Adama Koité félicite l’initiative de "Bamako Hebdo", un journal qui, selon lui, célèbre enfin la culture malienne en accordant de l’importance à l’apologie des artistes. C’est toujours intéressant, soutient-il, d’avoir un tel journal entre les mains. Mais, Adama Koité estime surtout qu’il n’est pas facile pour un homme de parler de lui. Ce géant et élégant animateur chouchou de l’émission hebdomadaire "Samedi Loisirs", une des plus anciennes de la télévision malienne, est plus connu des mélomanes téléspectateurs de l’ORTM. Son émission passe de 14 H à 16 H. L’homme est également co-initiateur de la deuxième chaîne de l’ORTM.
Originaire de Kayes-Ba, ce fils d’instituteur parle couramment le kassonké, une langue qu’il se plait à parler même sur l’antenne à chaque fois que quelqu’un s’adresse à lui dans ce dialecte mandingue. Né dans une famille de griots il y a aujourd’hui 44 ans, Adama a des origines qui remontent au Sénégal. Où le nom "Kouyaté" du Mali est prononcé "Koité".
Adama est aussi cousin de l’artiste Habib Koité qui est de même souche que lui. Tout jeune, il était surnommé "Baron" par ses amis d’enfance. Et, depuis, ce surnom – par lequel même sa femme l’appelle affectueusement – lui est resté collé au corps.
Marié sous le régime polygamique, l’homme n’a, pour le moment, qu’une épouse qui lui a donné quatre beaux enfants dont le premier, homonyme de son papa, a 16 ans et la toute petite un an.
Adama a d’abord commencé son cycle primaire à Kayes puis a continué à Bamako, précisément à Bolibana à l’école de
Comme Daouda N’diaye et Moussa Ouane qui assument tous deux des responsabilités à des degrés différents aujourd’hui, Baron est un produit de l’Institut national des arts (INA). Il a ensuite passé deux ans au Service national des jeunes (SNJ) qui assurait une formation militaire obligatoire pour tout jeune diplômé admis au concours d’entrée à
A ce propos, Adama nous livre une anecdote pour illustrer ce passage au service militaire. Pendant la guerre Mali-Burkina Faso, lui qui était sous les couleurs a servi, les pieds dans l’eau, sous le pont des Martyrs. D’après les rumeurs, en effet, des commandos parachutistes burkinabés s’étaient infiltrés dans la capitale. Le rôle de Baron était de surveiller le pont, le seul de toute la capitale. Il passait alors des nuits blanches pour tenter de sauver le pays à sa manière.
Le géant-homme a été muté à l’ORTM en 1987. Et, trois ans plus tard, il commença à parler sur les ondes. A ce propos, dit-il, "ç’a été une drôle de chance pour moi de me retrouver à
A son arrivée dans la boîte, il a commencé son apprentissage comme régisseur dans la bandothèque mais, au fur et à mesure, feu Mamadou Souleymane, directeur des programmes de la télévision à l’époque, décelait en lui de très bonnes dispositions à évoluer. Il lui apprenait ainsi à se tenir et à se présenter devant le micro.
Il était surtout à la radio où il a été formé aux enseignements des grands tels que Boubacar Diallo avec l’émission "Jeunesse et Développement", Tiémoko Macalou et Mamadou Souleymane avec "Forum du lundi". Et aujourd’hui, Adama Koité affiche la fierté d’avoir été l’élève de ces ténors de la presse malienne. Ainsi, désirant toujours apprendre, Adama est-il de nouveau retourné sur les bancs, à l’Université du Mali, à la recherche d’une maîtrise en art. En effet, avec deux émissions par semaine à la radio Chaîne II et une à la télévision et qui demandent beaucoup de vigilance et d’efforts, Baron arrive à faire son travail tant bien que mal. Car c’est devenu un jeu pour lui que d’être sur l’antenne tellement il s’y plait.
En 1992, Ibrahim Diombélé et Adama Koité ont eu l’initiative heureuse d’initier une chaîne de proximité pour la jeunesse. A l’époque, Cheichna Hamalla Diarra, directeur de l’ORTM, a bien accueilli la démarche. Le projet a été ensuite ficelé et financé. Et Baron fait partie des premiers animateurs de cette radio qu’est la chaîne II, l’une des plus écoutées de la capitale et de ses environnants.
Mais cette expérience radio d’Adama n’a pas duré. Car il a été mis à la disposition de la télévision pour animer des émissions tels que "Top Etoiles" qui, au début, était une émission évènementielle. Aujourd’hui, il ne sait plus ce qu’est devenue cette émission. Car plusieurs animateurs se sont succédé pour l’animer: "Je ne critique personne en disant que le Top a perdu toute sa saveur. L’émission n’est plus ce qu’elle était, elle est devenue une émission de pacotille".
S’agissant de la crise que traverse actuellement la presse malienne, notre interlocuteur affirme que c’est difficile et honteux de savoir qu’entre frères, il existe une guerre fratricide, alors qu’ayant les mêmes objectifs, ils doivent tous abonder dans le même sens. Ce qui est grave, selon lui, c’est que certains ont des raisons plutôt de peccadilles. Il y en a même qui ne respectent plus la déontologie. "Quand n’importe qui se lève et devient journaliste dans ce pays, ne pensez-vous pas que ce soit vrai ?", a-t-il souligné. Une question posée à qui de droit à laquelle Adama Koité attend une réponse.
Déçu de savoir qu’un animateur est tabassé pour des futilités, il considère que la liberté de presse est menacée au Mali. Car c’est une chose qui peut arriver à chacun de nous. "Au nom de quelle liberté cela doit-il se faire ?", s’interroge-t-il. Pour Adama Koité, la presse, que ce soit la radio, la télévision ou la presse écrite, est un univers crucial. "Les gens oublient qu’ils doivent toujours apprendre. Ce métier-là est un métier très noble, il faut savoir le faire et surtout bien le faire", ajoute Baron.
Sa plus grande satisfaction, c’est de pouvoir réussir à repartir de nouveau à l’école et préparer une maîtrise. "Malheureusement, nous évoluons dans un monde "pourri" où il y a trop de mesquinerie, de méchanceté. Et où, une fois que quelqu’un tourne le dos, il est poignardé", regrette-t-il.
En guise de référence, l’homme s’identifie à son père, un vieil instituteur à la retraite qui a des conceptions très étroites, très droites et très véridiques. Un homme qui a enseigné l’ancien président de
Ses temps libres, Adama les consacre à sa famille, à ses amis pour rigoler, aux boîtes de nuit et au cinéma dont il demeure un fan. Cependant, il estime appartenir à tout le monde sans exception du fait qu’il est un homme public. Il n’a pas, selon lui, à s’aligner derrière un homme politique. Par respect pour sa notoriété et pour le Mali. Pour lequel il a toujours prié et continue de prier.
Fatoumata Mah Thiam DOUMBIA
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