En quatre ans, le budget de Koulouba est multiplié par trois : il est passé de 6 milliards en 2002 à 18 milliards en 2006. Qu’est-ce qui justifie cette explosion du crédit alloué à la présidence de la République au regard des ressources limitées du pays et en comparaison avec le budget de l’Assemblée nationale et celui de la Primature ?
C’est l’article 4 du chapitre I consacré aux ressources de la loi des finances, au titre de l’exercice budgétaire 2006, qui traite des crédits destinés aux dépenses et investissements effectués pour le compte des institutions phares de la République, les départements ministériels, les structures publiques et para publiques, les huit régions administratives du pays, les collectivités locales et décentralisées, etc. Le crédit plafond global s’élève à 935 459 371 000 milliards. La moitié de cette somme est affectée aux dépenses ordinaires, soit 457 115 176 000 milliards. L’autre moitié, aux dépenses en capital : 478 644 195 000 milliards. A l’intérieur de ce chapitre, c’est le crédit de paiement qui accapare la plus grande somme, car 374 644 262 000 milliards FCFA y sont consacrés. Le remboursement du principal de la dette se positionne en seconde place avec 61 522 000 000 milliards FCFA. Quant aux dépenses d’investissement hors crédit de paiement, ils représentent 42 477 933 000 milliards FCFA.
La part du lion
Dans la répartition de cet argent, c’est Koulouba qui apparaît comme l’institution publique la plus budgétivore en 2006 puisqu’elle engloutit à elle seule deux fois et demi plus d’argent que l’Assemblée nationale du Mali et deux fois plus que la Primature avec 18 milliards de crédit annuel dont le chiffre, comme par enchantement, a été multiplié par trois en l’espace de quatre ans. En effet, quand le président Amadou Toumani TOURE arrive au pouvoir en 2002, le budget de Koulouba était déjà en exécution et il était évalué à 6 787 479 milliards FCFA qui avaient même été amputés de 12 679 millions FCFA, le chiffre initial étant de 6 800 158 milliards FCFA. En 2003 de l’ère budgétaire ATT, l’on a enregistré une légère hausse de près d’un milliard FCFA : 7 128 600 milliards FCFA. Comme la précédente année, il n’y a pas eu de mesures nouvelles après le vote parlementaire ayant porté sur 7 717 219 milliards FCFA, soit 588 619 millions FCFA de moins. La tendance est restée à la hausse en 2004 : 8 076 694 milliards FCFA. Les chiffres votés étant estimés à 7 176 2002 milliards FCFA, les mesures nouvelles représentaient 900 492 millions FCFA. Mais c’est en 2005 que les chiffres ont véritablement pris de l’ascenseur en dépassant la barre des dix milliards : 10 835 250 milliards FCFA. La cerise sur le gâteau des crédits, c’est avec le budget 2006 estimé à 18 089 106 milliards FCFA, soit 6 924 906 milliards FCFA de plus au titre des mesures nouvelles qu’il va falloir ajouter aux 11 164 200 milliards FCFA votés par les députés.
La folie des dépenses
Dans cette course aux dépenses folles, ce sont les investissements effectués par l’Etat qui se taillent la part du lion : 7 649 750 milliards FCFA. Si la dotation de base était estimée à 2 002 000 milliards FCFA, les mesures nouvelles en ont rajouté 5 657 750 milliards FCFA. Il s’agit des acquisitions, des constructions et autres grosses réparations d’immeubles, d’une part ; des acquisitions et autres grosses réparations de matériel et de mobilier, des achats de biens et services, d’autres transferts courants, d’autre part. Les dépenses de fonctionnement ne sont pas moins loties en ce qui concerne les acquisitions et autres grosses réparations de matériel et de mobilier, les achats de biens et services, car elles se chiffrent à 7 339 646 milliards FCFA. Cette somme résultant d’une majoration de 277 156 millions FCFA au titre des mesures nouvelles. A la troisième place, l’on retrouve les transferts courants sous forme de subventions et autres : 2 246 009 milliards FCFA. A ce niveau aussi, les mesures nouvelles exigent un milliard FCFA de plus. Seules les dépenses du personnel sont en dessous de la barre du milliard : 853 701 millions FCFA.
Le second rôle
C’est la Primature qui vient en seconde position avec 9 149 552 milliards FCFA, les nouvelles mesures ayant nécessité 63 385 millions de plus que les crédits initialement prévus à cet effet. Les dépenses du personnel sont légèrement supérieures à celles de Koulouba : 896 877 millions FCFA. Les 60 000 millions représentant les mesures nouvelles. En revanche, les transferts courants sont nettement inférieurs : 1 090 000 milliard FCFA. Près du double de cette somme est mobilisée pour les investissements réalisés par l’Etat : 2 314 235 milliards FCFA. Toutefois, une économie de 1 051 765 milliard est réalisée sur cette prévision en terme d’acquisition de nouvelles constructions et autres grosses réparations d’immeubles, d’acquisition et grosses réparations de matériel et de mobilier, d’autres transferts courants. Les plus grosses dépenses étant celles du fonctionnement pour les achats de biens et autres services : 4 848 440 milliards FCFA. Sur ce chiffre, 1 055 150 milliard représente les mesures nouvelles.
La portion congrue
C’est l’Assemblée nationale qui se contente de la portion congrue en terme de comparaison : 7 090 526 milliards FCFA. Les nouvelles mesures y représentent 807 000 millions FCFA. Cependant, les dépenses du personnel sont les plus élevées : 1 977 147 milliard FCFA. Les transferts courants sont dans la même fourchette : 1 071 176 milliard. Arrivent, juste en dessous, les investissements par l’Etat pour l’acquisition de constructions et autres grosses réparations d’immeubles, les achats de biens et autres services : 807 000 millions FCFA. Néanmoins, les dépenses de fonctionnement pour les achats de biens et autres services sont évaluées à 3 235 203 milliards FCFA.
Le reste des crédits est naturellement affecté aux autres structures publiques et privées qui, en termes de charges comparatives en fonction des ratios, reçoivent presque des broutilles d’argent. A l’exception du compte dénommé “Fonds spécial d’appui pour la promotion de la recherche pétrolière ”, l’on comprend mal l’inflation des crédits affectés aux structures publiques, notamment à la présidence de la République dont les missions et les prérogatives n’ont pas fondamentalement varié. A-t-on fait un inventaire des objectifs globaux et spécifiques assignés à la présidence ou évalué le taux de réalisation desdits objectifs pour augmenter ou diminuer les crédits alloués à Koulouba ? Sans doute pas. Le ferra-t-on un jour ? L’on est fondé à en douter…
Par Seydina Oumar DIARRA-SOD “