Dans le cadre de son projet : “Amélioration de la gouvernance et la lutte contre la corruption”, financé par le par Diakonia, le Réseau plaidoyer et lobbying a organisé, le mercredi 26 juin dernier, dans la salle de conférence du Mémorial Modibo Keïta, un atelier de formation des hommes de média sur le rôle et la responsabilité du Pôle économique et financier dans la lutte contre la corruption et la délinquance financière au Mali. Pour la circonstance, la formation était assurée par le désormais ancien procureur de la République près le Tribunal de grande instance de la Commune III du district de Bamako en charge du Pôle économique et Financier de la Cour d’Appel de Bamako, Mamadou Bandiougou Diawara.
Pour les responsables du réseau, le Mali, de son indépendance en 1960 à nos jours, a toujours été confronté à plusieurs défis de gouvernance qui affectent sa survie et son développement. Et de poursuivre que parmi ces défis, la mauvaise gouvernance et la corruption, des pratiques qui engendrent un manque à gagner pour l’Etat comme le démontrent les rapports 2015, 2016 et 2017 du Bureau du Vérificateur Général qui font état respectivement des déperditions financières se chiffrant à 70,10 milliards Fcfa, à 52,47 milliards Fcfa et 23,28 milliards Fcfa.
A leurs dires, la corruption est devenue un véritable phénomène de société et prend des proportions alarmantes se manifestant dans tous les domaines de développement. “Elle aspire des ressources économiques importantes, des possibilités d’investissement, diminue les chances d’atteindre les objectifs de développement et affecte l’offre qualitative des services sociaux de base”, ont-ils précisé.
Selon eux, au regard des conséquences désastreuses du phénomène, le Mali s’est engagé à travers des politiques et textes nationaux et internationaux à lutter contre la corruption et la délinquance, notamment la loi sur l’enrichissement illicite, le convention des Nations Unies de lutte contre la corruption, celle de l’Union Africaine à lutter contre la corruption et la délinquance financière et bien d’autres.
A cela, s’ajoutent le nombre de structures existantes qui luttent contre la corruption : le Bureau du Vérificateur général, la CASCA, le Contrôle général des services publics, le CENTIF, l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite, le Pôle économique et financier… Toutes ces structures citées plus haut ont des mandats spécifiques en matière de lutte contre la corruption et la délinquance financière au Mali. La multitude de ces structures porte la confusion sur les missions réelles, rôles et responsables spécifiques et même les limites de chacune des structures. Ce qui entraine des difficultés dans la compréhension de ces structures et des difficultés dans la collaboration avec les autres acteurs (la société civile, la presse…) impliqués dans le processus.
Les journalistes invités à s’attaquer au vrai système de corruption
De leur point de vue, c’est dans le souci d’aider la société civile et plus particulièrement les journalistes actifs dans la lutte contre la corruption à mieux collaborer et à jouer pleinement leur rôle de veille que le Réseau plaidoyer et lobbying a organisé ce cadre d’échange entre le Pôle économique et Financier de la Cour d’Appel de Bamako et les hommes de média.
Evoquant les missions de l’organisation, ils diront que le Réseau contribue à la lutte contre la corruption à travers la sensibilisation/information sur le phénomène de la corruption, la diffusion des rapports de contrôle du Bureau du Vérificateur général auprès des Organisations de la société civile (Osc), l’interpellation sur la mise en œuvre des recommandations des Etats généraux sur la corruption.
A sa suite, l’ancien Procureur du Pôle économique et Financier de la Cour d’Appel de Bamako, Mamadou Bandiougou Diawara, a fait un bref rappel des missions du Pôle ainsi que les principales formes de corruption dans notre pays. Et d’expliquer que le phénomène de corruption existe depuis les premières heures de l’accession de notre pays à la souveraineté nationale et internationale. Il ajoutera que le régime du président Modibo Kéïta avait pris certaines mesures notamment contre les fonctionnaires de l’Etat à travers l’opération Taxi. Et de poursuivre que le régime de Moussa Traoré avait également adopté des textes pour lutter contre l’enrichissement illicite.
Selon lui, le Pôle économique et financier est une structure d’enquêtes spécialisée en matière économique et financière. “Notre vision est de faire du Pôle économique un outil intégré à l’avant-garde de la lutte contre la corruption, voire les infractions assimilées, et de contribuer à la construction d’un droit jurisprudentiel anticorruption”. À l’en croire, l’éradication de la corruption n’est pas possible sans l’implication de tous. “Le Pôle économique et financier à lui seul ne peut pas endiguer la corruption et la délinquance financière, il nous faut un accord de coopération avec tous les acteurs, notamment les journalistes.
Nous devons quitter l’ancien système pour cet accord de coopération qui demandera la participation de tous dans la lutte. Sans être professionnel, on ne peut jamais lutter contre la corruption”, a-t-il dit.
Il a saisi l’occasion pour inviter les journalistes à s’attaquer à la vraie corruption qui s’est érigée en un véritable système engloutissant des plusieurs dizaines de milliards de nos francs.
Boubacar PAÏTAO