Soumeylou Boubèye Maïga

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Question : Monsieur Soumeylou Boubèye Maïga, vous étés candidat à l’élection présidentielles. Quelles sont les motivations profondes qui vous ont incité à briguer la magistrature ?

Soumeylou Boubèye Maïga : J’ai inscrit ma candidature dans un devoir de mémoire et une obligation de fidélité envers la lutte pour une société démocratique et de progrès pour tous, dans laquelle, je suis engagé depuis quasiment toujours. Ayant fait le constat d’un déficit de perspective lié d’une part au recul des principes démocratiques et républicains, d’autre part à la détérioration profonde des conditions de vie de la grande majorité de nos concitoyens, j’ai estimé que je peux fédérer les énergies pour contribuer à changer la vie de ceux qui souffrent le plus, à refonder le compromis social sur les valeurs démocratiques et républicaines. Rompant ainsi avec une gouvernance erratique et redonnant confiance en notre capacité collective à bâtir une société juste, solidaire en mouvement vers l’avant au bénéfice du plus grand nombre.
 
Question : De quel projet êtes-vous porteur pour le Mali ?

Soumeylou Boubèye Maïga : Les axes majeurs de mon projet portent sur la démocratie, la liberté, la justice et la solidarité. Ces axes induisent :
• une gouvernance reposant sur un État de droit, la liberté et la responsabilisation pleine et entière des citoyens et des collectivités territoriales.
• la renaissance de l’autorité et de l’impartialité de l’Etat, la réhabilitation de la mission de service public et le renforcement de la morale et de l”éthique publiques.
• la reconnaissance du pluralisme de notre nation, ouvrant ainsi la possibilité d’aménager, sur la base de la loi, des conditions dérogatoires au bénéfice de collectivités territoriales et de groupes sociaux destinées à rattraper des retards liés à l’histoire et/ou à la géographie.
• promouvoir une politique de solidarité renforcée mettant à la disposition de tous les Maliens un Minimum Social Commun, comportant l’eau, l’éducation et la santé de base, sans lequel toute politique de développement est vaine.
• organiser une nouvelle dynamique d’efficacité économique, d’équité territoriale et d’émergence de pôles économiques régionaux compétitifs au plan interne et externe.
• garantir les droits et libertés des Maliens de l’extérieur et œuvrer à leur implication dans le développement économique du pays à travers l’amélioration du cadre juridique d’investissement de leur ressources.

Question : La demande sociale est une donnée importante dans notre pays. Pensez-vous que les politiques menées jusqu’ici sont bonnes ou allez-vous en proposer de nouvelles ?

Soumeylou Boubèye Maïga : L’acuité de la demande sociale me conforte dans l’idée que la générosité affichée d’une politique ne suffit pas à en assurer ni la mise en œuvre ni le succès. Il faut une volonté et une capacité réelles, un souci d’efficacité et de crédibilité. Les politiques actuelles pèchent par leur inefficacité parce qu’elles ne se donnent pas les moyens d’atteindre les objectifs proclamés, demeurant captives de pratiques centralisatrices et bureaucratiques ainsi que d’intérêts particuliers.

On ne peut pas expliquer autrement la persistance voire l’aggravation de la précarité, de la pauvreté et de l’exclusion de la grande majorité des Maliens dans l’accès à l’eau, à la santé et à l’éducation entre autres pour lesquels le pays dispose de ressources importantes et d’un cadre législatif et réglementaire adéquat.
Cela pose un réel problème de crédibilité du discours politique quand on constate par exemple que les pauvres achètent l’eau 10 à 20 fois plus cher sans qu’aucun mécanisme de correction ne soit mis en œuvre.
Tous ces secteurs de proximité doivent être gérés par les exécutifs locaux qui deviendraient par là-même des prestataires de services effectifs au profit des populations. De même que l’effort de solidarité nationale doit être dispensé dans le respect strict de l’impartialité de l’Etat et de la puissance publique en général, sans considération partisane comme cela a été malheureusement souvent constaté.

Question : La nécessité d’une plus grande représentativité des femmes au niveau des prises de décision, semble rallier les suffrages même si la proposition d’introduire des quotas dans la loi électorale a été rejetée par l’Assemblée Nationale. Que comptez vous faire personnellement pour la promotion politique de la femme ?

Soumeylou Boubèye Maïga : J’engagerai une révision de la constitution qui permettra notamment, par une modification du mode de scrutin, d’assurer une représentativité politique des femmes reflétant mieux leur poids dans la société, leur implication et leur dynamisme dans la vie nationale.

Question : L’insurrection armée à Kidal et Ménaka et le forum de Kidal ont rappelé la spécificité de la situation dans le Nord du pays. Au cas où les Maliens vous accorderaient leur confiance, que comptez-vous faire pour le développement des régions du Nord et la consolidation durable de la paix dans cette partie du pays ?

Soumeylou Boubèye Maïga : Je pense que la prise en compte des spécificités des régions du Nord doit reposer sur la loi. C’est à ce prix que les dérogations accordées seront acceptées par toute la nation et ne seront pas perçues comme une prime à la révolte, d’autant plus que la loi pourrait s’appliquer ailleurs. Et que les stratégies de développement des régions en question pourront être envisagées avec sérénité, dans la durée, sans être enfermées dans un calendrier irréaliste dont la non exécution peut donner lieu à de nouvelles explosions.

C’est pourquoi j’adhère à l’idée de République une et indivisible mais plurielle à l’intérieur de laquelle les collectivités territoriales peuvent bénéficier de discriminations positives pour rattraper des retards liés à l’histoire et à la géographie, et permettre l’épanouissement des particularismes et spécificités. C’est pourquoi j’ai aussi l’intention d’ériger les régions du Nord en Zones Économiques Spéciales en y appliquant le volet Zones Franches du code des investissements pour y développer une plus grande activité économique et y promouvoir l’emploi salarié.

J’en ferai également des régions pionnières dans le cadre de l’accélération du processus de décentralisation. L’objectif est de renforcer avant la fin de l’année leurs capacités administratives et financières pour en faire des prestataires de services au bénéfices des populations, permettant par la même occasion aux élus et aux leaders de bâtir une légitimité sur leur capacité de management et l’impact de leur gestion sur la vie des populations.

C’est là pour moi la meilleure réponse à la fois aux revendications des populations et à notre attachement à la préservation de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale ainsi qu’à la nécessaire re-fondation d’un État réconcilié avec les citoyens et à l’exigence de démocratisation de la gestion des affaires publiques.

Question : Nous avons une communauté importante résidant à l’étranger. Quels sont vos projets pour les Maliens de l’extérieur ?

Soumeylou Boubèye Maïga :
• Garantir leurs droits et leurs libertés dans le cadre d’accords bilatéraux et multilatéraux de libre circulation et de droit au séjour, en dénonciation de la tendance actuelle à la criminalisation des flux migratoires.
• Promouvoir des politiques incitatives d’investissement et de sécurisation de leurs ressources dans le développement économique et social du pays.

Question : Si vous êtes élu, quelles mesures prendrez-vous en priorité dans les 100 premiers jours de votre mandat ?

Soumeylou Boubèye Maïga : Mes mesures prioritaires porteront sur la satisfaction de la demande sociale et la mobilisation de l’ensemble de la nation dans la lutte contre la précarité et l’exclusion.
• Réduire de moitié les prix des céréales en utilisant au besoin les ressources issues des fonds PPTE dont la vocation est de contribuer à la lutte contre la pauvreté, donc à faciliter notamment l’accès à l’alimentation.
• Convoquer un Forum sur le Minimum Social Commun (Eau- Education -Santé) en vue de rendre effective la gestion des secteurs concernés par les Mairies à partir de la rentrée scolaire 2007-2008.
• Proclamer l’Education, Grande Priorité Nationale.
• Accorder une allocation à tous les enfants de 0 à 18 ans sans considération de la situation salariale des parents pour couvrir l’accès gratuit à l’école et à la santé de base.
• Fixer un prix unique de l’eau au consommateur final sur l’ensemble du territoire.
• Engager les concertations pour recruter dans la Fonction Publique Territoriale tous les jeunes contractuels.

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Soumeylou Boubèye Maïga est né le 8 juin 1954 à Gao où il obtint son diplôme d”études fondamentales (DEF) en 1970. Orienté au lycée de Badalabougou (série philo-lettres), il a passé la deuxième partie du baccalauréat en 1975, avant de s”inscrire au Centre d”études des sciences et techniques de l”information (CESTI) de l”Université de Dakar. Titulaire d”un diplôme supérieur de journalisme après trois années d”études, Soumeylou Boubèye Maïga rentre au bercail. Embauché dans la Fonction publique, il est affecté à l”Essor puis au journal Sunjata dont il assuma la rédaction en chef de 1980 à 1990.

Entre-temps, il s”est inscrit en 1986 à l”Université de Sceaux (Paris sud) où il obtint un diplôme d”Études supérieures spécialisées (DESS) de diplomatie et administration des organisations internationales en 1987. Parallèlement, il a suivi des cours à l”Institut international d”administration (IIAP) de Paris où il décrochera un diplôme de relations économiques internationales.

Après les événements de mars 1991, Soumeylou Boubèye Maïga entre au cabinet du président du Comité de transition pour le salut du peuple (CTSP) Amadou Toumani Touré, en qualité de conseiller spécial d”avril 1991 à juin 1992. Il devient en 1992, chef de cabinet du président de la République Alpha Oumar Konaré, nouvellement élu.
En janvier 1993, il est nommé directeur général de la Sécurité d”État. Un poste qu”il occupera jusqu”en février 2000. Il fut ensuite, jusqu”en 2002, ministre de la Défense et des Anciens combattants.

Soumeylou Boubèye Maïga a dirigé le Comité d”organisation du sommet des chefs d”État et leaders de la Communauté des États sahélo-sahariens tenu à Bamako en 2004.

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