Vers l’abandon de la mise en accusation de l’ancien président de la République, ATT : La Haute Cour de Justice peine à devenir opérationnelle

Depuis sa mise en place formelle le jeudi 27 mars 2014 par l’Assemblée nationale, la Haute Cour de justice (HCJ) qui devait, le cas échéant, juger l’ancien président de la République, Amadou Toumani Touré, peine à voir concrètement le jour. Les efforts du président de cette institution, l’honorable Abderrahmane Niang, pour trouver des locaux pouvant l’abriter sont restés, infructueux pour le moment. Le gouvernement, qui devait faire diligence pour rendre la Haute Cour de justice opérationnelle, semble avoir d’autres priorités.

Dans le cadre du changement de cap dans la gouvernance après la grave crise politique de 2012, les autorités maliennes ont affiché une volonté claire de mettre fin à l’impunité. “Nul n’est et ne sera plus jamais au dessus de la loi “, avait clamé avec force le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita. Pour concrétiser cette volonté de sévir désormais contre toute personne qui viendrait à enfreindre les lois de la République, les plus hautes autorités ont décidé d’assainir la justice en général, mais aussi et surtout de donner à la Haute Cour de Justice toute la place qui est la sienne dans l’architecture institutionnelle du pays. Cette volonté était renforcée par la décision des nouvelles autorités de juger l’ancien président de la République, Amadou Toumani Touré, pour «haute trahison».

Seulement, depuis que ses 18 députés membres (9 juges titulaires et 9 suppléants) ont été désignés et le bureau (composé du président, Abderrhamane Niang et de son vice-président, Mahamadou Habib Diallo) investi le 22 avril 2014, plus rien. M. Niang avait annoncé rencontrer le ministre de la Justice pour que des mesures diligentes soient prises en vue de loger rapidement l’institution et la rendre opérationnelle.

Selon nos sources, il y a une lenteur dans la recherche des locaux pour l’institution. Au motif que le gouvernement fait face à des difficultés financières, plus de trois mois après la désignation de la Haute Cour, celle-ci peine à prendre son envol. Elle a donc du plomb dans l’aile.

Contacté pour fournir des éclairages, le député Alkaïdi Mamoudou Touré, l’un des neuf membres titulaires de l’institution, a expliqué que le président Niang avait quelques soucis de santé, mais un immeuble serait déjà acquis dans l’ACI-2000 pour servir de siège. Il a toutefois précisé que l’installation effective de la Haute Cour de justice n’a rien à voir avec la procédure de mise en accusation contre l’ancien président ATT. ” La Haute Cour de justice est une institution de la République qui, au rang hiérarchique, vient avant le Haut Conseil des collectivités et le Conseil économique, social et culturel “, a-t-il déclaré. Avant de laisser entendre que des véhicules sont en train d’être commandés pour les membres de l’institution.

Rappelons que la Haute Cour de Justice est l’une des huit institutions de la République du Mali, au terme de la Constitution. C’est le titre X de la loi fondamentale du 25 février 1992 qui énonce en ses articles 95 et 96 ses missions et sa composition. L’article 95 dispose que la Haute Cour de Justice est compétente pour juger le Président de la République et les Ministres mis en accusation devant elle par l’Assemblée Nationale pour haute trahison ou à raison des faits qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions ainsi que leurs complices en cas de complot contre la sûreté de l’Etat. La mise en accusation est votée par scrutin public à la majorité des 2/3 des députés composant l’Assemblée Nationale. La Haute Cour de Justice est liée par la définition des crimes et délits et par la détermination des peines résultant des lois pénales en vigueur à l’époque des faits compris dans la poursuite. L’article 96 dispose que la Haute Cour de Justice est composée de membres désignés par l’Assemblée Nationale à chaque renouvellement général. Elle élit son Président parmi ses membres. La loi fixe le nombre de ses membres, les règles de son fonctionnement ainsi que la procédure suivie devant elle.

Ajoutons que c’est la première fois dans l’histoire du Mali que les membres de la Haute cour de justice ont prêté serment le 27 mars 2014. “Je jure solennellement de bien et fidèlement remplir ma mission, de l’exercer en toute impartialité, dans le respect de la Constitution, de garder religieusement le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation à titre privé sur les questions relevant de la compétence de la haute cour de justice “. C’est la profession de foi prononcée l’un après l’autre par Abderhamane Niang, Alhousna Malick Touré, Bakary Diarra et Ousmane Kouyaté du groupe RPM, Moussa Coulibaly et Mamadou Habib Diallo du groupe APM, Alkaïdi Mamoudou Touré du groupe VRD-opposition ; Sériba Diarra du groupe ADEMA, Alassane Tangara du groupe AR-SADI.

Les neuf suppléants sont Abdias Théra, Boubacar Sissoko, Djiguiné Cissé, Samuel Cissé du RPM, Youssouf Maïga et Bocari Sagara de l’APM, Dotian Traoré du groupe VRD, Youssouf Aya de l’ADEMA et Abdoulaye Fofana du groupe AR-SADI.

Bruno Djito SEGBEDJI

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