Présidentielles de 2007 : IBK compare ATT à un “dictateur”

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En campagne depuis son investiture par son parti le 28 janvier 2007 pour la conquête de la Magistrature Suprême du Mali, le président du RPM, M. Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) accorda une interview au confrère de Jeune Afrique n°2406 du 18 au 24 février 2007. Dans l’interview en question, le premier candidat déclaré dans la course pour Koulouba, symbole de la présidence de la République du Mali, affiche d’emblée sa crainte face au président Amadou Toumani Touré (ATT) considéré comme son principal rival, au cas où celui-ci briguerait un second mandat. Dans sa fuite en avant, IBK se considère déjà comme un vaincu, selon un politologue de l’Université de Bamako. C’est pourquoi il accuse pêle-mêle ATT de vouloir tropicaliser la démocratie malienne, d’être un régionaliste, de vouloir instrumentaliser les institutions de la République, d’avoir des pratiques qui n’ont rien à envier aux pires dictatures. Mais au juste, entre IBK et ATT qui est dictateur et qui ne l’est pas?

IBK SE RENIE

Se prononçant sur le bilan des cinq ans de gestion du président ATT et de son gouvernement dont IBK et son parti, le RPM sont comptables depuis 2002 jusqu’à ce jour, voici ce qu’affirme IBK : “Nous n’avons jamais demandé à faire partie du gouvernement, on nous a suppliés d’y aller. Le RPM n’y dispose que d’un seul représentant. Que peut un seul ministre dans une équipe qui en compte vingt-cinq? Notre présence au sein de l’exécutif est le produit de notre soutien à un candidat qui briguait, en 2002, la magistrature suprême, elle est donc tout à fait justifiée. Mais si notre décision de présenter un candidat à la présidentielle déplaît et qu’elle doit entraîner notre départ du gouvernement, que le chef de l’Etat sortant en prenne la responsabilité. Ce n’est pas à notre ministre de se démettre. Le président de la République peut procéder à un remaniement si cela lui convient, mais s’il le fait, cela ne manquera pas de soulever de multiples interrogations. Comment peut-il nommer un nouveau gouvernement à deux mois d’une élection sans que cela ne soit interprété comme une volonté de distribuer des prébendes aux partis politiques soutenant sa candidature pour un deuxième mandat? Vous m’aviez demandé quelles étaient mes craintes pour la démocratie malienne, je vous réponds: sa tropicalisation”.

Le candidat Ibrahim Boubacar Keïta, en soutenant de tels propos aujourd’hui, ne se renie-t-il pas quand on sait que son parti, le RPM a participé aux trois gouvernements qui se sont succédés du 22 juin 2002, date de la formation de son premier gouvernement au 28 avril 2004, date de la formation de son troisième et dernier gouvernement? Au premier gouvernement du Premier ministre Ahmed Mohamed Ag Hamani, la 1ère vice-présidente du RPM, Mme Keïta Rokiatou N’Diaye fut ministre de la Santé; Lancéni Balla Keïta fut ministre de l’Equipement et de l’Aménagement du Territoire au nom du RPM. Ce premier gouvernement du Premier ministre Ahmed Mohamed Ag Hamani fut appelé gouvernement de mission.

Au deuxième gouvernement d’ATT datant du 16 octobre 2002, toujours avec comme Premier ministre Ahmed Mohamed Ag Hamani, Mme Keïta Rokiatou N’Diaye du RPM a conservé le poste de ministre de la Santé, tandis que Nancoma Keïta a fait son entrée au gouvernement au nom du RPM, en tant que ministre de l’Environnement. Ousmane Amion Guindo devient pour la première fois ministre Délégué auprès du ministre de l’Equipement et des Transports, chargé des Transports.

Au troisième gouvernement du président ATT à partir du 28 avril 2004, Ousmane Issoufi Maïga qui était ministre de l’Economie et des Finances au premier gouvernement dit de mission et ministre de l’Equipement et des Transports au deuxième gouvernement accéda à la Primature en tant que Premier ministre. Nancoman Keïta du RPM devient de l’Environnement et de l’Assainissement. Et c’est lui qui assure l’intérim du Premier ministre en cas d’empêchement ou de déplacement de ce dernier, soit à l’intérieur ou à l’extérieur du pays. Depuis le 28 avril 2004, Mme Maïga Zeïnab Mint Youba du RPM occupe le poste de ministre de la Santé en remplacement de Rokiatou N’Diaye issue du même parti.

Le 20 juin 2005, le président ATT procéda à un réamenagement technique de son gouvernement; mais il faut préciser que ce réaménagement n’a pas concerné les ministres issus du RPM. En récapitulatif, en cinq ans de gestion consensuelle du pouvoir par ATT, le parti d’IBK a participé à tous les gouvernements successifs. Ainsi, Mme Keïta Rokiatou N’Diaye, Lancéni Balla Keïta, Ousmane Amion Guindo furent ministre au nom de leur parti le RPM. Aujourd’hui encore, Nancoman Keïta est ministre au nom du RPM dans le gouvernement; et l’actuelle ministre de la Santé Mme Maïga Zeïnab Mint Youba a fait son entrée dans le gouvernement au nom du RPM qu’elle vient de quitter. Donc, que le président du Rassemblement Pour le Mali tienne de tels propos en période électorale est incompréhensif.

LES THEMES DE CAMPAGNE DU RPM

Le discours va-t-en guerre tenu par des caciques du RPM au lendemain de la signature de l’Accord d’Alger entre le gouvernement malien et les rebelles touaregs et qui a mis fin aux tentatives de soulèvement armée au Nord du Mali le 23 mai 2006 a provoqué un grand bruit. Heureusement que le feu de paille provoqué par le RPM n’a pas duré. Et, dans les précédentes parutions, JEUNE AFRIQUE a bien témoigné que la mise en oeuvre de l’Accord d’Alger est sur la bonne voie, le cantonnement des bélligérants est en phase d’achèvement; toutes les structures prévues par ledit Accord sont opérationnelles.

Malgré ces acquis, IBK persiste et signe dans JEUNE AFRIQUE n°2406 du 18 au 24 février 2007 que “le contenu de ces accords pose deux problèmes : ils ne garantissent aucunement la paix, d’une part, d’autre part, ils exposent la communauté touareg à une stigmatisation, voire à une marginalisation. Les problèmes du Nord sont bien réels, et le déficit de développement y est criant. En aucun cas, les Accords d’Alger ne constituent une réponse adéquate”. Quelle alternative le RPM d’IBK propose pour le développement du Nord-Mali et avec quels moyens ? Tout porte à croire que l’Accord d’Alger sera au centre de la campagne du RPM. Il faut ajouter à cela l’éducation scolaire, l’agriculture.

Le candidat du Rassemblement Pour le Mali peut-il mieux proposer aux Maliens que ce que ATT a entamé par rapport à la souveraineté alimentaire du Mali? La Loi d’Oriientation Agricole initiée par ATT et votée par l’Assemblée Nationale à l’unanimité des députés dont ceux du RPM en août dernier est considéré par les observateurs et les spécialistes du domaine comme étant le début de la révolution verte au Mali. IBK peut-il mieux proposer ?

IBK ET LE DOSSIER SCOLAIRE

Dans le domaine de la gestion de l’éducation, l’opinion nationale garde un triste souvenir du passage d’IBK à la Primature. En six ans de gestion (1995-2000) durant lesquels il était Premier ministre, qu’est-ce qu’il n’a pas fait ? Emprisonnement des leaders estudiantins, fermeture des établissements secondaires et supérieurs, entre autres.

Ce fut tout simplement une triste histoire qu’il est difficile d’oublier. D’ailleurs, pour mieux matter les scolaires et les étudiants, IBK, alors Premier ministre créa une unité spéciale anti émeute au sein du Groupement Mobile de Sécurité de la Police nationale que l’on appela les “Nindja” ou “Cobras”.

INCONTOURNABLE ET NON PAYANTE

Interrogé sur la stratégie électorale qu’il faut mettre en oeuvre avec les autres quand on sait qu’aucun candidat seul ne peut gagner, IBK déclare que la création du Front pour la Démocratie et la République (FDR) est surtout incontournable ; mais ne répond pas à la question de savoir si cette stratégie sera payante. Faut-il penser le contraire?

Daba Balla KEITA

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