Alliance pour le Recul de la Démocratie au Mali : Une nuée de partis mange-mil autour du banquet de la République

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Croyant se donner toutes les chances de se faire réélire en 2007, le président sortant, le général Amadou Toumani Touré, s’est affublé d’une pléthore de partis regroupés au sein d’une association de copinage pompeusement appelée "alliance pour la démocratie et le progrès" dont les principaux chefs, loin d’être des foudres de guerre, sont plutôt des adeptes de la politique du ventre.

Younoussi Touré, Dioncounda Traoré, Mountaga Tall, Choguel Maïga, pour ne citer que les plus en vue. Quatre larrons plus quelques figurants assis à la même table pour pérenniser le règne de l’ordre kaki et enterrer les partis politiques. Tous derrière un candidat indépendant, le peuple assiste, médusé, à un théâtre de marionnettes où les acteurs crient haro sur la démocratie et le multipartisme. On dirait des Raspcoutine à la Cour du tsar Nicolas II.
Pour expliquer leur acte d’allégeance, tous ont pris prétexte, comme l’a fait l’autre jour Me Mountaga Tall dans une apparition pitoyable à la télé que "ceux qui ont préparé et mangé ensemble le tô national n’ont plus le droit de déclarer que le plat n’est pas succulent" Tellement succulent que le tigre en chef, Choguel Maïga, a cru bon d’interdire depuis belle lurette à ses troupes de critiquer le régime. Si le poisson avait été partagé selon ce qui a été convenu avant la pêche, le RPM, qui est la première force politique à l’Assemblée, est bien placé pour dire qu’il est comptable de la gestion d’ATT.

Mais, contrairement à ses ex-alliés du CNID et du MPR qui justifient leur servilité par la détention d’un seul portefeuille ministériel, IBK a affirmé, à juste titre, que son parti n’a rien demandé au général et ne se sent donc pas, par conséquent, comptable de sa gestion.

Le CNID, un parti fantomatique

Qu’à cela ne tienne, quatorze chefs de partis politiques hara kiri, ont décidé d’aller au four avec ATT pour, en cas de victoire, s’inviter au grand banquet national l’an prochain. Ce faisant, ils ne se contentent pas de tuer leur propre parti politique mais, en même temps, ils mettent leur avenir politique derrière eux.

Ainsi, Me Mountaga Tall, cet opposant dur à cuir au temps de Alpha et l’un des grands acteurs de la révolution vient d’enterrer définitivement ses ambitions présidentielles. Il dément désormais la croyance populaire selon laquelle un des petits-fils d’El Hadj Oumar aura un grand destin national. C’est vrai que le CNID, contrairement à 1992, n’est plus que l’ombre de lui-même. C’est un parti exsangue, et extenué, amaigri par des saignées successives et qui ne respire plus que par son seul chef.

Celui qui est venu en troisième position à l’élection présidentielle de 1992, tout juste après feu Tiéoulé Mamadou Konaté, est rentré dans les rangs. Il n’est plus ce jeune loup aux dents longues et aux griffes acérées. Quand le vent tourne, Me Tall tourne. On dit qu’en politique seuls les imbéciles ne changent pas. La politique est un jeu d’intérêts, c’est le refrain en vogue à Bagadadji mais de là à friser l’insouciance.

Dioncounda, un président chômeur

En 2002 Dioncounda Traoré été laminé à la députation dans son propre fief à Nara. Le chômage lui pèse énormément et il est à la recherche du temps perdu. Quant à Choguel Maïga, la moutarde lui est montée au nez, à telle enseigne qu’il a maudit l’héritage honni de l’UDPM. Pour lui, Moussa ne fait plus recette. En fait le tigre, dans sa forêt, ne crie plus sa tigritude. Il est devenu tout simplement un des griots du régime.

A l’URD, l’ex-premier ministre, Younoussi Touré, est certes un homme respectable mais il ne fait qu’inaugurer les chrysanthèmes. Soumaïla Cissé, le parrain de cette formation, vient de déclarer qu’il n’est pas candidat à l’élection présidentielle de l’an prochain. Il préfère l’exil doré de Ouaga et gare au sous-fifre qui outrepasserait ses directives. Voilà, en gros, les quatre "ténors" décidés sous un habillage démocratique, à vendre leurs partis au plus offrant et dernier enchérisseur. Ils en attendent , bien sûr, des dividendes distribués sous forme de strapontins. Mais à l’Adema, le chef de file de l’Alliance pour le recul de la démocratie, combien de divisions?

Dioncounda ne doit pas rêver qui est débordé à gauche comme à droite par ses propres lieutenants. Le reste de la troupe est composé de gros outsiders, de jamais gagnants, de gagne- petits qui ne peuvent même pas avoir un siège à l’Assemblée nationale ! Ce sont des partis alimentaires à l’instinct de survie très développé qui ne vivent, comme Lazare, que des miettes tombées de la table du prince et dont les dignitaires se font entretenir par la cour.

BDIA et US-RDA: des partis fossiles

Le BDIA, après la disparition tragique de Tiéoulé Mamadou Konaté, est agonisant à cause de ses déchirements internes. L’US-RDA n’est plus ce parti d’avant-garde comme au temps de la révolution active et la reconstitution de la grande famille, malgré les efforts personnels de Badra Alou Macalou, n’est pas pour demain. L’UDD, malgré le dynamisme de Me Hassan Barry, est morte de sa belle mort.
Et c’est Tiéman Coulibaly, le fils du fondateur, qui se charge de l’enterrer. Ce n’est donc pas avec des cadavres ambulants qu’on va à une élection présidentielle.

Mais à y regarder de plus près, on se rend compte que mieux vaut se mettre à plat ventre que d’aller à l’humiliation. L’élection présidentielle en 2002 a montré le manque d’envergure de nos hommes politiques. Sur 24 candidats, à part ATT, Soumaïla Cissé, IBK et Tiébilé Dramé, tous ont récolté un score ridicule. Et perdu en même temps leur caution. N’est pas président de la République du Mali qui veut. Une élection à la magistrature suprême n’est pas une farce pour comédien. La leçon a été comprise. Désormais, on va s’abriter derrière un éléphant pour ne pas se faire battre par la rosée.

L’aide aux partis: une gigantesque escroquerie

Mais en jetant leurs responsabilités traditionnelles aux orties que sont la formation des militants, l’éducation des citoyens et, avant tout, la conquête et l’exercice du pouvoir, les chefs des partis politiques ne doivent plus pleurnicher derrière l’argent du pauvre contribuable malien.

Ils ont geigné quand, pour cause de mauvaise utilisation de l’argent du peuple, la Section des Comptes de la Cour Suprême a voulu leur couper les vivres. Certains d’entre eux en ont eu le souffle coupé. Cependant ATT, qui ne pourra se faire réélire sans les partis, leur a jeté de l’argent par la fenêtre pour leur permettre de battre compagne.
C’est une immense escroquerie organisée à l’échelle nationale pour permettre à quelques têtes de turc de se remplir les poches. au détriment de l’immense majorité. Comptabilité douteuse, factures de téléphone non payées, idem pour la location du siège, c’est un énorme gâchis et ces gents-là doivent rendre gorge de ce qu’ils nous prennent indûment. Plus d’infos sur ce sujet sur maliweb . net.  Au Mali, on se rend compte qu’il suffit de se faire un récépissé pour avoir son "nassongon". Cette comédie va-t-elle encore durer? C’est le risque que nous courons au temps de «l’ATT-cratie» quand on veut acheter des voix avec les moyens du peuple en distribuant des cadeaux à ses amis politiques. Car, en fait, l’alliance pour la démocratie et le progrès n’est ni plus ni moins qu’une forme de copinage politique qui, pas plus que ATT lui-même, n’offre un programme de société, une alternative crédible au peuple malien.

ATT: un Général aux abois rattrapé par les affaires

Les initiateurs du Manifeste pour la démocratie auraient préféré l’appeler "Alliance pour le recul de la démocratie au Mali". Fort heureusement que les Maliens auront le choix en 2007 entre un Général aux abois et rattrapé par les affaires et une opposition musclée représentée par un IBK requinqué à bloc qui a osé prendre le taureau par les cornes au pays du béni-oui-ouisme politique et de l’unanimisme parlementaire de Ag Imbarcawane. Quoi qu’on dise, c’est le «mandemansa» et le RPM qui sont en train de sauver notre système démocratique. ATT doit d’ailleurs une fière chandelle à IBK qui le sauve de l’infamie qu’a connue Alpha Oumar Konaré obligé, face au boycott du Coppo, de se chercher un opposant de fortune en la personne de feu Maribatrou Diaby.

Le paradoxe de toute cette situation est que celui qui méprise les partis politiques a fait appel à ces mêmes partis politiques pour assurer sa réélection. Dans tout çà où est le Mouvement citoyen? Où est l’ACC? Où sont les indépendants? ATT était-il donc orphelin?. A tous ces partis moribonds, en tout cas, IBK a donné l’autre jour, une leçon de morale politique : "Un parti qui ne va pas aux élections n’a pas de sens."

Mamadou Lamine DOUMBIA

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