De l’avis du célèbre chroniqueur de Jeune Afrique M. Béchir Ben Yahmed, Amadou Toumani Touré briguera un second mandat «sans risque sérieux». Et selon l’opposant malien déclaré, le Professeur Yoro Diakité, «ATT fera ses 10 ans». Pareilles déclarations ne sont certes pas de nature à contenter les autres prétendants, en l’occurrence Ibrahim Boubacar Keïta considéré à tort ou à raison comme un redoutable challenger. A l’analyse des faits cependant, ces pronostics ont de fortes chances de se concrétiser. Il est fort probable que le candidat ATT passe dès le premier tour. C’est l’histoire de David et de Goliath sauf que contrairement à la légende Biblique, le roi d’Israël ne vaincra pas pas cette foi-ci le grand Philistin d’un coup de fronde.
C’est dans son Editorial «Ce que je crois» que M. Béchir Ben Yahmed connu pour ses analyses pointues déclare ceci : «[…] En 2007, et dès le début de l’année, dans les deux pays de l’Afrique de l’Ouest ou la démocratie paraît la mieux établie, le Sénégal et le Mali, les deux présidents en place, Abdoulaye Wade et Amadou Toumani Touré, brigueront un second mandat sans risque sérieux, me semble-t-il de se voir récusés par le suffrage universel» (Jeune Afrique n° 2392 du 12 au 18 novembre 2006).
Naturellement, les paroles de BBY ne sont pas l’Evangiles, mais elles s’inspirent de faits réels auxquels il n’est pas seul à croire. Il estime que la démocratie malienne est mieux établie. Les Américains aussi le pensent. Raison pour laquelle justement, ces derniers ont accordé un financement de 244 milliards F CFA à l’Etat dans le cadre du Millenium Challenge Account. Les critères de sélection étaient la démocratie, la bonne gouvernance entre autres. Les Yankees, on le sait n’étant pas de nature à jeter l’argent par la fenêtre, sont certainement sûrs qu’un bon usage en sera fait et surtout, que la continuité de l’Etat avec le même acteur est garantie, du moins selon un raisonnement fort logique. Cette confiance semble être partagée par une grande partie de la Communauté Internationale d’où la visite de célébrités et un impressionnant ballet diplomatiques dans notre pays. ATT est en fin de mandat. C’est le moment que choisi la Gouverneure de Canada pour effectuer une visite ; la Communauté Internationale pour tenir une Conférence Internationale sur la Grippe Aviaire ; les responsables de la Banque Mondiale et du FMI entre autres. Il ne s’agit visiblement pas d’un hasard. Le regime actuel a su donner des assurances à la communauté et aux Institutions Internationales.
Naturellement, il est possible que les élections maliens ne partagent pas l’avis de l’opinion internationale puisque n’ayant pas les même préoccupations. Mais à l’interne, ATT joui là aussi, d’un bon aura. La Capitale Bamako n’est pas totalement pas acquise à sa cause. Ce phénomène est propre à presque toutes les Capitales politiques africaines généralement acquises à l’opposition. Le dernier cas en date est celui de Jean Pierre Bemba et de Joseph Kabila. A la faveur des récentes présidentielles congolais, l’un des plus grands fiefs du premier était Kinshasa. Ce qui n’a pas empêché le second de le battre avec une différence de plus de 2 millions de voix. Ici au Mali, pareil scénario s’explique aisément. Omettons délibérément le bilan de ATT bilan que même les Bamakois ne s’aventurent pas à attaquer au risque de passer comme un «Ba-Niyengo» (Vieux égoïste) aux yeux de l’opinion publique nationale. Focalisons-nous plutôt sur ces faits qui auraient dû constituer une entrave à sa réélection. Il s’agit du lancement du «Manifeste pour la démocratie», de la question du Nord, de la publication du livre «ATT-cratie, la promotion d’un homme et de son clan». Avec le recul, l’on se rend compte que ces questions n’ont pas donné le résultat escompté. «Le Manifeste» est presque tombé dans l’oubli. A propos de la question du Nord, on assiste à un renversement spectaculaire de la situation qui met l’Etat malien dans une position plutôt confortable comme pour dire que l’option choisie par ATT s’est avérée payante. Quant au «Sphinx», il semble avoir contribué à aider juste les indécis à se déterminer face au régime ATT. Et pour cause : chacun des deux camps (pro et anti ATT) a été renforcé dans sa conviction initiale. Les indécis par contre, ont pensé de part et d’autres qu’il faille maintenant choisir un camp selon qu’ils estiment que le «livre» est bon ou qu’il constitue un amas de mensonges et/ou un recueil digne de «Ba-Niyengo» car, faut-il le rappeler, l’auteur du document s’abstient de parler des réussites et des succès de l’homme. C’est le plus grand reproche que les puriste font à l’endroit du «Sphinx». Dans nos sociétés, avant d’adresser des blâmes publics à un homme, on évoque d’abord ses mérites.
C’est un fait : les facteurs qui auraient du constituer de graves entorses à la réélection de ATT n’auront été qu’une tempête dans un verre d’eau surtout à Bamako où, par la force des choses, se rencontrent tous les courants de pensées. En somme ici, tout candidat est susceptible de gagner des voix. Jamais les élections dans la Capitale n’ont été prépondérantes. Le jeu se fait donc ailleurs, là où le bilan de l’homme milite largement en sa faveur. Une question s’impose alors: à quand remonte la dernière tournée de IBK à l’intérieur du pays? Personne ne s’en souvient. En clair, depuis qu’il est au perchoir à Bagadadji, Ibrim n’a jamais, même une seule fois effectué une tournée dans le Mali profond. Hormis sa visite à Kayes et à Sikasso, à des intervalles différents, il n’a jamais daigné rencontrer ses militants de l’intérieur. Mais que faisait Amadou et Lobbo au même moment ? Le couple n’a jamais perdu le contact avec les électeurs à la base. «Ils sont en campagne depuis le 08 juin 2002» pensent certains. A cela, il faudra ajouter le soutien de grands partis politiques comme l’Adéma, l’Urd, très implantés à l’intérieur du pays.
Ici à Bamako où se tiendra samedi prochain le meeting d’information du RPM, en assistera certes à une forte mobilisation. Mais une chose est sure: quand bien même tous ces militants et sympathisants votaient (ce qui est fort improbable), ils n’inquiéteront pas l’adversaire du jour lequel espère plutôt remporter lesdites élections dès le premier tour. Peut-être que le veritable enjeu de ces élections se trouvent là.
B.S. Diarra
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