Être journaliste au Mali n’est pas de tout repos : bas salaires, voire inexistant, manque de sécurité sociale, les perdiem deviennent les seules ressources pour beaucoup.
Il est 8 heures du matin, M. C., marié et père de 2 enfants est journaliste dans un organe de presse de la place. Chaque jour, sa femme A. D. est obligée de prendre l’argent de la popote dans son petit commerce, ou attendre que son mari parte faire un tour en ville pour avoir un premier reportage qui lui procurera un peu d’argent qu’il enverra par les moyens de transfert d’argent.
- C. reçoit chaque jour le chronogramme des évènements, ce qui lui permet d’aller faire les couvertures et ainsi gagner sa vie : « Chaque jour, j’ai un confrère qui m’envoie le chronogramme des activités. Grace à mon expérience, je sais quelles organisations donnent le perdiem, celles qui n’en donnent pas », explique-t-il.
Une fois sur le lieu, ces journalistes cherchent à rentrer en contact avec le chargé de communication. Une fois cela fait, ils cherchent à avoir la liste sur laquelle les journalistes écrivent leurs noms pour avoir le communiqué final (perdiem). « Il y a des événements où on sait pertinemment qu’on aura de l’argent. Généralement quand la Minusma organise des événements, rares sont les journalistes qui y vont car, là-bas, même ceux qui sont invités ne gagnent rien», a-t-il dit.
Le choix d’un non-choix
Pour survivre face à cette précarité, ils sont obligés d’aller à l’encontre de l’éthique et de la déontologie. « L’éthique et la déontologie, c’est quand on n’a pas faim. » se moque A. B., son confrère assis à côté de lui. Pour survivre dans ce milieu, poursuit-il, il faut faire ces pratiques peu orthodoxes. « Nous sommes obligés de faire de la communication pour des hommes politiques pour ne pas dire de la publicité », lance-t-il.
« Cela dit, il faut toujours s’arranger pour être du bon côté, donc après IBK, nous avons été obligés d’approcher d’autre politiques pour pouvoir nous en sortir car ce métier ne nous aide pas du tout. Grace à ces pratiques, certains d’entre nous gagnent beaucoup d’argent par mois, d’autres deviennent chargés de communication de ces politiciens, une fois que ce dernier a un poste dans un gouvernement ».
Selon M. C., ce n’est pas seulement les politiciens qui les poussent à ces pratiques. « Il y a aussi les opérateurs économiques, les syndicalistes … ». Dans cette jungle, il y da es journalistes qui sont devenus ennemis, chacun cherchant juste à défendre celui qui le finance : « Certains confrères ne me parlent plus parce qu’on ne défend pas les mêmes personnes », dit M. C.
C’est dans le désespoir de ne pouvoir vivre de sa passion que M. C. est obligé de s’adonner à cette vie pour nourrir sa femme et ses deux enfants.
Aly Diabaté
(stagiaire)