Guerre informationnelle : La presse malienne désarmée par les décideurs politiques face à la concurrence internationale

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Le Centre d’études stratégiques a organisé le 18 novembre 2023 une  conférence de haut niveau sur la guerre informationnelle. Ce fut un grand rendez-vous avec d’éminents experts de la politique et du monde des médias. Il ressort que l’information reste déterminante dans la gestion d’une crise, d’un conflit à cause de son impact sur les différentes opinions (nationale et internationale). Paradoxalement, au moment où elle doit être un véritable bouclier pour l’armée fréquemment visée par des campagnes d’intoxication médiatique, la presse malienne (les médias traditionnels notamment) est totalement délaissée par les autorités qui ont jeté leur dévolu sur les réseaux sociaux et les propagandistes qui la desservent le plus souvent au lieu de la servir.

«Le combattant qui l’emporte est celui qui gagne la campagne de l’information. Nous en avons fait la démonstration au monde : l’information est la clef de la guerre moderne, stratégiquement, opérationnellement, tactiquement et techniquement» ! Telle est la confession faite par Glen Otis, Général U.S. Cela nous replonge au cœur de la guerre informationnelle qui était au cœur d’une conférence de haut niveau organisée par le Centre d’études stratégiques le 18 novembre 2023. En effet, «Guerre informationnelle : Défis et enjeux» était le thème de cette conférence animée par d’éminents panélistes comme Mme Aminata Dramane Traoré, Gaoussou Drabo, Abdoulaye Diop, Mme Diarra Fatoumata Sidibé, Général Amadou Lamine dit Laurent Mariko, Jules Domche, Colonel-major Souleymane Dembélé, Moussa AG Acharatoumane…

Pour le patron de la Direction de l’information et des relations publiques des armées (DIRPA), Colonel-major Souleymane Dembélé, cette guerre informationnelle a toujours existé et avait un moment réussi à désarmer l’armée malienne en anéantissant toutes ses capacités de réaction, de prévention et d’intervention. Et les Forces armées maliennes (FAMa) se sont encore retrouvées la cible d’une véritable campagne de désinformation dans les médias occidentaux et sur les réseaux sociaux depuis qu’elle a affiché de prendre le contrôle de toutes les emprises libérées par la Minusma.

Fermant les yeux sur les exactions (cibles civiles, utilisation des enfants…) des Groupes armés terroristes (GAT), les ennemis de la République ont voulu réduire toutes les victoires de nos Forces de défense et de sécurité (FDS) en une campagne de règlement de compte racial. Ainsi, dans un premier temps, certains médias internationaux avaient récemment relayé que tous les habitants de peau blanche de Kidal ont fui la ville avec l’arrivée des FAMa, le 14 novembre 2023. Plus tard, ces mêmes médias informent que les mêmes FAMa ont exécuté «des peaux blanches».

«C’est de ça qu’il s’agit» quand ont parle de guerre informationnelle, a rappelé le Colonel-major Souleymane Dembélé intervenant lors de la conférence de haut niveau organisée le 18 novembre 2023 par le Centre d’études stratégiques. Et de regretter, «c’est avec des connotations pareilles que ces médias ont pu même diviser la population malienne en pro-FAMa et anti-FAMa». Il a rappelé que ces mêmes médias avaient tout fait et étaient arrivés à mettre dans la tête de tout le monde que «le Mali n’a pas d’armée. Que notre armée n’est pas professionnelle. Qu’elle ne sait que fuir».

«Nous devons condamner avec la plus grande fermeté tout propos haineux, raciste qui divise les Maliens. Ce pays est un pont entre l’Afrique blanche et l’Afrique noir, c’est cela l’une de nos richesses, de nos forces…», a pour sa part défendu Moussa AG Acharatoumane, membre du Conseil national de transition (CNT) et Secrétaire général du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA).

L’éternelle quête de meilleures perspectives face à la guerre de l’information

Avec d’illustres panélistes, cette conférence de haut niveau a été à hauteur de souhait. Sans avoir des avis totalement tranchés, chaque conférencier a diagnostiqué les défis de la guerre informationnelle à son niveau avant de proposer des portes de sortie en fonction des enjeux. «Aujourd’hui, en tant que Malien, nous devons nous demander comment aller plus loin dans la recherche d’alternatives dans cette guerre de l’information», a souligné Mme Aminata Dramane Traoré, essayiste et analyse des relations nord-sud. «La guerre informationnelle a les mêmes principes de planification qu’une guerre classique», a aussi rappelé  le Général Amadou Lamine dit Laurent Mariko, chef d’état-major particulier du président de la Transition.  Et à son avis, «le défi majeur aujourd’hui, c’est le contrôle de l’opinion publique». Pour Jules Domche, journaliste et patron de la Chaîne TV Vox Africa, pour «parvenir à contrôler un Etat, il faut contrôler son opinion publique à travers les médias». C’est pourquoi sans doute la France est en train de remuer ciel et terre pour faire revenir ses médias de propagande et de lavage de cerveaux (RFI et France 24) au Mali.

«Il est capital de renforcer la capacité de nos médias nationaux et de travailler en synergie avec les médias de la sous-région», a préconisé Mme Diarra Fatoumata Sidibé, avocate et cheffe d’entreprise. C’est malheureusement à ce niveau que le bât blesse dans notre pays. Les journalistes maliens (dans leur majorité) se sentent orphelins dans l’univers impitoyable  de l’information. Par complexe ou par manque de confiance, les médias internationaux (qui desservent aujourd’hui notre pays parce qu’il a décidé de reconquérir sa souveraineté) ont été toujours privilégiés par nos cadres, nos décideurs politiques dans l’accès à l’information, officielle et officieuse.

Pour un journaliste malien, c’est la croix et la bannière pour recouper une information de la moindre importance alors que les correspondants étrangers sont appelés par les mêmes sources pour leur filer des informations sensibles et souvent confidentielles. En tout cas, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, M, Abdoulaye Diop, est conscient que «le rôle des médias et leur influence dans la construction des opinions publiques sont cruciaux, y compris dans la perception que l’on se fait d’un Etat». Et d’ajouter, «qu’il s’agisse donc des médias classiques, qui jouissent d’un certain niveau de crédibilité, ou d’autres modes modernes de diffusion de l’information, il est une constance que l’information est une matière fondamentale des relations internationales».

Comment alors, dans cette guerre informationnelle, les médias locaux peuvent-ils être d’une quelconque utilité au pouvoir ou à l’armée, comme l’a souhaité Gaoussou Drabo (journaliste, ancien ministre et ancien ambassadeur) ? Et surtout que, a souligné Jules Domche (journaliste et patron de la Chaîne TV Vox Africa) «la communication, l’information est un instrument de domination». Dans notre pays, on cherche le plus souvent à manipuler la presse pour des ambitions personnelles et non pour défendre la patrie des attaques visant à ternir son image. Utiliser l’information comme instrument de domination ?

L’ancien Premier ministre Boubou Cissé l’avait déjà compris. En effet, après sa nomination à la Primature, il a tout fait pour anéantir la presse privée. Et, au même moment, il n’a pas lésiné sur les moyens pour faire émerger des groupes de médias qui lui sont totalement acquis et sur lesquels ils comptaient s’appuyer pour réaliser ses ambitions politiques. Malheureusement, si Moctar Ouane (le premier chef du gouvernement de la transition) avait fait des efforts louables pour amener tous les médias nationaux à se sentir impliqués dans la synergie nationale souhaitée face aux défis de la transition, son successeur s’est plutôt attaché les services des vidéastes qui ne s’embarrassent pas d’éthique ou de déontologie pour réduire ses adversaires et ses détracteurs à néant.

Ce n’est pas en étouffant financièrement les médias nationaux qu’on tirera d’eux le meilleur profit dans cette guerre informationnelle dont on ne pourra plus faire l’économie à cause de  nos choix politiques, économiques, diplomatiques… Au contraire, cela fait qu’ils ne sont plus à l’abri de la tentation de mettre leurs plumes, leurs micros et caméras au service du plus offrant, fut-il ennemi de la République.

Si la presse était au cœur de toutes les attentions avec les présidents Alpha Oumar Konaré et feu Amadou Toumani Touré, tel n’est plus le cas ces dernières années. Elle est aujourd’hui une laissée pour compte. A juste titre ? Il faut quand même saluer cette initiative du Centre des études stratégiques a donné lieu à des échanges de haut niveau !

Moussa Bolly

 

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2 COMMENTAIRES

  1. “Pour Jules Domche, journaliste et patron de la Chaîne TV Vox Africa, pour «parvenir à contrôler un Etat, il faut contrôler son opinion publique à travers les médias». C’est pourquoi sans doute la France est en train de remuer ciel et terre pour faire revenir ses médias de propagande et de lavage de cerveaux (RFI et France 24) au Mali.”

    Qu’elle remue ce qu’elle veut, la France. Ses médias de propagande doivent être empêchés de sévir au Mali.

    Quant à la presse et aux médias “officiels” maliens, elle est malheureusement devenue en grande partie médiocre et de bas niveau. C’est pourquoi les “vidéomen” et aux autres “activistes” sur les réseaux sont autant suivis et appréciés. C’est en rehaussant la qualité de leurs publications que ces médias officiels pourront attirer vers eux le public malien, pas en dénigrant les vidéomen et les réseaux sociaux qui sont un phénomène mondial et une tendance lourde en matière d’information.

    Enfin, ce qui me choque beaucoup en matière de désinformation au Mali, c’est le fait qu’aucune autorité administrative ou commission parlementaire n’a à ce jour mené une enquête fouillée et publié un rapport détaillé sur les campagnes de désinformation et de propagande de la France, en particulier à travers ses services dits de renseignement et ses trolls sur les réseaux sociaux, y compris sur des forums maliens comme Mali-web et Mali-jet sur lesquels ils pullulent.

    • Il faut migrer vers la Corée du nord mon cher ….. un seul média
      Ou en Russie ou tous les médias sont contrôlés par l’Etat
      Ou en Iran ou Syrie

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