Dans les médias, la rétrospective 2015 bat son plein. Mais une chose est sûre, cette rétrospective ne sera bouclée qu’au soir du 31 décembre après les douze coups de minuit. Une lapalissade, me diriez-vous ! Mais elle a tout son sens, car les forces qui agissent sur l’actualité seront à l’œuvre chaque seconde de chaque jour de l’année. Rendons-nous au Sénégal où, j’imagine, les grands éditorialistes avaient déjà baissé les rideaux, attendant tranquillement, comme tout le monde, l’heure des réjouissances et festivités de Noël et de la Saint-Sylvestre. Les révélations du journal Le Monde viennent de couler leur plan et, du coup, provoquer un séisme retentissant. En effet, face aux enquêteurs de l’Office central de lutte contre les infractions financières et fiscales, le sénégalais Lamine DIACK, ancien patron de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF), a dévoilé avoir reçu 1,5 million d’euros de la Fédération russe d’athlétisme destinés à une campagne pour battre l’ex-président Wade lors de l’élection présidentielle sénégalaise de février 2012. En échange, Lamine Diack s’est engagé à couvrir les pratiques de dopage de la Russie et retarder des suspensions d’athlètes russes. Rien moins que ça ! Au pays de la Teranga, on imagine bien que le soufflet ne risque pas de retomber de sitôt. Au Mali, sans être IPSOS, BVA, SOFRES ou quelque autre institut de sondage à la notoriété établie, on peut conclure, sans risque aucun de se tromper, qu’un trio d’évènements a dominé l’actualité en 2015. Il s’agit de la signature de l’accord de paix pour la réconciliation nationale (15 mai 2015) et de son parachèvement (20 juin 2015) ; de la bousculade de Mina à la Mecque qui a fortement endeuillé le pays et de l’attaque terroriste contre l’Hôtel Radisson Blu de Bamako (du 20 novembre 2015). Ces évènements ont affolé la blogosphère malienne et mériteraient bien que des chercheurs y consacrent leur science. Au Burkina Faso voisin, l’évènement de l’année aura été, à n’en pas douter, la fabuleuse mobilisation républicaine pour faire échec à la forfaiture du RSP emmené par le Général Gilbert Diendéré, auteur, selon la presse, du «coup d’Etat le plus bête du monde ». Ce qui fait tristement chorus au « coup d’Etat le plus inutile du monde » perpétré au Mali par un ubuesque Capitaine-Général d’opérette, Amadou Haya Sanogo. Et que dire de ces arrestations d’officiers supérieurs opérées le 17 décembre dernier au Niger, au motif que ceux-ci tentaient de renverser le régime du Président démocratiquement élu, Mahamadou Issoufou ! Là aussi, incontestablement, c’est l’évènement de l’année qui coiffe au poteau la lutte implacable contre la secte Boko Haram. Cette tentative de putsch risque d’impacter fortement les scrutins présidentiel et législatif que le Niger organisera à partir du 21 février 2016. Du pain béni pour les réseaux sociaux ! Au bord de la Lagune Ebrié, plus que le « un coup K.O. » d’Alassane Ouattara à la présidentielle du 25 octobre 2015, c’est le mandat d’amener délivré par la juge d’instruction française Sabine Khéris à l’encontre du président du Parlement de Côte d’Ivoire, Guillaume Soro, alors qu’il séjournait en France dans le cadre de la COP21, qui fait des vagues. Les réseaux sociaux ivoiriens qui avaient tendance à s’assoupir un peu se sont brusquement réveillés et enflammés. Même après le rétropédalage de Mme Khéris, la blogosphère ne manquera pas de grain à moudre jusqu’en 2016. En Guinée-Conakry, la réélection du Pr. Alpha Condé tient le haut du pavé dans une actualité quelque peu morne marquée, entre autres, par les soubresauts de la crise politique et la psychose consécutive à l’épidémie de la fièvre hémorragique à virus Ebola. A la pointe Sud du continent, le pays du très respecté Nelson Mandela a son évènement de l’année, lui-aussi, dans la dernière ligne droite. Il s’agit des trois remaniements ministériels aux Finances en quatre jours opérés par Jacob Zuma, et qui restent en travers de la gorge des Sud-Africains. Conséquence, ceux-ci sont sortis massivement au milieu de la semaine dernière pour crier tout le mal qu’ils pensent de leur président et d’une classe politique traditionnelle corrompue jusqu’à la moelle. Ils ne demandent pas moins le départ de Zuma très affaibli par une succession de scandales de corruption alors que l’économie du pays est au plus mal. Là aussi, les réseaux sociaux ont joué au catalyseur du courroux populaire. Enfin, dans sa rétrospective 2015 en France, Twitter met au coude à coude les attentats de janvier à Charlie Hebdo et ceux du 13 novembre dernier ayant fait un carnage au Bataclan et à Saint-Denis. Selon cette rétrospective, les mots-clés « #CharlieHebdo » et « #JeSuisCharlie » ont été les hashtags les plus utilisés en France en 2015. Et la palme revient à François Hollande avec ce tweet du 13 novembre 2015 : «Face à l’effroi, il y a une Nation qui sait se défendre, sait mobiliser ses forces et, une fois encore, saura vaincre les terroristes ». Retweeté 58.748 fois, le tweet de François Hollande est labellisé, en France, le tweet de l’année. Inutile de vous dire que l’année 2015 ne s’avoue ni vaincue ni encore moins enterrée, et pourrait bien réserver la surprise du chef.
Serge de MERIDIO