Docteur ingénieur, chercheur émérite, Madiassa Maguiraga est investi candidat à l’élection présidentielle pour le compte du Parti populaire progressiste (Ppp). Cet ancien collaborateur de la Nasa (1967-1968) pour la mission lunaire Apollo est pour la deuxième fois candidat. Dans une interview qu’il a bien voulu nous accorder, mardi dernier, l’ancien professeur d’université au Tuskegée (Usa) en 1972, au Ghana en 1971 et de la Faculté polytechnique de Kinshasa en 1977 parle de son ambition pour le Mali et la campagne présidentielle. Madiassa Maguiraga témoigne également du mépris dont il est l’objet au Mali et l’amertume qu’il a ressenti depuis son retour au Mali.rn
L’Observateur : Madiassa Maguiraga, vous êtes candidat. Depuis deux semaines, à l’instar de vos pairs, vous parcourez le Mali profond. Quel bilan tirez-vous de cette campagne ?
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Madiassa Maguira-ga : Je me félicite d’abord de ce qu’on a pu faire tout au long de cette campagne. C’est un véritable succès en ce sens que j’ai pu apporter de nouvelles idées qui font la base d’un développement durable pour notre pays. Quels sont les mécanismes qu’il faut mettre en œuvre pour que le Mali puisse amorcer son décollage. Voilà une question, entre autres, que j’ai exposée aux Maliens pendant toute ma campagne. Depuis, je reçois presque de l’extérieur des appels d’amis, de compagnons et d’autres Maliens qui me félicitent de la pertinence de mes idées. Puisqu’ils estiment que je leur ai ouverts les yeux sur des choses qu’ils ignoraient.
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Une campagne présidentielle n’est qu’une foultitude d’idées. Mais, elle entraîne des dépenses…
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J’avoue que nous n’avons pas assez de moyens. Ce que nous avons est limité. C’est pourquoi, nous ne pouvons pas nous permettre certaines choses. Nous débordons d’idées nouvelles et d’ambitions pour ce pays. Si la télévision était gratuite, j’aurais pu m’exprimer à moindre frais.
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Quelles sont les localités que vous avez parcourues ?
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J’ai été un peu partout. Nous avons visité des villes comme Kolondiéba, en troisième région, Sénou en deuxième région, Nioro mon village natal et la ville de Kayes, toutes les deux en première région.
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Qu’avez-vous dit concrètement à vos militants ?
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J’ai parlé à des Maliens et non seulement à mes militants. Parce que mon ambition va au-delà du Ppp, dont je suis le candidat. Le projet dont je suis porteur s’adresse à tous les Maliens sans exception et partout où ils se trouvent. J’ai clairement dit que je suis en politique parce que je veux voir le Mali aller de l’avant et émerger. Je ne cherche pas à être conseiller ou député.
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Si j’ai décidé de me porter candidat pour la présidence, c’est parce que je suis convaincu que c’est à ce niveau qu’on puisse opère de grand changement. Si à un autre niveau outre que la présidence vous avez des problèmes, il vous sera difficile de réaliser le changement dont vous avez rêvé. Parce que les gens n’ont pas les mêmes volontés politiques.
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En terme de changement, qu’avez-vous à proposer aux Maliens ?
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J’ai eu à exposer mes idées essentielles et elles sont pertinentes. Je le dis et je le répète, il ne peut pas y avoir de grand changement tant que le salaire de ceux qui sont chargés d’opérer ce changement. C’est à dire les fonctionnaires, ouvriers, etc. Il n’est pas suffisant. J’ai proposé, une fois élu, de multiplier le salaire par trois afin que chacun puisse vivre décemment. C’est aussi un moyen sûr et certain d’éviter la corruption.
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Tout ce que vous dites est beau. Mais, comment vous allez vous y prendre pour que le salaire une fois triplé n’ait pas d’incidence sur d’autres secteurs de l’économie malienne ?
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Cette reforme ne sera possible que grâce au lancement de l’essor industriel. Encourager la création d’unités industrielles de transformations de nos matières premières. Nous devons être en mesure de transformer sur place nos produits comme le coton. Ceci me paraît extrêmement important compte tenu de notre position de pays carrefour. Nous pouvons ravitailler beaucoup de pays de la sous-région avec des matières premières transformées. Le troisième point que je vais prioriser, c’est la production aurifère. On doit pouvoir maîtriser la quantité d’or que nous produisons. Que ce ne soit plus les sociétés minières qui nous dictent ce que nous devons faire. Nous devons être en mesure de décider nous mêmes et disposer de notre potentiel minier. Les 20 % dont le Mali bénéficie dans le contrat est à réviser. C’est peu ! Ça ne saurait attendre très longtemps. Quand on sait que la durée d’une mine est très courte. Il est connu de tous que nous tirons la plupart de nos recettes de l’or. Mais, qu’allons nous donc devenir après les mines ? Et si on n’arrive pas à trouver d’autres sites, ce serait vraiment du gâchis pour le Mali. Alors que l’occasion est là pour mettre cet or en valeur.
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Comment ?
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Voyez-vous, la région de Kayes où je suis originaire produit beaucoup d’or. Mais, rien n’est fait en terme de développement pour cette région. Aucun projet porteur de développement pour cette partie du Mali, véritable pourvoyeur d’émigrants. Les problèmes sont là, visibles. On ne fait rien pour les résorbés. Moi, en ce qui me concerne, je propose que sur chaque site on prélève 1 % de sa production pour la région de Kayes. Le courant aussi vient de Manantali. Mais très cher. Si on diminue les factures, on encourage la venue d’unités industrielles.
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Avec Manantali et son énergie, l’aménagement des périmètres irrigués, l’or de Loulo, Tabakoto, Sadiola et Yatela, toutes ces potentialités tirées à partir de Kayes, auraient du influer sur le développement de la région.
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Vous donnez l’impression de tenir un langage de régionalisme. N’est-ce pas de bonne guerre de défendre votre région d’origine ?
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Non ! Pas du tout ! Loin de moi cette idée de tout ramener à la seule région de Kayes. Comme je rentre d’une tournée dans la localité, la population m’a exprimé ses besoins et attentes que j’ai d’ailleurs trouvées légitimes. Sinon, chaque partie du Mali a sa spécificité. Peut-être que j’aurai le temps de parler des autres régions dans les jours à venir.
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Au niveau de l’agriculture, les paysans ont assez de problèmes en ce qui concerne les redevances en eau à l’office du Niger et la question de l’engrais. A ce niveau, pour quoi ne pas adopter une politique qui permettra aux paysans d’accéder à l’eau et aux engrais gratuitement pour une durée de deux ans. A quoi servent les recettes de l’Etat finalement ? Elles devaient servir à soulager ceux qui souffrent au plus profond d’eux même.
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Au cours de vos sorties, quels groupes avez-vous ciblés ?
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Je n’ai pas ciblé un seul groupe. J’ai touché tout le monde. Le programme que j’ai élaboré n’est pas spécifique à une seule partie. J’ai approché des intellectuels, des ouvriers et des paysans.
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Vous êtes un Malien qui a longtemps séjourné hors du pays. Avez-vous un rapport avec vos compatriotes de l’extérieur ?
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Je n’ai pas de rapport formel avec les Maliens de l’extérieur. Vous savez que la communauté malienne scientifique n’est pas structurée à fortiori celle de l’extérieur. Je vis actuellement au Mali et je me bats comme je peux pour faire aboutir mes idées. J’œuvre selon mes moyens avec toutes les difficultés sans supports de l’Etat. J’ai suffisamment de problèmes pour espérer toucher ceux qui sont à l’extérieur.
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Même pas avec vos parents de la communauté Sarakolé qui constituent le gros contingent des Maliens de la diaspora ?
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Quel contact peut-on avoir avec eux ? Dieu merci ! Ils sont à l’extérieur et vivent bien. Ils envoient de l’argent au Mali. C’est vrai qu’il y a beaucoup de choses à faire. Il faut des reformes politiques, revoir notre partenariat avec les pays d’accueil de nos compatriotes, pour qu’ils puissent vivre dignement. Je leur demande de voter pour moi.
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Croyez-vous à un second tour ?
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Tout dépendra de la décision des électeurs. S’il y a un second tour, tant mieux. Mais si on va à un deuxième tour, on pèsera dans le jeu électoral pour d’éventuelles alliances.
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S’il y a un deuxième tour entre le candidat de la mouvance présidentielle et celui du Fdr, pour qui vous voterez ?
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Mon problème ne se situe pas à ce niveau. Mon objectif, c’est profité de cette échéance pour exposer mes idées à mes compatriotes. Que je puisse sentir des gens derrière moi, afin que nous puissions nous aussi participer au gouvernement.
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Il n’y a pas de développement sans recherche. Une fois élu que comptez-vous faire dans ce domaine ?
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Il faut passer de la recherche à la production. Il faut un programme agricole consistant pour pouvoir assurer la sécurité alimentaire. Dans n’importe quel progrès, il faut intégrer la recherche. Chaque enseignant, en plus de son activité pédagogique, mène des recherches. Comme aux Usa que je connais le mieux, le slogan phare est «publier ou périr». Cela veut dire qu’après un certain temps d’activités pédagogiques, si vous ne publiez pas, vous êtes remercié.
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En votre qualité de chercheur, aujourd’hui versé dans la politique, pensez-vous que la politique est le seul moyen de servir son pays ?
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Non ! Ce n’est pas le seul moyen, mais c’est un moyen indispensable lorsque vos intérêts sont en jeu. Quand vous êtes piétinés et quand on ne vous met pas à la place qu’il faut. Je me suis engagé dans la politique, parce que l’Etat et les politiques n’ont pas fait leur travail.
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Que voulez-vous dire ?
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Le travail de l’administration et des hommes politiques aurait dû être de me mettre au travail scientifique. J’ai des compétences avérées en informatique, télécommunication et électronique. Ce sont des domaines qui relèvent de ma compétence. J’ai fait mes preuves ailleurs. Il n’y a pas de raison qu’on ne puisse pas faire la même chose chez moi. Si je suis rentré au Mali, c’est par fibre patriotique. Et les initiatives privées que j’entreprenne sont souvent bloquées. Je ne sais pas pourquoi ?
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Propos recueillis par
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Abdoulaye DIARRA
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