Rien ne va plus au sein de l’instance dirigeante de l’ADEMA, notamment entre le président Dioncounda Traoré et le premier vice-président, Soumeylou Boubèye Maïga. En effet, le premier a réussi à amener le parti lors de sa conférence nationale de novembre dernier à «transformer son soutien politique en soutien électoral à ATT au cas où ce dernier serait candidat à sa propre succession».
Le second ne se reconnaît pas dans cette décision et depuis, il n’a cessé de se démarquer de Dioncounda Traoré et de ses camarades. C’est dans cette logique que les clubs et associations qui portent son nom ont projeté d’organiser un meeting test de mobilisation le 25 novembre prochain. Cette annonce a effrayé les responsables de Bamako-coura et Dioncounda Traoré a vite fait d’adresser une lettre circulaire aux sections du parti pour les inviter à ne pas participer à cette manifestation. Dioncounda et ses camarades attendent impatiemment les déclarations que Boubèye va faire au cours de ce meeting pour lui infliger une sanction exemplaire. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le torchon brûle entre les deux premiers responsables de ce parti.
Dans une lettre circulaire, adressée aux secrétaires généraux des sections ADEMA de l’intérieur et de l’extérieur, diffusée par voie de presse et datée du 13 novembre, le président de l’ADEMA, Dioncounda Traoré a écrit : «depuis quelque temps, nous recevons des informations persistantes selon lesquelles nos structures, nos militantes et militants sont invités à participer à des réunions ou à des assemblées au nom soi-disant de l’ADEMA-PASJ. Le Comité Exécutif, suite à ces menées, demande à ses structures de base, à ses militantes et militants d’être très vigilants et de ne pas se laisser embarquer dans une aventure sans lendemain et en violation flagrante des décisions de notre dernière Conférence nationale. Nous demandons à nos militantes et militants de ne répondre à aucune invitation n’émanant pas du Comité Exécutif et signée du président du parti. Le Comité Exécutif de l’ADEMA/PASJ sait pouvoir compter sur votre engagement militant, votre vigilance et votre sagacité pour faire échec à ces agissements qui ne peuvent qu’affaiblir le parti et participent en fait de la volonté de certains de perpétuer l’indiscipline au sein du parti. Le Comité Exécutif vous invite à assurer une large diffusion de cette lettre».
La personne visée à travers cette correspondance est en fait le premier vice-président du parti, Soumeylou Boubèye Maiga. On sait que depuis plusieurs mois, le président du parti et le premier vice-président du même parti ne partagent pas la même analyse concernant la position du Parti Africain pour la Solidarité et la Justice par rapport à 2007.
Pour le premier, l’ADEMA ne possède pas une personnalité politique d’envergure, capable de compétir à la présidentielle avec la certitude de l’emporter. Et c’est ce qui a poussé Dioncounda Traoré à plaider la cause du président ATT lors des conférences régionales du parti, tenues l’année dernière dans les différentes capitales régionales du pays.
Le tout a été couronné par la Conférence nationale qui a «décidé de transformer son soutien politique à ATT en soutien électoral pour le scrutin présidentiel de 2007 au cas où il serait candidat à sa propre succession».
Cette position désormais officielle de l’ADEMA a été prise avec comme arrière pensée d’avoir le retour de l’ascenseur afin de ratisser large, lors des législatives qui vont suivre. Une manière de gouverner et de partager le pouvoir avec ATT et se positionner pour Koulouba en 2012.
Quant au premier vice-président, il avait battu en brèche cette thèse en démontrant que statutairement ATT ne peut pas être le candidat du parti de l’abeille puisqu’il n’est pas militant de cette formation politique et n’a jamais participé à une activité du parti. Soumeylou Boubèye Maiga estime qu’un parti comme l’ADEMA qui a exercé le pouvoir pendant 10 ans, avec à la clé des résultats bien appréciables, un bilan très positif, ne peut pas ne pas avoir un candidat à la présidentielle de 2007.
Pour lui, l’existence du parti est même liée à sa participation aux différentes élections. Il y va donc de sa survie et de son image. Maintenant, si le parti est battu au premier tour, il pourrait appeler à voter pour l’un des deux candidats retenus pour le second tour.
C’est pour cette raison que Boubèye se bat pour une candidature interne. D’où le meeting test annoncé pour le 25 novembre au palais de la culture par les clubs et associations qui portent son nom.
Au cours de cette rencontre ses «amis» dont la plupart sont militants ADEMA pourraient l’inviter à se présenter à la prochaine présidentielle. Et à lui de leur apporter une réponse. Boubèye pourrait immédiatement répondre à la doléance ou repousser celle-ci à une autre échéance en fonction de son agenda politique. En tout cas, au sein de l’instance dirigeante du parti, c’est la panique généralisée. «Boubèye veut affaiblir le parti pour ses ambitions personnelles en semant la pagaille dans les structures» disent les uns. «C’est de l’indiscipline caractérisée que le parti ne doit pas tolérer» affirment les autres. Il semble que Dioncounda Traoré et ses camarades n’attendent que ce meeting et les déclarations que fera Boubèye pour lui «infliger une sanction» qui pourrait, semble t-il, aller jusqu’à la radiation.
Comme on le constate, le torchon brûle entre Dioncounda Traoré et Soumeylou Boubèye Maiga. La situation est critique au sein de la ruche même si nombreux sont les responsables de ce parti qui pratiquent la politique de l’autruche en essayant de minimiser l’attitude du premier vice-président. ATT aura été le principal responsable de ce énième éclatement de l’ADEMA, lui qui était, semble t-il, venu pour renforcer les partis politiques.
Chahana TAKIOU
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