Lamine Coulibaly, ancien présentateur vedette du journal télévisé de l’ORTM : «Il est incroyable qu''il n''y ait pas, aujourd''hui encore, de télévision privée au Mali»

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Lamine Coulibaly. Ce nom dit tout de suite quelque chose aux Maliens car l”homme a fait son entrée à Radio Mali en 1971, animant plusieurs émissions. Il fut animateur et présentateur vedette des journaux de cette station jusqu”en 1991, date à laquelle il fut appelé au Comité de Transition pour le Salut du Peuple (CTSP) pour en assurer la communication. Dès lors, Lamine a décidé de ne plus travailler dans la Fonction publique. Ce qui l”a conduit à créer sa propre agence de communication "LC Communication", à gérer la communication de plusieurs entreprises privées et à être présent aux côtés de certains ministres.

Aujourd”hui, Lamine Coulibaly est Conseiller spécial du Président de l”Assemblée Nationale, Ibrahim Boubacar Kéïta, depuis bientôt quatre ans. Son plus grand regret est le manque de télévisions privées  au Mali. C”est ce qui ressort de l”entretien exclusif qu”il a bien voulu nous accorder le lundi 13 août dernier dans son bureau à l”Assemblée Nationale. A 56 ans, Lamine préfère vivre dans l”ombre et être un homme de dossiers.

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Bamako Hebdo : Qui est Lamine Coulibaly ?

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Lamine Coulibaly : J”ai un parcours un peu atypique : Ecole primaire au Mali, secondaire au Sénégal,  Lycée Notre Dame du Liban, puis au Lycée Askia Mohamed. Ensuite, j”intègre Radio Mali en 1971. Je suis marié, père de six enfants et grand-père de quatre petits enfants. Je suis âgé aujourd”hui de 56 ans et journaliste de radio – télévision. Actuellement, je travaille au sein du cabinet du Président Ibrahim Boubacar Kéïta à l”Assemblée Nationale où je suis chargé de la presse.

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Au cours de ma vie professionnelle, j”ai touché à tous les compartiments de la radio, à savoir le reportage, le commentaire, l”éditorial, l”analyse, la présentation. J”ai même été Rédacteur en Chef de Radio Mali. Je fus Conseiller à la Communication du Président du CTSP, ATT, en 1991. J”ai servi également dans divers départements ministériels comme chargé de la presse. C”est ainsi que j”ai passé neuf ans et demi au ministère des Affaires Etrangères, avec feu Me Alioune Blondin Bèye. J”ai aussi travaillé au ministère de la Justice. C”est vous dire que j”ai touché à un peu de tout.

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Etes-vous diplômé en journalisme?

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Il faut reconnaître que j”ai pris un raccourci par rapport à beaucoup de mes confrères de l”époque. Eux ils ont suivi le parcours classique, à savoir le baccalauréat, plus le CESTI de Dakar ou celui de Yaoundé. Moi, je n”ai pas fait tout ça.

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Directement, du lycée, je me suis retrouvé à Radio-Mali qui avait un besoin urgent de personnel. C”est ainsi que le regretté Papus  Daff et moi y sommes entrés. Après, nous avons bénéficié de beaucoup de stages pratiques en radio. J”ai visité la moitié de l”Europe pour mes stages. En fait, je n”ai jamais obtenu un diplôme supérieur de journalisme, mais des diplômes très qualifiés de stages, que ce soit à Radio-France Internationale (RFI) ou la Voix de l”Amérique, etc. Sans compter que j”ai fait beaucoup de communication d”entreprise au Mali.

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Comment vous est venu cet amour pour le journalisme?  

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L”amour de ce métier m”a pris alors que j”étais tout petit. Je veux vous raconter cette histoire. Lorsque je suis arrivé en 1971 à Radio Mali, mes regrettés doyens qui travaillaient alors dans cette station, comme Oumar Cissé et Abdoul Gassama pensaient que je venais du Sénégal et que j”avais fait de la radio dans ce pays. Alors que je n”en avais jamais fait. C”était la première fois que je touchais un micro. J”ai pourtant été recruté sur le champ. C”était un mardi de 1971. J”ai commencé le même jour à travailler à l”antenne. Ce fut donc mon baptême de feu. Je ne sais pas comment cela m”est venu.

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Qui vous a conseillé de faire de la radio?   

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Personne ne me l”a conseillé. Mon père voulait que je sois un administrateur qualifié. J”avais un cousin qui voulait que j”entre dans la police, la gendarmerie ou l”armée. Vraiment, personne ne m”a conseillé de faire du journalisme. Un jour, alors que j”étais assis à la maison, j”ai décidé de faire du journalisme, rien que ça !.

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Peut-on connaître les raisons de votre départ de l”ORTM ?

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Il faut dire que je n”ai pas quitté l”ORTM. Au cours des événements de mars 1991, le Comité de Transition pour le Salut du Peuple (CTSP) s”est constitué avec l”aval des uns et des autres et m”a fait appel. Je suis parti au moment où j”avais dix-huit ans de présence à Radio Mali. J”étais avec Soumeylou Boubèye Maïga. C”est à partir du CTSP que je me suis dit que je ne voulais plus retourner dans la Fonction publique. J”ai décidé de prendre mon indépendance et j”ai demandé à quitter l”ORTM. J”ai tout de suite monté une agence de communication dénommée c’est-à-dire "LC-Communication", "Lamine Coulibaly Communication" afin de voler de mes propres ailes. J”ai été conseiller de certaines entreprises privées au Mali comme le Groupe Achcar. Je suis parti de l”ORTM de moi-même. Vous savez, je suis un garçon têtu. Quand quelque chose me tape à la tête, je m”en vais.

 

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Si, par hasard, on vous demandait de revenir à l”ORTM, que diriez-vous?

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On dit très souvent que le journalisme est un métier qui mène à tout. L”essentiel, c”est d”en sortir. Moi, j”ai déjà une expérience.

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De 1991 jusqu”à maintenant, j”ai rarement parlé devant un micro, sauf à Paris. Mais si on me demandait aujourd”hui de retourner à l”ORTM, pourquoi pas ? En fait, je n”ai vraiment pas envie de retourner dans un studio, dans une salle de rédaction, de tendre des micros. Je pense qu”à 56 ans, je préfèrerais assurer la formation des jeunes. Ce que j”ai noté, pour vous parler très sérieusement, c”est que la nouvelle génération n”est pas du tout préparée à ce métier. Je pense que la relève n”a été assez encadrée. Moi, je me faisais fort d”encadrer tous les jeunes. Si on m”appelait pour cela, je serais prêt à retourner à l”ORTM mais pas pour faire du reportage. Je laisse cela aux jeunes.

 

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Après l”ORTM, avez-vous travaillé dans d”autres structures de presse?

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Effectivement, après l”ORTM, j”ai touché à plusieurs structures, notamment le monde des assurances et le monde des radios privées. Pour la petite histoire, j”ai monté quelques radios privées. J”ai fait un tour à la Radio Klédu avec Thiona Mathieu Koné. Aujourd”hui, Mathieu est à l”Energie du Mali et moi, je suis au Cabinet d”IBK à l”Assemblée Nationale. J”ai également aidé beaucoup de structures d”agriculture à travers des consultations. A vrai dire, j”ai été un cavalier qui traînait sur tous les terrains. 

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A ce sujet, quelles relations entretenez-vous avec IBK?

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Le Président Ibrahim Boubacar Kéïta est un homme que j”aime beaucoup, que je respecte beaucoup aussi. J”ai avec lui des relations très sincères, fraternelles, cordiales.

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Nous sommes connus bien avant les événements de mars 1991. Je le savais Malien de Paris et très lié à mon tonton Youssouf Tata Cissé. J”ai beaucoup d”estime pour IBK, car c”est un grand homme. Je pense qu”IBK est dans la politique sans faire de la politique. IBK est tout à fait l”opposé de ce que le Président français, Nicolas Sarkozy dit : «Un homme politique doit faire de la politique». Alors qu”IBK est dans la politique sans faire de la politique. C”est quelqu”un qui ne ment pas, qui ne donne pas de fausses promesses. Quand il s”embarque, il s”embarque et il s”assume. J”aime cela chez un homme.

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C”est pour cette raison que vous êtes son conseiller spécial? 

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Je pense que c”est lui qui choisit ses collaborateurs. Je suis heureux qu”il m”ait choisi. Et cela, depuis bientôt quatre ans. Je m”en félicite parce que c”est une marque de confiance envers ma modeste personne.

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En quoi consiste votre travail?

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Quand on est aux côtés d”un président d”Assemblée Nationale, il s”agit non seulement de soigner l”image de marque de ce dernier mais aussi de faire la promotion du Parlement. En fait, je suis venu à l”Assemblée Nationale pour monter la radio du Parlement, qui n”a pas encore vu le jour. Les dossiers sont pourtant prêts. Il ne manque plus seulement qu”à régler quelques détails, notamment le financement.

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En tout cas, dans ce monde nouveau, les Parlements ont tendance à s”auto-suffire sur le plan médiatique, à savoir une radio du parlement, une télévision du parlement, un journal du Parlement. C”est ce qui est un peu à la mode aujourd”hui. Je pense que si l”on me donne l”opportunité de monter ce projet, ce sera très bien.

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En tant que professionnel, quel regard portez-vous sur le paysage médiatique malien? 

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Je pense que les événements de mars 1991 ont ouvert le bal. Dès lors, tout le monde s”est engouffré dans les médias, à commencer par certains opérateurs économiques qui ont monté des radios privées et ont fait appel à quelques professionnels. Mais, ce qui est rare aujourd”hui, ce sont ces professionnels qui ont accompagné ces opérateurs économiques à créer ces radios.

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Sans dénoncer qui que ce soit, je pense qu”il y a un problème au niveau du paysage médiatique malien. Je crois que le professionnalisme a pris du recul. Au lieu de consommer la rumeur, je préfère que les journalistes aillent à l”information. On ne cherche plus l”information, les gens préfèrent se saisir des ragots, titrer sur les ragots.

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Je crois que donner la vraie information sans commentaire est déjà bien. Mais, une information fausse qui est commentée faussement, ce n”est pas du tout bon pour notre profession.  C”est malheureux. Quand je vois ce qui se passe sur certaines radios qui font la revue de la presse en langue nationale bambara, quand vous l”entendez, c”est effarant. On dirait que ce n”est pas le même papier que vous avez lu dans le journal.

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Je veux bien qu”ils fassent la revue de presse en bambara mais encore faut-il qu”ils commentent ce qui est effectivement écrit par l”auteur de l”article. Je pense qu”il y a un problème de traduction et, à vrai dire, j”en suis malheureux.

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Que pensez-vous de l”arrestation de nos confrères par rapport à l”affaire dite de "la maîtresse du Président" qui a récemment défrayé la chronique ?

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C”est un dossier douloureux. Nous avons un confrère qui traite d”un sujet de dissertation en donnant son point de vue. Le lendemain, il se fait arrêter par un procureur de la République.  Je pense que cela découle d”une vaste incompréhension entre la justice et la presse privée. Pour lever toute équivoque, je pense que les pouvoirs publics et les différents médiums doivent se concerter et, pourquoi pas, aller vers des états généraux.

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Je pense que le Mali est un pays de consensus. Si l”autorité judiciaire et le pouvoir médiatique s”entendaient sur une plate-forme commune, en faisant un nouveau canevas de cette fameuse loi sur la presse, ce serait mieux.

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Je regrette, encore une fois, que cette loi sur la presse ait été rédigée dans la précipitation, dans un contexte très douloureux. Je reste solidaire de mes confrères qui ont été incarcérés. La confraternité m”impose d”être avec eux. Mais, encore une fois, il est temps qu”on réfléchisse sur toutes les lois qui régissent la presse au Mali.

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De vos débuts dans la presse à aujourd”hui, quelles ont été vos satisfactions?

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J”ai eu quelques satisfactions sur le plan médiatique. Nous avons commencé à Bozola avec les moyens de l”Etat. Pour nous, qui avons travaillé sous le Comité militaire de libération nationale, il n”était pas évident de travailler sous un régime qu”on qualifiait d”exception. Malgré tout cela, nous sommes arrivés à faire quelques bons coups. Malheureusement, il y a eu aussi des mauvais exemples, et on nous a maniés au bâton et à la carotte. Mais Dieu merci, tout se passe aujourd”hui normalement.

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Je pense qu”il y a beaucoup de choses à faire, sur le plan institutionnel et politique, parce que, quoi qu”on dise, il faut de la déontologie en politique. Cela suffit. Il ne faut plus, dans les pays africains, qu”un homme politique se lève et batte campagne en promettant aux populations qu”il va faire des routes, des dispensaires, des maternités, en sachant très bien qu”il ne pourra pas le faire. Sur le plan monétaire, économique, je pense que nous avons énormément de choses à faire. Il y a un ministre qui disait que «nous sommes un pays qui fait sa politique avec les moyens des autres».

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 Aujourd”hui, ce sont les multinationales et la presse qui gèrent le monde. Nous avons le coton qui se casse la figure, nous avons un peu d”or et on parle de la perspective du pétrole. Mais, ce qui est sûr, c”est qu”il y a beaucoup de choses à revoir au Mali. C”est un véritable chantier où tout reste à faire sur tous les plans. Comme le dit Drissa Kéïta, qui fut longtemps ministre des Finances et dernièrement PDG de la CMDT, au Mali il n”y a que des priorités et toutes les priorités sont prioritaires. Voilà mon sentiment.

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Avez-vous eu des déceptions dans l”exercice de vos fonctions?

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rnJ”ai eu beaucoup de déceptions dans ce métier. Ce n”est pas donné à tout le monde de faire ce métier, il y a des hauts et des bas. Vous faites un bon boulot en amenant de la matière dans votre salle de rédaction et on vous dit que le régime n”a pas besoin de cela. On vous met votre papier dans la poubelle pour des raisons fallacieuses.

Je préfère me taire sur ce sujet, par éthique, d”abord pour moi-même et pour mon pays. J”ai été témoin de beaucoup de choses sur les plans sportif, politique, judiciaire et de la gestion des affaires de l”Etat. Je pense que ce n”est plus d”actualité. Sinon, il y a énormément de choses à dire sur le plan de la justice mais, moi Lamine Coulibaly, j”ai des obligations de réserve pour l”instant.
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Que pensez-vous de la gestion actuelle du pays ? 

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rnLe Président Amadou Toumani Touré est un homme que je respecte beaucoup. Nous nous sommes connus bien avant qu”il ne devienne président de la République. Je n”ai jamais pensé que celui avec lequel j”étais à l”époque serait un jour le Chef de l”Etat du Mali.

Le Mali est le seul pays de l”Afrique de l”Ouest qui ait connu une aventure politique, diplomatique et monétaire. Par rapport aux Sénégalais et aux Burkinabés, nous nous payons notre aventure diplomatique, notre aventure politique et notre aventure monétaire. Aujourd”hui, Dieu a donné la chance à ATT de diriger ce pays. Il est confronté à d”énormes problèmes qu”il faut gérer.

La gestion de ces problèmes commande l”urgence. Je pense qu”ATT n”a pas les moyens nécessaires pour gérer les petits problèmes parce que, le temps qu”il gère un problème, un autre lui tombe dessus. Sinon, il est de très bonne foi pour son pays. Je crois que le Mali a toujours eu des présidents de bonne foi, à commencer par Modibo Kéïta, en passant par Moussa Traoré, Alpha Oumar Konaré et aujourd”hui ATT. Il faut reconnaître que l”environnement, dans notre pays, est tel que si vous êtes élu président de la République, demain vous serez confronté aux mêmes difficultés.
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Etes-vous fier aujourd”hui de votre carrière?

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Bien sûr. Je suis fier de ma carrière professionnelle. Je suis quelqu”un qui passe tout son temps à faire son autocritique. Je suis fier d”avoir rendu service à mon pays, à la population malienne. En un mot, je suis fier d”avoir été Lamine Coulibaly de l”ORTM. Je suis fier d”avoir été Lamine Coulibaly auprès de certains ministres. Je ne me reproche rien et j”ai la tête haute. Je ne me suis jamais mêlé de quoi que ce soit. Je n”ai demandé qu”à faire mon travail dans la dignité.

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Lamine Coulibaly a-t-il un modèle dans la vie?  

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rnJe pense que la presse écrite malienne s”est arrêtée à une certaine génération. Il faut qu”on se dise la vérité. Il s”agit de la génération des Mamadou Kaba, aujourd”hui ambassadeur du Mali au Caire, de Gaoussou Drabo, ministre de la Communication, de El Hadj Saouti Haïdara, directeur général du Groupe SOMAPRESSE (L”Indépendant et Bamako Hebdo), de Mamadou Lamine Doumbia dit MLD. C”est une génération de grandes plumes. Malheureusement, la nouvelle génération n”arrive pas à atteindre ce niveau. Je me souviens, en 1978, quand Mamadou Kaba a pris le risque de faire une série d”articles dans «L”Essor», dont il était Rédacteur en Chef adjoint, " Le Mali à la croisée des chemins ". Il fallait être Mamadou Kaba pour écrire ce genre d”articles. Mamadou Lamine Doumbia est un excellent plumitif, tout comme mon doyen Toumani Djimé Diallo. Ils font partie d”une génération douée. Je ne conteste pas les directeurs de publication qui sont en place actuellement. Je dis seulement que l”ancienne génération a mieux écrit que l”actuelle génération.

Au plan radio, franchement, je reste insatisfait. Les jeunes journalistes de radio ne me satisfont pas du tout. Que ce soit au niveau de l”ORTM ou des radios privées, je n”ai aucune satisfaction, sur le plan de la présentation des journaux, des reportages radios. J”aime bien le Directeur général de l”ORTM, Sidiki N”Fa Konaté, qui est un homme émérite et travailleur. Je crois qu”il est aujourd”hui confronté à ce qui concerne l”encadrement des jeunes journalistes. Sidiki gagnerait à mettre davantage l”accent sur la formation de cette jeunesse montante, surtout avec les nouvelles technologies de l”information. Il faut que nous nous y mettions, sinon nous prendrons la queue de peloton.
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Quel est votre point de vue par rapport à la création de chaînes de télévision privées au Mali ?    

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Je suis surpris qu”au jour d”aujourd”hui il n”y ait pas une télévision privée au Mali. Je ne sais pas ce qui bloque. Le ministre Gaoussou Drabo serait en face de moi que je lui poserais cette question. Il est impensable que le Mali n”ait pas une chaîne de télévision privée.  Je pense que le déclic est parti de Bamako le 26 mars 1991. Nous avons tout dit.

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Et, aujourd”hui, il n”y a toujours pas de télévision privée. C”est imaginable, alors qu”il y a des centaines de radios privées à travers le pays. Ce qui est sûr, c”est que je ne connais l”état d”avancement ou l”évolution des textes en la matière. Mais je suis quand même surpris qu”il n”y ait pas de télévision privée.

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Que pensez-vous des programmes actuels de l”ORTM?   

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Je crois que Sidiki tente de se mettre au goût du jour au niveau de la télévision nationale. Mais, encore une fois, il y a problème au niveau de la conception et de la réalisation. Je ne crois pas que ce soit une question d”hommes, je crois que c”est un problème d”environnement politique et social qu”il faut revoir.

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La lourdeur de cet environnement est telle que les collègues de l”ORTM  n”arrivent pas à aller jusqu”au bout de leurs idées. Je connais très bien  cette maison puisque j”y ai grandi. Mais, personnellement, je ne suis pas satisfait des programmes de la télévision malienne.

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Passez-vous de temps en temps à l”ORTM?

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Je vais là-bas rarement. J”y passe à l”occasion. Pour des raisons d”éthique et pour éviter toute fausse interprétation sur ma présence, je préfère m”éloigner de cette station.

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Quelles sont les défauts et les qualités de Lamine Coulibaly?

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J”ai énormément de défauts. Mon premier défaut, c”est que je suis têtu, je suis incontrôlable, je suis capable du pire. Vous savez, vous ne pouvez pas faire ce métier et rester bien sage. Ce n”est pas possible. Il faut être  «chaud». Il faut aller au-delà  de l”information. Il faut forcer les portes pour avoir l”information. Si c”est cela les défauts, je les ai. Sinon, je suis quelqu”un de très modeste dans ma vie privée, très simple, très réservé. Vous savez, je suis l”unique garçon de ma mère et de mon père. Moi, je suis né à Dakar. Mon père est né au Maroc et ma mère est née en Côte d”Ivoire. Je ne suis pas issu d”une famille nombreuse. Nous étions trois enfants.

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Je suis le seul garçon et j”avais deux petites sœurs, dont l”une est malheureusement décédée le 26 mars 1996 à 22 heures. C”est vous dire que je suis un garçon qui n”a pas connu la grande famille au sens éducationnel. Je suis quelqu”un qui ne regarde pas son prochain d”en haut. Je partage tout ce que je gagne. Aimer son boulot et le faire à cent à l”heure, c”est en quelque sorte l”une de mes qualités. Rester proche de ses parents, de ses amis et avoir de l”amour pour son prochain sont les autres qualités que je revendique.

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Peut-on dire que Lamine Coulibaly est heureux aujourd”hui?

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Je pense que le bonheur est relatif. On peut vivre heureux sans argent. On peut vivre heureux sans maison. On peut vivre heureux sans voiture. Moi, je me sens très heureux parce que je me contente du peu que j”ai. Je n”envie personne. Je ne cherche pas à détruire mon prochain. Je me sens bien dans ma peau. A 56 ans, je peux dire que je suis heureux.

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En tant que journaliste, quel souvenir gardez-vous des terrains de reportage?

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J”ai eu la chance de couvrir beaucoup d”événements. La plupart des sujets que j”ai eu à couvrir ont été finalement des événements de dimension historique. J”ai couvert le procès économique contre les Tiécoro, Kissima, Karim Dembélé et autres qui a eu lieu à Tombouctou. J”étais à Paris quand le procès politique s”est tenu à Bamako. Ils ont été accusés de tentative de coup d”Etat. On m”a appelé pour me demander de venir couvrir le procès de Tombouctou. Je m”attendais à tout. J”ai fait mon boulot sans problème. C”est un souvenir. J”ai plein de souvenirs.    

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Quels sont aujourd”hui vos projets ?

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Je crois que je veux continuer à gérer ma vie comme ça, jusqu”à la retraite définitive. Je ne veux pas de poste électif. Je ne veux pas être député. Je veux vivre dans l”ombre, vivre ma vie correctement et être un homme de dossiers. Je crois que le plus important c”est de servir mon pays à travers ses institutions.

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Pour le moment, je suis à l”Assemblée Nationale et je ne sais pas de quoi demain sera fait. Quelle que soit la forme du service qu”on me demandera, je suis prêt à l’accomplir.

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Réalisé par Alou Badra HAIDARA

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