Au Mali, pouvoir et opposition veulent une présidentielle crédible

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"Takokelen" ou "Takaperen" ? Le président sortant peut-il gagner "d”un coup sec" dès le premier tour ou son challenger parviendra-t-il à le "mettre KO" pour s”imposer au deuxième ? Deux expressions bambaras résument, sur les affiches des deux principaux candidats, l”enjeu de l”élection présidentielle malienne du dimanche 29 avril.

Amadou Toumani Touré (ATT pour les Maliens), ex-général, héros de la conquête de la démocratie en 1991, prétend gagner dès dimanche le droit à exercer un second quinquennat. Ses adversaires, au premier rang desquels Ibrahim Boubakar Keita (IBK), président de l”Assemblée nationale, se font fort de lui imposer un second tour, affirmant que seule la fraude peut les en empêcher.

Jeudi et vendredi, les deux adversaires se sont succédé sur la pelouse du grand stade de Bamako rempli de jeunes partisans dépêchés par une noria de minibus verts. Même si le taux de remplissage du stade mesure d”abord les moyens matériels des candidats, la ferveur était nettement plus flagrante, vendredi soir, lors du meeting du président sortant. Pour une jeunesse aussi nombreuse (60 % des 13,5 millions de Maliens ont moins de 18 ans) que chroniquement désoeuvrée, la campagne électorale est l”occasion de faire le plein de tee-shirts, distribués par les candidats, et aussi d”espoir.

Au sortir de son 4×4, ATT a fait un tour de piste au rythme de la foule scandant l”acronyme de son nom. En levant la main, il a donné sa "parole de soldat et d”officier" d”apporter des solutions au "douloureux problème de l”emploi des jeunes" et décliné son "programme de développement où la santé, l”éducation et les infrastructures" figurent au premier rang. La veille, IBK avait raillé la médiocrité de l”école "où l”on travaille quatre mois par an". "Le Mali, avait-il grincé, n”est pas un pays pauvre, mais un pays pauvrement géré, sur la base de l”intérêt personnel."

Mais l”affrontement le plus vif a eu lieu à propos des "Maliens de l”extérieur", soit les quelque 700 000 électeurs émigrés (dont 100 000 en France). Le président Touré a été accusé de "ne pas protéger" les membres de cette diaspora (allusion aux expulsions de sans-papiers en France), dont les revenus font vivre une bonne partie du pays, et donc de ne "pas aimer les Maliens". "Personne ne peut prétendre aimer mieux les Maliens de l”extérieur que moi, a-t-il riposté, vendredi. L”émigration est une opportunité, pas un fardeau. Le Mali va la gérer dans ce sens."

Longtemps associés au pouvoir, les opposants tentent de dramatiser le vote. M. Keita a promis des lendemains "fébriles", si le scrutin n”était "pas propre". Il situe ainsi l”enjeu profond de dimanche : la crédibilité de l”élection présidentielle dans l”un des rares pays africains présenté comme un exemple de bonne "gouvernance".

Philippe Bernard
Article paru dans lӎdition du 29.04.07 (lemonde.fr)

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