L’affaire du député malmené par la police, Mamadou Diarra, est révélatrice du sentiment qu’ont nos élus d’appartenir à une secte d’intouchables qui ne défendent que leur cause et non les droits de tous les citoyens.
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Un bon général, dit-on, n’abandonne pas ses troupes sur le champ de bataille. C’est ce qu’a fait, jeudi dernier à l’Hémicycle, le ministre de la sécurité intérieure et de la protection civile, Sadio Gassama, qui a clairement dit aux députés, s’agissant de la police, de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Il faut dire que l’homme est imperturbable et de sang froid. Nullement décontenancé face aux tirs croisés, il n’a jamais abandonné les forces de l’ordre à la vindicte des honorables. Ceux-ci, dans un accès de rage, ont failli se livrer au procès de la police, un corps de l’Etat.
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Fort heureusement que ce procès n’a pas eu lieu. Au contraire Sadio Gassama a paru faire la leçon aux élus de la nation. Il a, en effet, reconnu qu’il y a des brebis galeuses dans la maison mais qu’il s’emploiera, au cas par cas, à extraire le bon grain de l’ivraie. Il ne faut pas jeter la police aux orties en frappant tous les policiers avec le même bâton. L’affaire du député Mamadou Diarra copieusement rossé à Gabriel Touré et jeté à la poubelle comme une ordure connaitra, a-t-il dit, une juste solution après des enquêtes minutieuses. Pas question en la matière de confondre vitesse et précipitation. Pour donner la preuve de sa détermination, il a affirmé que l’agent de police qui a molesté une douanière en pleine circulation, il y a deux ans, a été radié du corps, traduit en justice et condamné à un an de prison. Aussi sa porte est grandement ouverte à tout élu qui veut le voir. Il suffit de téléphoner ou de passer même sans rendez-vous par son secrétariat.
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Continuant sa leçon de pédagogie, Sadio Gassama a dit que les policiers sont nos enfants et que leur éducation incombe à nous tous. S’agissant de la formation, le niveau du recrutement dans la police a été relevé. Un commissaire doit avoir la maîtrise ou plus, un sous-officiers le bac. On ne recrute plus à partir du DEF. Le problème se pose désormais en terme de génération pour relever la vieille garde et rehausser la côte de la police.
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Le général a particulièrement insisté sur le fait qu’un policier en faction reçoit des ordres qu’il ne peut nullement enfreindre sous peine de sanction disciplinaire. C’est aux autres alors de comprendre le sens de sa mission et ne pas forcer le barrage, quel que soit leur titre. ATT lui-même, a-t-il dit, a été éconduit de l’hôpital Gabriel Touré lorsqu’il s’était rendu au chevet des jeunes du mouvement citoyen dont le car avait fait un accident en provenance de Gao. Sans rechigner, le chef de l’Etat avait tourné le talon. Bref, le mot député n’est écrit sur le front de personne, il faut avoir le sens de la mesure et du discernement. Mais à se bomber la poitrine partout en exhibant son titre, cela peut être cause de désagréments.
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A l’évidence, ce discours moralisateur avait vraiment de quoi refroidir l’ardeur des députés pour qui la vengeance est un plat qui se mange chaud. Après le passage du savon, tous sont restés cois. Silence, on flingue. Mais à quelque chose malheur est bon. S’ils n’avaient pas été eux-mêmes touchés par la répression, personne n’aurait crié au scandale. Sont-il des élus de la nation comme ils aiment à se gratifier eux-mêmes, ou une corporation qui défend ses seuls intérêts égoïstes ? Toute la question est là car les journalistes sont fréquemment victimes des bavures policières et on n’a jamais vu un seul député lever le petit doigt pour dénoncer ces exactions. Pire, à Bagadadji il y a des députés qui étranglent les journalistes sans que eux-mêmes ne soufflent mot. Or si l’Assemblée nationale est une institution de la République, la presse n’est-elle pas le quatrième pouvoir qui veille comme un cerbère sur les dérives de la démocratie ? Elle aussi mérite respect et considération. Mais surtout Bagadadji doit veiller au respect des droits de tous les citoyens et non pas se contenter de considérer les seuls députés comme des intouchables.
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