Tous les premiers ministres de l’après Révolution du 26 Mars que sont Soumana Sacko, Younoussi Touré, feu Abdoulaye Sékou Sow, IBK en passant par Mohamed Ag Amani, Ousmane Issoufi Maiga, Modibo Sidibé, jusqu’à Cheick Modibo Diarra, Diango Sissoko et Oumar Tatam Ly, se sont faits très discrets après leurs départs de la Primature. Car conscients que gérer c’est aussi commettre des erreurs, toute chose qui exige humilité et discrétion. Le seul qui fait aujourd’hui exception à cette règle est bien Moussa Mara, qui, de son départ à aujourd’hui, multiplie les rencontres, les missions, les publications dans les colonnes des journaux et dans les radios, en étalant les secrets d’Etat à la place publique, pour dit-il se justifier. Ces dernières sorties sur sa regrettable visite à Kidal en sont de trop. Réalise-t-il le niveau de la souffrance des familles des victimes, militaires et civiles confondus ? La visite de Kidal restera le plus gros caillou dans ses chaussures pour le reste de sa carrière politique. Ne prend-t-il pas trop de liberté et de risque sur une affaire classée parmi les plus sulfureuses de l’ère IBK ? Veut-il faire de cette visite son fonds de victimisation politique ?
Sans attendre les résultats du Rapport d’enquête parlementaire qui tarde à être publiés, plus d’un malien continue de croire en la responsabilité première des deux têtes de l’exécutif à savoir le Président de la République et son Premier ministre dans ce qui est arrivé aux FAMAs et aux commis de l’Etat à Kidal. Cette responsabilité ne serait ce que morale, doit être assumée par le président de la République et son Premier ministre qui sont, respectivement, Chef suprême des armées et Chef du gouvernement. C’est en cela la marque des grands leaders qui prennent la responsabilité des actes sous leur pouvoir sans en être forcément les commanditaires comme ce fut le cas un moment avec le président Aly Saibou du Niger qui reconnut des exactions de son armée alors qu’il n’était même pas en place à Niamey au moment des faits. C’est cette fuite en avant qui fut aussi le plus grand déshonneur du Général Moussa Traoré quand ce dernier refusa d’assumer les exactions de son armée lors du procès « Crimes de sang ». Alors Moussa Mara apparait aujourd’hui comme Moussa Traoré qui avait nié tout en bloc toute implication personnelle en mettant sur la place publique des secret- défenses de la République. Le peuple malien fut surpris quand 24 heures après les douloureux événements les autorités politiques ont cherché à se dédouaner de toute responsabilité.
Le seul à avoir payé à la place de tout le monde aura été le ministre de la Défense au moment des faits, en l’occurrence, Soumeylou Boubéye Maiga. Après que le tourbillon soit passé et que la tension ait baissé, ni l’Opposition encore moins la société civile n’ont exigé de la justice encore moins de la commission d’enquête parlementaire la publication officiel du Rapport d’enquêtes sur cette hideuse visite. Pourquoi alors, aujourd’hui, l’ex Premier ministre Moussa Mara s’agite-t-il autant en mettant le doigt dans la plaie encore béante, fraiche et non cicatrisée ? C’est probablement par calcul politicien d’anticiper sur les conclusions futures d’un tel rapport que lui-même reconnaitrait peut-être comme étant l’un des plus gros obstacles à son ambition jamais cachée d’être un jour à Koulouba. Cette ambition est du reste logique et légitime mais le comble c’est de chercher à mettre en mal une République déjà à terre. D’un ancien Premier ministre, cela est inadmissible et intolérable. Les parents des multiples victimes n’ont pas encore fini de faire leurs deuils. Refuser de reconnaitre qu’il s’était trompé en forçant une visite que son ministre de la Défense, ancien directeur de la Sécurité d’Etat et fin connaisseur de la géopolitique du Sahel lui avait fortement déconseillé, refuser de présenter à temps ses excuses publiques à la Nation, relève d’une immaturité et d’une arrogance politique dont il pouvait s’en passer. Il en serait sorti plus que grandi et ses admirateurs plus ragaillardis. Son leadership est à ce prix ou ne sera jamais.
En définitive, s’il est normal pour un homme politique d’engranger des points si l’occasion se présentait, il reste tout aussi dangereux pour lui de faire feu de tout bois sur une affaire dont tous ses bons conseillers devraient lui dire qu’il avait tort. En politique les erreurs se payent cash. Qui sème le vent récolte forcement la tempête. S’il continue à persévérer dans l’erreur, il l’apprendra à ses dépens.
Youssouf Sissoko