris sur le tas. Il bénéficia d’une formation spécifique de quelques mois à l’ENA de Bamako, couronnée par un stage à Montréal et un diplôme délivré par l’université de cette ville, d’où il sortira avec un DESS en journalisme. Agé aujourd’hui de 46 ans, Oumar Moussa Traoré est marié et père d’une fille.
A l’Office de Radio Diffusion Télévision du Mali, ses collègues l’ont surnommé OMT, initiales de son nom. Certains s’amusent à l’appeler "monstre froid", sobriquet qu’Oumar Moussa lui-même avait attribué, à son arrivée en 2002 dans la boîte, aux deux rédacteurs en chef de l’époque, Manga Dembélé à la télé et Mahamadou Koné à la radio, car, tout simplement, les deux hommes les faisaient travailler durement. Ils pouvaient se retrouver à avoir trois à quatre reportages à faire chaque jour. Ironie de l’histoire, aujourd’hui l’appellation lui revient.
Oumar Moussa a d’abord fait son premier cycle du primaire à l’école de Hamdallaye. Au niveau de la 7eme année, sa maman l’a envoyé à Kassaro, le long des rails, à quelques 100 km de Bamako chez son oncle, à cause de son caractère rebelle qui lui causait quelques soucis. Là-bas, il n’avait qu’un objectif : réussir et revenir à la capitale. Oumar a suivi son oncle à Kita, à Sébékoro et au lycée de Dioïla, où il décrochera les deux parties du bac dans les conditions pénibles, car les bourses, à l’époque, nous étions dans les années 80, étaient suspendues.
Le travail principal du rédacteur en chef du J.T consiste à organiser la collecte de l’information, à travers un chronogramme détaillé, en vue de préparer les éléments du journal. C’est un travail collégial, qu’OMT coordonne avec le rédacteur en chef de la radio, les chefs d’édition, les autres journalistes, les caméramans et les monteurs. Tâche ardue, mais l’homme arrive quand même à tirer son épingle du jeu par sa présence assidue à la station, où il est de 7 heures à 22 heures quotidiennement. "Si secret il y a dans la gestion du journal télévisé, c’est d’abord la présence physique, pour mieux coordonner l’ensemble " déclare-t-il.
S’agissant du paysage médiatique malien, OMT rappelle qu’il fait son bonhomme de chemin. A l’image d’un enfant, il en est à sa période de balbutiement. "C’est une situation que nous vivons tous les jours. Nous devons être patients et donner le temps à cette presse, née à la faveur de la démocratisation, de mûrir ". Oumar cite entre autres les Echos, Aurore et la Roue qui ont beaucoup contribué à la conscientisation de l’opinion. Il estime que c’est bien avoir une presse qui a beaucoup de vitalité, malgré le fait que, souvent, on ait plus la quantité que la qualité. "Il faut maintenant s’atteler à ce que cette presse puisse être davantage professionnalisée, par la formation des journalistes. C’est cela le gros problème aujourd’hui ", laisse entendre le Red chef du J.T. " On remarque aujourd’hui que les journalistes, surtout ceux de la presse privée, ne sont pas très regardants sur les règles de déontologie, sinon il y aurait moins de dérapages ". Oumar rappelle également que la liberté de presse est bien une réalité au Mali, car il y a peu de procès intentés contre les journalistes par rapport à beaucoup d’autres pays. Il en profite pour demander aux jeunes qui viennent dans la profession de se donner le temps d’apprendre, tout en restant humbles. "On ne vient pas au journalisme pour s’enrichir, il faut accepter de se remettre en cause ".
La plus grande satisfaction d’Oumar Moussa Traoré est d’avoir servi à quelque chose dans la presse, à travers les leçons apprises par des déplacements constants sur le terrain. Ses rares moments de loisir, il les consacre à la lecture, à la musique et au sport, pour préserver sa santé. Son plat préféré reste la sauce à base d’arachides sur du riz. Il développe une réelle allergie envers le trafic d’influence, le chantage et le mépris. Oumar Moussa, bien qu’il soit aujourd’hui plutôt un bureaucrate, n’hésite pas à descendre sur le terrain à chaque fois que l’occasion se présente. Car, conclut-il " c’est sur le terrain que je me sens le plus à l’aise, même si les circonstances de la vie ont fait maintenant de moi un homme des bureaux, depuis un bout de temps " .
Fatoumata Mah THIAM DOUMBIA
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