Après une année particulièrement difficile, marquée par des violences physiques, séquestrations, intimidations, tentatives de musèlement, emprisonnements illégaux et autres écoutes illégales, que les hommes de médias du Mali ont célébré à l’unisson, le vendredi 3 mai 2013, la Journée mondiale de la liberté de la presse.
Les organisations professionnelles de la presse, en collaboration avec le ministère de la Communication, ont planché sur le thème retenu pour cette 20ème journée par l’UNESCO: «Parler sans crainte: assurer la liberté d’expression dans tous les médias». Ce 20ème anniversaire a permis aux hommes de médias de dresser un tableau sombre de la presse malienne au cours de l’année écoulée.
Ainsi, notre pays a perdu 74 places (99ème sur 179 pays) dans le classement mondial de la liberté de la presse de Reporter Sans Frontières. En 2013, 19 journalistes à travers le monde ont déjà été tués dans l’exercice de leur profession (Pakistan 6; Syrie 5; Brésil 3; Somalie 2; Mexique 1; Paraguay 1; Russie 1) et 174 ont été emprisonnés.
A cette liste s’ajoutent les 9 Net-citoyens et Citoyens-journalistes tués et les 162 Net-citoyens embastillés à travers le monde. Pour convenir du rôle et de la place de la presse malienne dans le processus de reconstruction du Mali, les organisations professionnelles ont décidé de mettre l’accent sur la place que peuvent jouer les professionnels des médias dans le processus de dialogue et de réconciliation amorcé par nos autorités, après la reprise des mains des envahisseurs de la partie septentrionale de notre pays.
Ainsi, leur porte parole, Sambi Touré, a appelé les journalistes à servir de garants et de remparts à la liberté de presse. «Vous devez continuer à dénoncer les abus et les déviances, mais vous avez le devoir de cultiver la paix et le dialogue pour un Mali nouveau». Abordant dans le même sens, le Ministre de la Communication, Porte-parole du Gouvernement, Manga Dembélé, a soutenu que la crise a rendue vulnérable les journalistes, dont la plupart vit dans la précarité, et dégradé les relations entre partenaires, en raison de la situation financière difficile des entreprises de presse.
Le ministre a expliqué que les journalistes sont les héritiers des pionniers qui ont bravé la dictature. C’est pourquoi il les a invité à agir en toute responsabilité, avec pour seule boussole l’intérêt supérieur de la nation. Manga Dembélé a profité de l’occasion pour saluer la presse pour sa participation à la mise en œuvre de la Feuille de route.
Au cours de cette journée, deux thèmes ont été débattus. Il s’agit de «Paix, dialogue et réconciliation: quel rôle pour la presse, exposé par Tiona Mathieu Koné et «Média et pouvoir politique», traité par Cheick Oumar Maïga.
Yaya Samaké
Résolutions de la 20ème JMLP au Mali
Nous, Associations professionnelles et patronales de la presse malienne (GROUPE, ASSEP, URTEL), de concert avec la Maison de la Presse, l’AMAP et l’ORTM, regroupées à l’occasion de la 20ème Journée internationale de la liberté de presse au Centre international de conférences de Bamako (CICB), sur le thème international «Parler sans crainte: assurer la liberté d’expression dans tous les médias», décliné au plan national en «Sécurité des journalistes et des professionnels des médias et entreprenariat de presse face aux défis nationaux: Quelle presse après la crise?»,
– Vu les atteintes et violations graves et répétées à la liberté de la presse dans notre pays depuis le 22 Mars 2012,
– Vu les chantages, harcèlements, agressions, enlèvements, passages à tabac, tortures… et emprisonnements arbitraires dont les professionnels des médias ont fait l’objet,
– Vu le besoin impératif de protection et de sécurisation des professionnels dans l’exercice de leur fonction,
-Vu l’obligation d’assurer l’effectivité de la garantie constitutionnelle de la liberté de la Presse ;
– Considérant la double crise sécuritaire et institutionnelle que vit notre pays,
– Considérant la situation particulière de guerre que vit notre pays,
– Considérant la nécessité d’une synergie et d’une convergence entre tous les fils du pays pour relever les défis qui se posent à notre pays,
– Considérant le rôle et la place capitale des professionnels des médias dans le processus en cours de dialogue et de réconciliation, ainsi que dans le processus électoral,
– Considérant l’impact de la double crise sécuritaire et institutionnelle sur les entreprises de médias, tant publiques que privées,
– Considérant le plaidoyer des Associations professionnelles et patronales pour l’urgence d’une aide et d’un accompagnement des pouvoirs publics afin de permettre aux medias d’accomplir leur mission de service public d’information des populations,
– Prenant acte du discours fédérateur et prospectif du ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement,
– Au regard des débats riches, nourris et féconds au cours des panels animés par les professionnels des médias et les acteurs de la société civile,
Demandons et exigeons:
– L’adoption par le gouvernement et l’Assemblée nationale des textes régissant la presse ayant fait déjà l’objet d’une relecture consensuelle entre les principaux acteurs des médias et du département;
– La revalorisation de l’aide à la Presse par une indexation au budget d’Etat;
– L’adoption du Décret d’application, pour rendre effective l’aide indirecte exigée par la loi portant régime de presse et délit de presse;
– L’adoption de la Loi d’accès à l’information, qui a également fait l’objet de relecture consensuelle;
– L’association et l’implication des médias dans les grandes réformes sociales et institutionnelles, commissions ou comités en cours ou à entreprendre dans notre pays.
Engageons les professionnels des médias à:
– Soutenir le processus de paix et de réconciliation nationale;
– Accompagner le processus électoral en cours;
– Observer rigoureusement les principes éthiques et déontologiques régissant la profession;
– Elaborer une Convention collective régissant la profession.
Bamako, le 03 mai 2013
Les associations professionnelles et patronales de presse